L’AMOUR EST MORT HIER

L’Amour est mort hier, l’enfant joue aujourd’hui.
Manon peut-être est là, pleine d’un sombre ennui.
La mort est froide, hélas ! Son œil bleu qui nous charme
Nous glace ! Ô deuil ! Le temps d’essuyer une larme,

Le chagrin de Manon s’en va, vide et subtil.
Hier ! Qu’est-ce qu’hier ? Un mort ! Où donc est-il ?
Pourquoi n’y est-il plus, celui qu’on voyait ? Les choses
Disparaissent la nuit. Vois donc les roses !

L’enfant rit. Sa pensée est une mouche. Il rit.
Nul souvenir ne reste en ce rapide esprit,

Nul reflet dans cette vie qui vacille dans le noir ;
Chaque souffle qui passe emporte sa mémoire.
Qu’est-il ? Une petite rose en attendant qu’il soit
Quelqu’un de grandissant que le sort aperçoit.

Voyez-le dans l’aurore avec les autres plantes
Comme lui faites d’ombre et comme lui tremblantes,
Il n’est rien qu’un parfum comme elles ; frais, vermeil ;
La pénétration charmante du soleil

Le dore, et fait qu’on voit au fond d’une auréole
Sa petite âme ouverte ainsi qu’une corolle.
De pleurs et de rayons l’aube vient le baigner,
Et c’est la seule fleur qui doive un jour saigner.





















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