UN SOIR A MARSEILLE
Une heure plus tôt je suis marié, à cette
sombre
Vie où chaque instant qui s’écoule montre
Du fond de la nuit de la lumière. A présent
Encore un pas, je suis le roi, je chante,
puissant !
Oh ! l’enfant innocent que je suis sur
l’aïeul infâme !
Et je chante, ébloui de ce que ma vieille âme,
Sombre, rapetissée et vile, ô Dieu clément,
Puisse encor contenir d’épanouissement !
J’étais un bourgeois quelconque ; on m’impliquait
Dans quelques affaires lugubres, à mon
insu ;
Ou bien, chez moi, sans trop m’en être aperçu,
J’avais dit un jour quelque sotte
parole ;
La bouche à peine ouverte, le mot fatal
s’envole,
Court vers le précipice, et va tomber sans
bruit
En cette sombre oreille ouverte dans la nuit.
Alors je vis sortir de Marseille
l’incontournable Dôme
Comme du Palais des Sports et du Stade
Vélodrome
La procession des artistes se met en
mouvement.
Elle avance au milieu du peuple
lentement ;
Elle passe à travers tout ce qu’elle
rencontre.
Rien ne l’arrête. On s’écarte quand elle
se montre
Ce sont les familiers de toutes nos chansons.
On se prosterne, là, on sait que cette vision
Est une main qui pendant des heures saisira
les hommes
Et moi, je reste là, à contempler toutes ces
formes
Qui traversent ainsi notre belle ville de
Marseille
Pour une fois encore y chanter des merveilles.
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