Bois-de-Breux ou L'historique d'une paroisse Liégeoise



Christian Jean Collard



Bois-de-Breux
Ou
L’historique d’une paroisse Liégeoise













Présentation

       Les textes présentés sous le titre : Bois-de-Breux ou l’historique d’une paroisse Liégeoise  font partie d’un projet que de nombreux Boidebreusiens ont eus à cœur de réaliser depuis des années, afin de permettre la découverte ou la redécouverte de l’histoire de la paroisse Liégeoise qui m’a vu naître.
       Ces textes ont été à l’origine composés par les habitants du hameau de Bois-de-Breux, ayant vécu les années de la création du hameau, à ses débuts, grâce à leurs notes ; ensuite, vinrent les habitants ayant participés aux guerres qui frappèrent la paroisse ; enfin, les derniers furent ceux des générations suivantes.
       Toutes ces notes et ces savoirs glanés ça et là  permirent à M. E. Marganne de rassembler et d’imprimer peu avant 1985 une première ébauche, ensuite une première version de 145 pages, recto verso, de format A4 à l’aide d’une simple machine à écrire.
       En cette année, grâce à Internet, j’ai souhaité rassembler dans un livre d’histoire le savoir de tant de personnes aujourd’hui décédées.
       Je tiens à renouveler ma vive reconnaissance à tous ces collaborateurs vivants ou décédés pour l’assistance précieuse qu’ils mon apportée grâce à leurs notes pour les plus anciens et grâce à leurs souvenirs pour ceux qui restent encore à ce jour ainsi qu’aux nombreuses Bibliothèques des communes diverses, celles de Liège ainsi que l’Évêché de Liège sans lesquels ce livre n’aurait pas vu le jour.  
J’espère avoir réussi.
Christian Jean Collard,-



   















À la mémoire de Monsieur Edgar Marganne,














Chapitre premier

Le territoire
au cours des 12 premiers siècles

       Le territoire où se situe actuellement Bois-de-Breux, appartenait, dit Joseph Lejeune, à l’antique Éburonie qui, sur la rive droite de la Meuse, s’étendait jusqu’au Rhin. Il fallut à Jules César déployer bien des efforts pour établir la puissance romaine.
       Le nom d’Ambiorix est resté populaire parmi nous.
       Écrasés plutôt que soumis, du fond de leurs impénétrables forêts, animés par les bardes et les oracles des druides, les Éburons complotèrent ces audacieux et fréquents mouvements qui tenaient en haleine la vigilance du vainqueur. Les conquérants se maintinrent près de cinq siècles. L’usure du régime et du pouvoir romain facilita la conquête de nos régions par des peuplades barbares que recelait la Germanie.
       Le pays, situé entre les deux fleuves, fut connu dès lors sous le nom de Ripuarie et subdivisé dans la suite, au temps des fils de Clovis, en « gau » ou cantons.
       Parmi ces derniers était le « gau » de Luvia ou Luiga qui, aux dires du Père Wastelain, comprenait, sous les Mérovingiens, Liège et ses environs sur les rives de la Meuse. Clovis, 5ème roi des Francs, établit un vaste empire qui fut morcelé après lui car, chez les peuples de race teutonique, le droit de succéder n’était pas l’apanage exclusif des aînés : tous les enfants partageaient comme ils l’auraient fait d’un bien patrimonial.
       La Gaule franque fut donc partagée et nous voyons apparaître, dès ce moment, les noms d’Austrasie et de Neustrie. Bientôt l’Austrasie devint le centre du gouvernement. Pépin régna à Jupille ; à Paris, Norbert et Grimoald sont ses lieutenants et les exécuteurs de ses ordres souverains.
       Les bois de Breux faisaient donc partie alors de la Gaule franque.
       Charlemagne succède à Pépin, son père. En 769, il célébra les fêtes de Pâques à Liège et en 773, il tint à Jupille même « cour plénière ». Ce fut un grand empereur, un génie. Son fils, Louis le Débonnaire ne sut pas maintenir la dignité impériale et à partir de son règne, on voit des morcellements du pays qui affaiblirent peu à peu la puissance des Carlovingiens. Les bois de Breux et de Bellaire, avec Jupille, Grivegnée, Chênée, Fléron, etc., passèrent sous une série de maîtres divisant et redisant encore la magnifique unité établie par le grand empereur.
       En 843, le traité de Verdun partagea l’empire en trois grands États : la Germanie, la Lotharingie et la France. Les bois de Breux échurent à Lothaire. Dix jours avant sa mort, c’est-à-dire le 22 septembre 855, il morcela à son tour son héritage entre ses trois fils : Louis II, Charles et Lothaire II. Ce dernier donna à son lot de territoire le nom de Lotharingie. Lothaire II, étant mort sans enfant, en 869, son royaume fut envahi par Charles le Chauve qui, au préjudice de tous les droits qu’on pouvait lui opposer, en donna une part à son frère Louis le Germanique.
       C’est le 08 août 870 qu’en fut réglé l’accord. Le territoire de Jupille, avec la rive droite de la Meuse, fut attribué à Louis le Germanique. Ce traité fut confirmé huit ans plus tard à Meersen et ensuite à Fourons par les fils et héritiers de ces deux monarques : Louis II de Saxe, successeur de Louis le Germanique et Louis le Bègue, successeur de Charles le Chauve. Le domaine fut soumis aux rois de Germanie, malgré tous les efforts des rois de France, et, en 980, la possession leur fut confirmée par Lothaire, fils de Louis d’Outremer, dans la personne d’Othon II, deuxième successeur d’Henri.
       Après Othon II et Othon III vint Henri-le-Saint qui, en 1008, donna le territoire de Jupille à l’église de Verdun. À partir de cette époque, Jupille devint donc un fief d’une assez grande étendue car il commençait aux portes de Liège et renfermait dans sa juridiction le territoire des anciennes communes de Bellaire, Chênée, Beaufays, Grivegnée, Bois-de-Breux, Vaux-sous-Chèvremont, Beyne-Heusay, Magnée, Bressoux, Queue-du-Bois, Micheroux, Chaudfontaine, Forêt, Romsée, Gomzé-Andoumont, La Boverie (Liège) et une partie de Fraipont, dénommée de nos jours : Basse-Fraipont.
       La donation d’Henri-le-Saint fut confirmée en 1156 par l’empereur Frédéric I Barberousse dans l’acte d’investiture accordé à l’évêque Albert I de Verdun ; l’on mentionne la Cour de Jupille, le ban, les dépendances et l’avouerie. L’histoire du gouvernement des évêques de Verdun n’offre pas grand nombre de faits intéressants relativement aux bois de Breux.
       Dans son étude « Le bois de Breux et de Bellaire », publiée par le Cercle archéo~historique des cantons de Fléron et de Grivegnée, Dieudonné Monard situe, par les textes anciens, le bois de Breux et de Bellaire dans les communes actuelles de Fléron, Beyne, Queue-du-Bois, Bellaire, Jupille, Chênée, Grivegnée, Beaufays et Angleur.
       L’immense étendue que constituait cette forêt resta, pour ainsi dire pendant des siècles, vierge de toute occupation humaine. Au XVIIème siècle encore, une forêt s’étendait depuis Angleur jusque Bellaire ; elle s’appelait le Bois de Breust, de là Bois-de-Breux, Queue-du-Bois. Des exploitations charbonnières très superficielles avaient été entreprises dans son périmètre mais étaient devenues inexploitables par suite des eaux qu’elles contenaient et avaient été abandonnées.
       Ce n’est qu’après l’apparition du célèbre édit de conquête, en 1582, qui permettait de reconquérir ces ruines, qu’on commença la recherche de minéral qui provoqua un peuplement rapide et le développement extraordinaire de ce quartier où l’on vit apparaître le nom Breux toponyme. Le bois de Breux s’étendait sur les 4 paroisses anciennes de Jupille, Fléron, Chênée et Saint Remacle-au-Pont.
       Dans « Partage du bois de Breux et de Bellaire et de ses revenus », publié par le Cercle historique de Fléron, P. Guerin note : «  le Bois de Breux et de Bellaire faisait partie du domaine de Jupille, qui entra définitivement dans le pays de Liège le 12 septembre 1297, lorsque l’évêque de Verdun le vendit au chapitre Saint-Lambert. Des contestations opposèrent l’évêque de Liège aux habitants du lieu, À cet effet, les échevins du Pont d’Amercœur (cour de Jupille) publièrent le 28 mars 1393 un rapport, rappelant que les bois de Breux et de Bellaire appartenaient à l’évêque de Liège et que les habitants de Jupille, Fléron, Wez, Chênée et Péville y avaient certains droits d’usage. »
       À la fin du 16ème siècle, les difficultés s’envenimèrent, provoquant d’abord un nouveau rapport des échevins du 10 septembre 1585. Le conflit entre les droits de propriété du Prince-Évêque et les droits d’usage des habitants fut enfin résolu par un accord élaboré le 18 mars 1618, signé le 19 mars 1618, approuvé par le Prince-Évêque le 27 mars 1618. Étaient présents parmi les comparants : Barthélemy Howet et Jean Libert de Trosory de notre paroisse de Saint-Remacle-au-Pont.
       Dans « Les communes de la province de Liège » d’A. de Ryckel, Liège, 1892, on peut lire : les bois de Breux furent cédés au Prince-Évêque par le chapitre de la cathédrale le 06 mars 1278. Ils faisaient partie de l’ancien domaine de Jupille. La forêt qui a donné son nom à la localité actuelle, joignait au bois de Bellaire et s’étendait jusqu’au village, appelé actuellement Queue-du-Bois.
       Cette forêt existait toujours en 1642, comme nous l’apprend un acte du 02 février de cette année réglant les droits qui y possédaient les habitants des quatre paroisses du Pont d’Amercœur. Les registres de la Chambre des Finances du Prince-Évêque de Liège contiennent divers documents se rapportant à la même forêt. Le plus ancien est de 1393. Le village de Bois-de-Breux, qui appartenait au Prince, fut cédé par lui en 1762 en garantie en même temps que Grivegnée au chevalier d’Andriessen.
       Cette immense forêt, propice à la quiétude et au recueillement, réserve de bois, de charbon, d’eau, de gibier est l’endroit propice pour la fondation d’un monastère.
Le monastère de Robermont
       L’an 1015, sous l’Évêque Haymon, de nobles demoiselles de la maison des Prez formèrent, avec des amies, une société de sept membres. Dégoûtées des grandeurs du monde, elles voulurent vivre de la vie des recluses et se choisirent une austère solitude. C’était le bois touffu de Grivegnée, situé en regard de Chênée. Elles étaient l’espoir et l’amour de leurs nobles familles, leur séparation du monde ne s’opéra point sans de violents déchirements.
       Les cellules s’élevèrent bientôt dans les bois et les parents des nobles demoiselles pourvurent eux-mêmes à leur subsistance. Les recluses firent même construire une église vers la fin du XIème siècle. Au sujet de 1’érection de cette église, Jean Lejeune raconte une pieuse légende. Nous ne résistons pas au plaisir de la servir à nos lecteurs.
       « Or donc, en 1802, les Dames du Monastère n’avaient pas encore d’église. S’étant assemblées, le jour de Noël, pour décider de l’emplacement où devait s’élever le temple, elles résolurent de s’en remettre, en cette occasion encore à Dieu qui les avait si heureusement conduites jusqu’alors. Pour cela, l’Abbesse, que la légende appelle Ermède des Prez, prit le trousseau de clés qui pendait à sa ceinture et le jeta en l’air en disant : « Là où tu tomberas, sera le maître-autel ».
       « Mais voilà que les clés s’élancent avec une vigueur que ne leur avait pas imprimée la main de l’abbesse ; un chêne se rencontre, elles s’élèvent au-dessus de sa cime et vont tomber beaucoup plus loin, au pied de la tour des Larrons. Nom sinistre ! mais à cette époque, la tour était abandonnée. Peut-être avait-elle été jadis un des repaires des Immon, des Henri de Marlagne ? Ainsi l’église projetée s’éleva à côté de la sombre ruine. 1
       Plus tard, quand il fallut se mettre à la recherche d’une source pour alimenter le couvent, Dieu vint encore en aide à celles qui avaient tout quitté pour le servir.
       « Un jour, quelques sœurs revinrent au monastère effrayées et tremblantes : elles avaient rencontré, dans la forêt, un monstre terrible couché de tout son long, mais la tête à moitié levée. Des maçons qui travaillaient alors à la maison des nonnes entreprirent d’aller à la découverte. Ils trouvèrent au lieu indiqué une louve et, près de l’endroit où elle s’était reposée, une source à la portée des religieuses. »
       Ainsi finit la légende. Reprenons à présent le cours des événements : l’an 1093, Richer, évêque de Verdun, alla visiter ces pieuses cénobites établies dans son fief et il fut présent à la consécration de leur chapelle. Un monastère de la règle de Saint-Bernard succéda, en 1215, à ces modestes commencements et les frais de fondation furent supportés par Wéry et Robert des Prez qui, tous deux, avaient une fille parmi les recluses. Robert de Grandpré qui fut évêque de Verdun, en 1208, leur ayant donné la forêt de Nigéry, l’abbaye prenant le nom de ce bienfaiteur, s’appela « Robermont » 2.
       Un violent incendie, allumé par la guerre civile, détruisit le couvent en 1230 et ce ne fut que quatorze ans plus tard, qu’on put le rétablir et l’habiter à nouveau. Pendant ces quatorze ans, les recluses trouvèrent refuge au monastère du Val-Benoît. C’est Lambert Pétrée, chanoine de la cathédrale et trésorier de l’église Saint-Denis à Liège qui fit rétablir à ses frais le monastère en 1244.
       Cependant le domaine, donné par l’évêque de Verdun, était bien plus à la convenance de l’église de Liège. Aussi, en 1266, Robert II de Milan, évêque de Verdun, s’entendit avec Henri de Gueldre. Le domaine fut cédé à l’église de Liège au prix d’une rente perpétuelle de 100 marks d’argent, à payer au jour de la Chandeleur. Il fut convenu que chaque fois que l’évêque de Verdun se trouverait à Liège, il aurait part aux distributions faites au chapitre et qu’à partir de ce moment, communion spéciale de suffrages et de prières existerait entre les deux églises. Cette confraternité fut renouvelée le 18 septembre 1297, le lendemain de la Saint-Lambert, entre Jean Richecourt, descendant de la famille d’Aspremont par sa mère et ancien dignitaire de notre chapitre cathédral et Jean de Flandre.
       Ulric de Sarnay, successeur de Robert de Milan, réduisit à 30 le chiffre de 100 marks auparavant stipulé. Henri de Grandson approuve, en 1286, le paiement de la rente faite par l’église. Cette redevance fut rédimée, le 12 septembre 1297, au prix de 3300 livres tournois et la Seigneurie de Jupille dont Bois-de-Breux faisait partie, devint propriété du chapitre de Saint-Lambert, à Liège.

















NOTES SUR LE CHAPITRE
       1) Dans l’ouvrage « Les délices du pays de Liège », édité en 1742, par Saumery, au tome I page 285 et suivantes, nous trouvons les détails complémentaires ci-après : « Obert, XXVIèmeévêque de Liège, fit bâtir aux moniales de Robermont une chapelle qu’il dédia à la Vierge et à Saint-Etienne, premier martyr. Saint- Bernard, ayant visité un jour cette solitude (dans le second voyage qu’il fit à Liège) prédit que la règle y serait un jour suivie avec ferveur. Cette prédiction eut bientôt son effet, un monastère de son institut y fut effectivement bâti l’an 1182 par les pieuses libéralités de deux gentilshommes Wéric et Robert Des Prez. Rodolphe, évêque de Liège, en fit agréer l’érection par le Souverain Pontife Augustin. Les religieuses passèrent ensuite à l’ « Ordre de Citeaux ».
       En 1570, des soldats vagabonds et sans discipline pillèrent l’abbaye. Dans son « histoire du diocèse et de la principauté de Liège », Daris note en son tome II, page 87 : « L’abbaye cistercienne de Robermont, fondée vers 1093, fut léguée aux hospices civils de Liège par Anna Gathy, dernière religieuse. L’abbaye fut ensuite vendue avec la ferme de 36 bonniers, le 16 avril 1797, pour 110 000 livres. »
       Les bâtiments et l’église furent livrés aux démolisseurs et le terrain converti en cime1ière communal de la ville - (cimetière de Robermont).
       Les huit piliers de l’église ornent la façade actuelle du Théâtre Royal de Wallonie (Liège) et l’horloge de Bois-de-Breux sonne encore les heures à son clocher. (cf. Gobert : Histoire des rues de Liège)
       2. De .la même origine, sans doute, le lieu-dit « Roberval », cité dans les archives de la paroisse de Saint-Remacle-au-Pont à Liège au sujet d’obsèques « ayant été célébrées en notre chapelle de Roberval ». Les recherches faites au sujet de l’endroit où était situé ce temple, nous dit Monsieur le curé Fincoeur, n’ont rien donné ; on présume qu’il s’agit des environs de l’église actuelle du Bouhay.  
       L’appellation « Waide des Dames » donnée encore en 1940 aux terrains avoisinants le cimetière de Robermont provient sans nul doute de l’existence du monastère des Dames. Depuis le 1er septembre 1979, une rue de Bel1eflamme est dénommée Waide-des-dames, lieu-dit renseigné au cartulaire du Val-Benoît en 1224, qui se traduit : prés des dames. Celle de « rue des Bassins » rappelle qu’en cet endroit existaient des étangs alimentant le moulin des Dames cisterciennes.
(cf. notes sur les lieux-dits en fin de cet ouvrage)




II
Étymologie du nom Bois-de-Breux
       D’après des notes trouvées dans les archives de la Fabrique d’église, le nom « bois-de-Breux » proviendrait d’une essence d’arbre de la forêt ancienne. Le « breux » est, en effet, l’appellation wallonne d’un bois servant autrefois à la teinture. Faudrait-il comprendre « brou de noix » ?
       Mais dans l’ouvrage du professeur Godefroid Kurth, intitulé « Frontière linguistique » de même que dans le dictionnaire Liégeois-Français de J. Haust, professeur à l’Université de Liège, nous voyons que le suffixe « broeck », en allemand « bruch », en roman « Breux » si fréquent dans le vocabulaire des lieux-dits, signifiait : marécage. Bois-de-Breux aurait donc été « bois marécageux » ce qui justifierait aussi l’origine du lieu-dit « sur l’île ». D’ailleurs, certaines parties du territoire de la paroisse sont encore, de nos jours, marécageuses : prairies du vallon « Trosoris ».
       Au lexique de l’Ancien Français de Frédéric Godefroy, « breu » signifie bouillon, décoction et « bruec » signifie marais, bourbier. Certains qui étudient la toponymie, associent Bois-de-Breux et Dolembreux dont une caractéristique commune aux deux localités est d’être établie sur une colline boisée.
       Dans le dictionnaire étymologique des noms de lieux en France, Breux est de la famille de Breil, Breuil, Brolh, qui signifie : petit bois entouré d’un mur ou d’une haie, mot d’origine gauloise.
Formes anciennes du nom 
       En 1266 : à BRUZ, peut-être bruyère en Gaulois, trouvé à la chambre des comptes-liasse de Beaufays.
       En 1267 : à BREU, à la chambre des comptes-liasse de Beaufays.
       En 1280 : cessio boveris sylvarum de BREUX (idem)
       En 1309 : bois de BROIS, dans un registre de Robermont, n°2 p.40.
       En 1381 : à BREUST, au registre 42 p. 58 de la Cour féodale
       En 1476 : les boix de BREUST, au registre 2 p. 121, dans œuvre de Jupille.

Altitude
   
       150 mètres au niveau du chemin de fer.
       178,69 mètres au seuil de l’église
       180 mètres à la borne 4 maçonnée dans le muret de la maison, rue de Herve, 669.
















                                       
                                       

III
La seigneurie de Fayenbois et son château
       Au début du XVIIème siècle, un gentilhomme liégeois, Guillaume de Fayin, qui avait longuement résidé à Rome (on dit qu’il y remplit les fonctions d’ambassadeur) revint, au pays natal, à l’heure de la retraite. En 1619, il acquit en garantie, de la mense épiscopale, les communes de Jupille, Bellaire et Queue- du-Bois. Sur les hauteurs de Jupille, il créa un domaine qui s’appela Fayenbois (en wallon : « Fayinboât », francisé plus tard en Fayenbois). Il bâtit un château dont la construction fut terminée en 1625.
       Le château de Fayenbois ne paraît pas avoir reçu, depuis Guillaume de Fayin, de grandes modifications, mais une étude attentive des lieux autoriserait à conclure que le bâtisseur de 1625 utilisa en partie les murs d’une construction primitive. Les anciennes douves, qui entourent toujours cette vieille demeure, font croire, d’autre part, que Guillaume de Fayin acquit et s’appropria un ancien burg féodal, dont il conserva les substructions et respecta les dimensions.
       On expliquerait ainsi les dispositions assez insolites des diverses parties du manoir actuel. Le constructeur, notamment, ne trouva pas d’autre place que la culée intérieure du pont-levis pour édifier la tour privilégiaire qui, à cette époque, ornait toute demeure seigneuriale. Cette tour, qui fait ainsi saillie sur la façade principale, contient l’escalier qui conduit aux divers étages et présente, face au pont fixe actuel, l’unique porte d’entrée du château.
       Le pont fixe qui franchit la douve a remplacé, peut-être déjà à l’époque de Guillaume de Fayin, le pont-levis féodal. Au sujet du château de Fayenbois, Saumery, dans ses « Délices du pays de Liège », volume II, page 269, note :
       « À une lieue et demie de Micheroux, sur le sommet d’une de ces fertiles collines, signe du voisinage du riche duché de Limbourg, on trouve ce château parfaitement isolé entre des prairies et des vergers qui font la richesse et le plaisir de ses possesseurs. Sa première entrée qui regarde l’Orient, est celle d’une grande et belle basse-cour, bordée au midi d’une remise et à l’Occident, de solides bâtiments destinés au logement et autres usages du fermier.
       « L’autre côté bordé d’un étang au milieu duquel est situé le corps de logis, consiste en un gros pavillon carré dont la face de ce côté est défendue par une tour ronde qui en couvre le milieu et donne l’entrée du pavillon par une porte répondant à un pont-levis qui, avec quelques arches de pierre, traverse l’étang. La face opposée qui regarde le jardin, a aussi ses ornements dont le principal est un balcon qui couvre un demi-hexagone en saillie qui renferme une chapelle.
       « Quoique la vue semble devoir être bornée sur ce terrain, on découvre de ce balcon une partie de la Hesbaye et de la Meuse. Le jardin, quoiqu’un peu négliger, offre encore les vestiges d’une culture dirigée par le bon goût. On y remarque principalement des ifs dont huit placés avec une exacte symétrie, qui accompagnent une enceinte ronde d’espaliers en éventail qui marque le milieu de ce terrain. Ce château appartient aujourd’hui à M. Vander Heyden de Blisia, seigneur de Loye ».
       De ce texte, il ressort que l’étude faite par le Touring-club de Belgique, est fondée à dire que le constructeur du château actuel a utilisé, en partie, les murs d’une construction primitive. Mais, d’autre part, il semblerait que ce ne fut point M. de Fayin qui fit opérer ces transformations ; Saumery note que la présente construction était la propriété de M. Vander Heyden que l’auteur de l’étude du Touring-club indique comme propriétaire de 1700. Or, Saumery était contemporain de M. Vander Heyden.
       Mme la Comtesse de Rohan-Chabot, née Nadine de la Rousselière, possède une gravure de ce burg féodal.
       « Au-dessus de la porte d’entrée, au rez-de-chaussée de la tour, on voit un fronton formé de deux demi-galbes en arc de cercle semblables à ceux que le style de Louis XIII, quelques années plus tard, mit à la mode. La tour est couronnée d’une lanterne prismatique à base octogonale avec un petit chaperon pyramidal. Cette lanterne s’apparente étroitement avec d’autres constructions du même genre, que l’on voit à certains châteaux du pays (Farciennes notamment) et qui datent assurément du milieu du XVIe siècle.
       « On peut se demander si Guillaume de Fayin n’a pas conservé intégralement la tour primitive. On remarque, en effet, des traces de remaniements, assez imprécises d’ailleurs, dans la maçonnerie autour des fenêtres de la tour. Le constructeur de 1625 aurait ainsi mis de l’unité entre les fenêtres anciennes et celles qu’il aménageait dans les autres parties de la façade.
       « La tour masque, à chacun de ses côtés, la moitié des fenêtres de la façade, ce qui confirmerait l’hypothèse d’aménagement de locaux préexistants.
       « La façade est ornée de nombreux cordons horizontaux en pierre blanche, comme on en remarque à maintes constructions de l’époque de Charles-Quint. Il en est de même des façades latérales et postérieures. (cf. supplément de la revue du Touring-club de Belgique, n° 18, du 15.09.1934) »
       Le domaine de Fayenbois appartint jusque vers 1700 aux descendants du gentilhomme, puis fut acquis par le baron Edmond-Conrard Vander Heyden de Heisia, sire de Borharen et de Loize, dont la fille Marie-Louise épousa, le 14.07.1732, le baron Michel-Henri de Rosen, seigneur de Repen et d’Engis et apporta en dot à ce dernier l’héritage paternel.
       En 1817, Fayenbois est la propriété d’une arrière-petite-fille de la précédente, Marie-Louise de Rosen épouse de Jean-Pierre Jeunehomme. Le bien fut vendu, le 17.07.1817, à M. Antoine de Thiriart lequel légua Fayenbois à sa nièce Marie-Zoé de Floen, épouse du baron Amédée de la Rousselière. En 1901, le comte Guillaume de Rohan-Chabot, de l’illustre maison de France, épousa Nadine de la Rousselière, fille orpheline du baron Arthur de la Rousselière et petite-fille du baron Amédée ci-devant cité.
       À la mort de son époux, survenue à Paris, le 13.12.1922, la comtesse de Rohan vendit son domaine à la famille Sépulcre qui s’en dessaisit en l936 pour une société immobilière. Cette dernière transforma la propriété en parc public et le lotit pour la construction de villas.
       Lors de la vente par Mme la comtesse de Rohan-Chabot, le domaine de Fayenbois comprenait encore, d’après le tableau dressé par maître Maurice Renard, notaire à Beyne-Heusay, une superficie totale de 137 ha répartis comme suit :
       1. Château avec garage, parc, potager, serres, ferme, pelouse, bois, maisons de gardes d’une superficie de 32 ha 85 à 50 ca.
       2. Ferme avec quartier-maître de 19 ha 43 à 74 ca, occupée par M. Desert (à côté du viaduc de la rue de Herve).
       3. Ferme avec quartier-maître de 8 ha 70 a 03 ca, occupée par M. Ramackers-Leruth (ferme immédiatement après la station Fina et le garage, en montant la rue de Herve, dont le quartier-maître est, depuis 1968, occupé par les RR. PP. Rédemptoristes).
       4. Ferme avec quartier-maître de 18 ha 56 ca occupés par M. Ramackers, frère et sœurs (ferme, rue de Herve, en dessous du charbonnage de Homvent désaffecté mais que rappelle la rue du même nom).
       5. Ferme « Tambour » avec quartier-maître, sise à Jupille, de 12 ha79 a 59 ca, occupés par M. Mosbeux, fils. ("Tambour" est le nom d’un fermier qui exploita cette ferme juchée sur la colline qui domine le Fond de Houlleux).
       6. Ferme des Piétresses de 10 ha 96 a 07 ca, occupée par M. Mosbeux, père.
       7. Métairie du Fond de Houlleux (rue de Homvent), avec atelier, de l ha 57 a 60 ca, occupée par M. Ruwet, frère et sœur.
       8. Métairie du Fond de Riveau, entre les rues de Homvent et de Beyne, de 2 ha 29 a 19 ca occupés par Mme Vve Thonnard.
       9. Métairie du Fond de Riveau de 3 ha 28 a 03 ca occupés par M. Houbart.
       10. Métairie du Fond de Houlleux de l ha 63 a 38 ca occupée par M. Lamarche.
       11. Diverses parcelles de prés et bois sis sur les communes de Jupille, Beyne et Grivegnée. (cf. Gazette de Liège du 03.09.1923 ;)
       À la suite des ventes successives et consécutives au lotissement, le domaine de Fayenbois se morcelle de plus en plus ; il nous paraît qu’à plus ou moins longue échéance, bien des vestiges du passé, aujourd’hui encore debout, auront disparu. Afin d’en conserver mémoire, nous estimons bon d’acter quelques détails.
Au sous-bois, on rencontre :
       a. La “Ruine”, bâtisse d’allure originale, en grosses pierres du pays mal équarries, flanquée d’une tourelle et enjambant le sentier sylvestre. Elle renfermait une très petite chapelle à l’usage du châtelain à l’époque où Bois-de-Breux ne possédait pas encore de chapelle publique. On accédait à cet oratoire par un escalier extérieur moussu ; une clochette, appendue au flanc de la tour, invitait aux offices. Deux petites fenêtres garnies de beaux vitraux jetaient à l’intérieur un jour tamisé propice au recueillement.
       P. Guerin dans « Le château. de Fayenbois en 1673 et en 1681 », publié par le Cercle historique de Fléron, dans son n° 31 de mars 1978, cite Guillaume Jacquet, dit Monrenard, comme chapelain du château de Fayenbois et ce : que le château comprenait :des belles officines, 4 places par terre et 2 places d’entrée ; en haut, 8 places au bout desquelles il y avait une chapelle et dans une autre un balcon, dans quel château, il y a une montée bâtie de pierres en forme de lanterne ; item alentour d’icelui château il y a une fosse avec de l’eau ; item avec icelui une belle basse court qui est toute voûtée couverte d’ardoises, dans quelle il y a une brassine avec une cuve et quelques ustensiles ; item avec ce 12 bonniers et demi de vergers bien arborés entourés de haie d’épines; item un jardin par derrière contenant environ un demi bonnier, item 10 bonniers de terre arables; item un bonnier, 5 verges grandes et 13 petites de bois ou environ. (À remarquer que les vastes écuries ne sont pas citées, elles seraient donc postérieures à 1681).
       Voici, tirée de la Gazette de Liège du 26.07.71, sous la signature P. L. L. la légende de la tour de Fayenbois :
       « Le diable y empila blocs sur blocs formant un donjon de fort mauvaise mine. Un ange riait de la voir et versa quelques gouttes On peut encore voir dans le bois, une tour massive, faite de rocs solides d’eau bénite. Le diable rentra en enfer et l’ange acheva la construction du donjon après avoir édifié une chapelle ornée des plus beaux coquillages du monde ».
       b. Cinq ponts, d’allure différente, jetés par dessus le ravin, au fond duquel murmure un ruisseau aux eaux peu limpides et coulant paresseusement au travers d’une végétation folle. Ces ponts portent les noms de pont des Soupirs, pont de la Miséricorde, pont du Diable, pont Gaston, pont Arthur. (Gaston et Arthur sont les prénoms des 2 fils de M. le baron Amédée de la Rousselière).
       c. Deux chalets rustiques servant l’un de « chalet de tir », repos et salle à manger pour les chasseurs et les tireurs de pigeons ; l’autre, d’habitation au « faguineux ». (Travailleur faisant les fagots et les moussades).
       d. Le chemin, à droite du château, longeant les écuries et le potager, aboutissait à une f6rte butte : « le point de vue » d’où on découvrait les vallées de la Meuse et des Piétresses ainsi que les villages de Jupille, Bellaire, Queue-du-Bois et le hameau des Piétresses. Ce point de vue était entouré de peupliers près desquels étaient des bancs invitant au repos, à la contemplation de la nature et à la méditation.
       E. La basse-cour était édifiée le long du chemin, face au potager. Elle comprenait quelques huttes rustiques peuplées d’oiseaux rares tels que faisans, paons, pintades, canards, etc., voisinant avec de petits animaux tels que tortues, écureuils, hérissons, etc.
       f. Des écuries fermaient le potager vers le midi. C’étaient de vastes bâtiments aux loges multiples, entourant une grande cour carrée. Au fronton du bâtiment central, une horloge égrenait les heures. Les locaux de l’étage servirent, en 1866, à soigner les cholériques du village.
       g. À gauche du château et en bordure du bois s’élevait la maison du garde principal : N. Deflandre Denis.
       Au temps des barons Amédée et Arthur de la Rousselière, des fêtes champêtres somptueuses, organisées dans le parc, attiraient la foule des citadins ; aussi les auberges du village faisaient-elles à ces occasions de riches affaires. Des gardes, en livrée, veillaient à la police des festivités et à la circulation dans le parc. Les châtelains s’amenaient aux offices de la paroisse en un majestueux landau traîné par quatre chevaux et servi par cocher et groom en livrée.
       C’était le temps où la qualité d’attaché d’ambassade de Belgique auprès des cours européennes exigeait de M. le baron Arthur un certain faste correspondant au reste avec l’éducation reçue par son épouse, née Haritoff, au palais de St-Petersbourg. (Leningrad)
       Plus tard, au temps de M. le comte de Rohan-Chabot, quoique la vie des châtelains fut plus bourgeoise, chaque année s’organisaient encore des battues en règle et des tirs aux pigeons auxquels plus d’une fois prirent part Mlle la princesse Henriette de Belgique et des représentants des grands noms de l’armorial belge et français.
       L’entrée de la propriété, à la grand-route de Liège à Aix-la-Chapelle, était fermée par une grille monumentale gardée par un concierge. Aux deux extrémités, les pilastres étaient surmontés de lions héraldiques portant les armoiries de la Rousselière. Une grille d’entrée secondaire, d’allure imposante aussi, donnait accès à une allée du château, non loin de la rue de Fayenbois.
       Au début du vingtième siècle, les anciens du village aimaient à rappeler la personnalité du baron Arthur qui, grand homme du monde, ne dédaignait pas de fréquenter les gens simples de Bois-de-Breux, s’amusait de leur joie naïve et participait activement à toutes les festivités paroissiales. Il était de toutes les sociétés d’agrément et en était le “boute-en-train”. Sa charité envers les pauvres était proverbiale mais il voulait que l’aumône fut gagnée : maintes fois, on le vit faire effectuer des travaux absolument inutiles à sa propriété pour avoir l’occasion de donner un large salaire à l’indigent.
       Le 29 mars 1968, M. Pierre Wigny, ministre de la Culture française, signe l’arrêté de Classement du Château de Fayenbois. Le bois, comme site, est classé par un arrêté royal du 21 décembre 1977. Le château qui a connu comme propriétaires l’Évêché de Liège, puis la Commune de Jupille, est depuis 1977 propriété de la ville de Liège.
Des travaux de restauration ont commencé en 1981.
Note : En ce jour de 2014, il fait office de maison de repos pour les personnes âgées avec aide médicale.



















IV
La seigneurie de Gaillardmond et son château

       Avant de continuer l’histoire chronologique de notre paroisse, nous croyons intéresser notre lecteur en lui donnant quelques renseignements historiques sur les châteaux de Gaillardmont et des Bruyères ainsi que sur le couvent des Chartreux.
       Une fois encore, pour le premier, nous avons pillé le célèbre ouvrage « Les délices du pays de Liège » de Saumery.
       Et c’est ainsi, qu’à notre grande surprise, que nous avons appris que ce que nous appelions le château de Gaillardmont n’était pas autre chose qu’une maison de plaisance dépendant du véritable château de Gaillardmont lequel était situé à l’emplacement actuel du château des Bruyères, aujourd’hui, dépendance de la clinique Notre-Dame des Bruyères, réservée à la communauté des Filles de la Croix.
       Mais, sur le vu des gravures, nous comprenons que le seigneur d’Andriessen dont il sera question ci-après, ait opté pour la maison de plaisance. Ajoutons que celle-ci, du moins extérieurement, n’a pas changé d’aspect depuis 1743, date d’impression de l’ouvrage de Saumery. D’après les chroniqueurs, disent les archives de l’église de Bois-de-Breux, le nom de Gail1ardmont aurait été donné à l’endroit parce que, autrefois, les habitants dudit lieu auraient résisté victorieusement à une incursion de bandits armés. C’étaient de fameux “gaillards”.
       « La maison de Gaillardmont, note Saumery, quoiqu’anciennement bâtie, ne laisse pas d’avoir bien des agréments particuliers. Placée entre quatre vergers, dans une belle exposition, ses bâtiments d’où s’élèvent deux tours lui donnant l’air d’un château. Les logements, peu réguliers à la vérité, ne laissent pas d’être commodes et assez nombreux. Ils sont adossés du côté du midi à un beau jardin séparé en trois terrasses et orné de berceaux d’ifs taillés en pyramides et d’arbres nains couronnés des plus beaux fruits. De là, on passe par une allée de marronniers à un bois taillis situé sur la pente de la montagne que termine un petit ruisseau dont le gazouillement invite à goûter les douceurs du repos ou fait naître d’agréables rêveries.
       « On trouve une magnifique avenue de charmille touffue de près de huit cents pas fermée par deux barrières (note de l’auteur : c’est sans doute en souvenir de ce fait que cet endroit fut longtemps appelé ‘aux deux bayes’). Elle communique avec une belle maison, dont le principal corps de logis consiste en un gros pavillon partagé en quatre pièces, d’où naissent deux ailes bien bâties qui embrassent une cour carrée dont le fermier partage l’usage avec les maîtres.
       « Une haute muraille achève d’enfermer cette cour vers l’Orient et présente au milieu une belle porte de pierre. Cette maison appartenait, en 1743, à M. de Spinete, conseiller intime de son altesse l’Évêque et Prince de Liège qui l’avait acquis des mains de M.Vanbuel, seigneur de Marchin, député aux États généraux du Pays de Liège et comte de Looz. »
       La maison-château a été possédée longtemps par la famille des barons de Nollet d’où elle est passée à M. du Vivier par qui elle a été transmise à son gendre M. le chevalier d’Andriessen. Grâce à V. Ambroisse qui a publié «Le château des Bruyères à Bois-de-Breux » et à P. Guerin pour ses Notes sur la ferme de Gaillardmont à Chênée, nous connaissons quelques propriétaires : Louis de Geer, Adrien de Geer, Gertrude de Nollet, Nicolas Joseph de Nollet, Gilles de Vivier, baron de Vilers, Charles Servais Andriessens, Marie-Jeanne d’Andriessens, Marie Catherine Georgine d’Andriessens.
       La propriété de Gaillardmont fut érigée en Seigneurie, en 1762, en faveur de ce chevalier, aïeul de Mlle Henriette d’Ancion de Ville1. Le caveau de cette dernière se voyait encore à l’ancien cimetière de la paroisse, il y a quelques années. Mlle Ancion de Ville légua la propriété à sa nièce Mme Orban de Xivry, née de la Rocheblin.
   
Ci-après, le texte authentique de l’érection de la Seigneurie :
       « Jean-Théodore, duc de Bavière, cardinal par la grâce de Dieu, Évêque et Prince de Liège, de Freising et de Ratisbonne, duc des Deux Bavières, du Mont Palatin et de Bouillon, landgrave de Leuchtemberg, marquis de Franchimont, comte de Looz et de Horne, baron de Herstal, etc. À tous ceux à qui les présentes parviendront, salut :
       « savoir faisons que notre cher et féal le chevalier d’Andriessen, nous ait très humblement supplié que nous voulussions lui engager la seigneurie de Grivegnaie, Péville et Bois-de-Breux ; juridiction et dépendance avec la chasse qu’elles contiennent entre leurs bornes et limites tracées dans la carte nous reproduite et le tout jointant du levant à la séparation de la seigneurie de Stembier2, la ruelle Trosoris, le prez aux peaux3et la ruelle de l’abornement du Bois-de-Breux avec Jupille entre les deux : du midi à l’eau d’Oute4 et de Veste5 venant jusqu’au bij du moulin de Wez(6)rentrant dans la chauire7et continuant le beau-mur8 : du couchant à la muraille des Chartreux9 ou vigne et en bas à la vigne de Bavière10: et d’aval à la chauire de  Verviers et autres joignants plus amplement désigné dans la ditte carte et conformément à yvelle : avec aussij tous autres droits et prérogatives honneur et franchises dont jouissent tous les autres seigneurs gagistes de même que l’exemption des logements guets et gardes pour ses censiers et domestiques, avec également le droit d’ij créer un officier qui sera servi gratis aussi bien que notre gagiste : nous réservant néanmoins tous autres bien cens et rentes qui peuvent nous ij être dus attachés à notre recette d’Amercœur et qui appartiennent à notre table épiscopale : et c’est parmi ij cellui chevalier d’Andriessen caiant à notre trésorier général à la décharge de notre table épiscopale une somme de mille florins applicables au profit de notre ditte table et parmi concernant la ditte seigneurerie et juridiction de même que, tous droits ij à nos frais : voir que nous, nos successeurs, Évêques et princes de Liège et notre Église cathédrale pouvons à toujour et quand bon nous semblera retirer la ditte somme de mille florins lui sera retournée sans que ij celui puisse prétendre aucun désintéressement pour droits de lettres, de justice nij sur toutes autres chose quelconque et survenant à raison de la présente garantie et ce qui en dépend quelque difficulté, changement, modération ou interprétation, il en sera connu ou décidé en notre chambre des comptes à l’exclusion de toutes autres juridicatures, ensuite de ses privilèges. Si mandons et commandons à tous nos officiers, justiciers et subjects de reconnaître le chevalier d’Andriessen pour seigneur de Grivegnaie, Péville et Bois-de-Breux et à nos subjets des dits lieux de lui prester les hommages et serment de fidélité et subjection ordinaire : car telle est notre sérieuse volonté.
   
       Donné en notre chambre des comptes à Liège par ordre exprès de son Altesse sérénissime et éminentissime, le trois septembre 1762.
   
       C. Y. C. de Cortentael
       F. Lamotte, pro Scretario. »
   
       En suite des dégâts miniers, le charbonnage de Homvent acquit de M. Orban de Xivry, le château, son parc, ses dépendances, vers 1900. Il y logea des travailleurs émigrés, engagés à la mine.
       De 1938 à 1941, le château et le parc furent mis par leur propriétaire, le charbonnage de Wérister qui avait englobé Homvent, à la disposition de l’œuvre “1es colonies du grand air” des écoles catholiques de Liège.
       Le château de Gaillardmont a été démoli en 1976. Toute la propriété fut l’objet de lotissements et de constructions.
       Alors que les documents anciens écrivent souvent « Gaillardmont », la ville de Liège a adopté l’orthographe Gaillarmont pour la dénomination de la rue.
   

NOTES SUR LE CHAPITRE
1. Mlle Ancion de Ville, décédée au château de Gaillardmont, le 17 mars 1862, à l’âge de 82 ans, a été inhumée en l’ancien cimetière paroissial, contigu à la place de l’église.
       2. La seigneurie de Beyne-Heusay avait été, le 20.08.1754, cédée en garantie au baron de Stembier.
       3. Le prez aux peaux : pré situé, sans doute d’après les autres indications de la seigneurie, aux environs du “Fond du Bois” actuel.
       4. L’eau de l’Oute : lisez la rivière l’Ourthe.
       5. L’eau de Veste : lisez la rivière la Vesdre.
       6. Le village de Wez occupait les terrains formant actuellement le carrefour de la Bonne-Femme à Grivegnée (coin des rues de la Bonne-Femme, Beau-Mur, Billy, Haute-Wez et des Pipiers). De là, les dénominations Basse-Wez et Haute-Wez. (Wé, au dictionnaire liégeois de Jean Haust, signifie gué et par extension mare, abreuvoir.)
       7. Chauire : a peut-être la même origine que “tchaveye” (qui dans le dialecte de Glons signifie chemin creux) et partant signifierait “le lit de la rivière”. Chavée dans l’ancien français signifie également chemin creux.
       8. Le beau-mur, rue du Beau-Mur, entre le carrefour de la Bonne-Femme et la rue Basse-Wez.
       9. La muraille des Chartreux : une partie existe encore de nos jours et sépare la propriété des Petites Sœurs des Pauvres (restant de l’abbaye des Chartreux) et celle du Carmel de Cornillon.
       10. Vigne de Bavière : vigne s’étageant sur le flanc de la colline de Cornillon.
       * de Geer : Lors de la visite en Belgique (28.04.66) du roi Gustave VI, Adolphe de Suède, celui-ci rappela la mémoire du grand Louis de Geer, gentilhomme de Gail1ardmont, recrutant au XVIIème siècle pour son pays d’adoption la Suède, des forgerons belges dont il connaissait l’habileté, le savoir-faire, la compétence.
   








V
Le château des Bruyères

       La ferme-château de Gaillardmont, dont il est question au chapitre précédent, nommée par la suite (début du XIXème siècle) « Château du Chabot » était détenue fin du XVIIème siècle par le seigneur de Marchin.
       Elle fut acquise, au début du XVIIIème siècle par M. de Spinete, conseiller intime du Prince-Évêque, pour devenir ensuite propriété de M. le baron de Favereau-Waroux. Ce dernier propriétaire, ayant l’intention d’y fixer sa résidence, entreprit vers 1845 la construction du corps principal d’un château plus somptueux.
       Sa mort accidentelle ne lui permit point de mener l’entreprise à bonne fin. La construction fut arrêtée et les héritiers du feu baron de Favereau vendirent en 1873 la propriété à M. le baron Gaston de la Rousselière.1
       Ce dernier fit terminer le travail prévu par les plans et donna au château le nom « des Bruyères ». Il l’habita dès lors chaque année durant la belle saison ; car, l’hiver, il demeurait en son hôtel du boulevard de la Sauvenière, à Liège. La propriété fut, en 1907, vendue à M. le chevalier de Harlez-de-Deulin. À la suite de la mort glorieuse de deux de ses fils sur les champs de bataille de 1914-1918, M. le chevalier quitta la paroisse et retourna en sa propriété de Deulin.
       Le château des Bruyères fut mis en vente. Une société sans but lucratif fut créée, racheta la propriété du grand philanthrope chrétien et y installa les révérendes Filles de la Croix pour y ouvrir un sanatorium.
       À ce sanatorium fut annexée une école d’infirmières très prospère. Presque toutes les élèves étaient pensionnaires. Le premier étage de l’école Saint-Joseph avait été transformé en dortoir. Les repas et les cours étaient donnés au sanatorium. Des médecins qualifiés assuraient la formation suivant les exigences de la loi pour la délivrance des diplômes ; d’infirmière-hospitalière (3 ans) ou visiteuse, accoucheuse, coloniale, ou sociale (4 ans).
       Cette école, qui avait pris pour patronne Sainte-Julienne, a été transférée à Beauregard, Liège, après la guerre de 1940. Depuis 1971, date de l’érection de la nouvelle clinique des Bruyères, qui offre les soins les plus divers et les plus spécialisés, les infirmières stagiaires côtoient de nombreux étudiants en médecine et en chirurgie dont les cliniques universitaires de Liège ne sont plus en mesure d’assurer seules la formation vu le nombreux impressionnant de candidats à satisfaire depuis la crise économique de ce dernier quart de siècle.
   

NOTES SUR LE CHAPITRE
       1. Le baron Gaston de la Rousselière est né le 07 juillet 1842 et décédé à Liège, le 08 mars 1917 ; grand bienfaiteur de la paroisse. Il fit notamment construire les écoles catholiques de filles et de garçons, deux couvents et des locaux d’œuvres. Il prit à sa charge le traitement du personnel enseignant ainsi que tous les frais scolaires. Il avait légué à l’évêché un capital dont l’intérêt y suffisait plus que largement (du moins jusqu’après la guerre de 14-18, époque où le franc se dévalua de plus en plus). Il mourut littéralement ruiné pour les œuvres.
        










VI
L’abbaye de la Chartreuse
et la forteresse du même nom
      
       En 1357, Englebert de la Marck proposa au père général des Chartreux d’envoyer une colonie de ses religieux habiter le mont Cornillon qui, depuis l’an 1288, n’était occupé que par les soldats du Prince-Évêque de Liège.
       Sa proposition fut acceptée en 1360 et le chapitre général envoya un prieur Don Bernard de la Chartreuse de Paris et trois religieux. L’église et les bâtiments qu’ils édifièrent furent entièrement détruits en 1487 par les troupes de Robert et Adolphe de la Marck frères de l’assassin de Louis de Bourbon.
       En 1636, les Lorrains ravagèrent le pays de Liège et obligèrent les religieux à se réfugier à Spa d’où ils sont rappelés par le Prince-Évêque Ferdinand de Bavière. En 1691, le maréchal de Bouflers, commandant un détachement français se rendit maître de la Chartreuse d’où il bombarda la ville.
       L’État, de concert avec l’empereur et les puissances confédérées, résolut de faire rétablir des fortifications régulières. Celles-ci sont rasées en 1700 et la maison allait être rétablie en son état primitif, lorsque la France s’empara de Liège, de la Citadelle et du mont Cornillon.        Le marquis de Ximenes, gouverneur français de Liège, fit, en 1702, fortifier la place. Le 13.10.1702, les Alliés assiégèrent la citadelle, les Français se ménagèrent la Chartreuse pour la retraite et en firent sortir les religieux. Ils y sont assiégés et obligés à se rendre ; le feu réduit en cendres bâtiments et église.
       Les Hollandais gardèrent la place jusqu’au milieu de l’année 1703. Les Chartreux reviennent et recommencent à construire, des religieux arrivant au fur et à mesure de l’édification des cellules. Le couvent devint la plus riante Chartreuse qu’on pût voir. En 1706, nous notons le 44ème prieur : Pierre de Loncin.
       Les logements des religieux sont très commodes. Ils ont chacun leur jardin, certains en ont deux en terrasse. Les chambranles de la porte d’entrée de chaque logement sont en marbre.
       Le cloître autour duquel ils sont placés est pavé de pierres de taille ; la voûte en croix d’olive est ornée d’une riche sculpture. Chacune des quatre ailes dont il est composé à 407 pieds de longueur sur 10 de largeur. Il se trouve peu d’églises d’une structure plus noble. Elle est bâtie à l’italienne et le sanctuaire en colonnades et pilastres de très beau marbre du pays, était d’une superbe architecture de l’ordre composite. L’autel était construit à la romaine.
       Les fenêtres étaient très élevées et leur largeur était proportionnée à leur hauteur ; celles du dôme étaient du même goût et de la même régularité. D’excellents paysages de Jupin ornaient les entrepilastres. La voûte, dans toute son étendue, d’une architecture très fine, était ornée de médaillons de la plus délicate sculpture. Les stalles du chœur étaient de sculpture de l’époque et leurs magnifiques dossiers placés entre les pilastres qui régnaient autour et au-dessous des paysages d’un dessin nouveau et recherché, étaient enrichis de bas-reliefs où étaient sculptés les principaux faits de la vie de Saint- Bruno.
       Des cartouches qui semblaient se continuer ont même donné naissance aux pilastres, où étaient sculptés, avec beaucoup de goût, les trophées de l’église, séparant les bas-reliefs qui répondaient aux paysages, en faisaient un magnifique ornement.
       Le vestibule, ou pour mieux dire, la partie de l’église destinée pour les frères et les laïcs, le superbe frontispice à trois portails et le pavé de marbre choisi, répondaient à la magnificence de ce temple, digne du bon goût de ceux qui l’avaient élevé. On y voyait aussi le tableau de Saint-Bruno, peint au naturel, très estimé des connaisseurs.
       La salle d’entrée du logement du prieur était composée de quatre pièces de plein pied, outre une chapelle très propre, tapissée d’un grand nombreux de tableaux et de toutes espèces de peintures. Les connaisseurs qui les regardaient comme des ouvrages des meilleurs maîtres, donnaient le premier rang à un crucifiement sur bois. La bibliothèque très remplie occupait l’une des salles de ce logement. (cf. Les délices du pays de Liège, par Saumery)
       Le couvent des Chartreux, par application de la loi française du 01.09.1796, fut vendu avec l’enclos (2,5 bonniers), le 23.09.1797, pour 225.000 livres. La partie, ayant échappé à la démolition, est occupée, depuis le 13 juin 1853, par l’hospice des Petites Sœurs des Pauvres. (Daris : Histoire du diocèse de Liège, tome III, page 87) Les fortifications actuelles de la Chartreuse qui couvrent 43hectares du domaine des Chartreux, ont été édifiées de 1818 à 1823.
      










VII
La chapelle et ses desservants
L’ermitage et les cénobites

       Le plus ancien document, relatif au culte existant sur notre paroisse, aux archives de Saint-Remacle-au-Pont, dont Bois-de-Breux a relevé pendant longtemps, est cité par M. Georges Delarge dans son ouvrage. Il y est question de l’autorisation de construire une chapelle à Bois-de-Breux. Mais laissons la parole à l’historien de la paroisse de Saint-Remacle.
       « C’est à l’honorable Nicolas Beaufort, né et possesseur de biens audit lieu de Breux qui sollicita de Maximilien-Henri, prince-évêque de Liège, l’autorisation de faire construire une chapelle dans cet endroit, de la forme de Notre-Dame de Lorette1, en l’honneur de Notre-Seigneur-Jésus-Christ, de la bienheureuse Marie et de Saint Joseph, et d’obliger ses propres biens pour l’entretien d’un bon prêtre à assumer par ledit Beaufort et ses successeurs. »
       Le 09 janvier 1683, le Prince-Évêque fit droit à cette demande2, étant entendu que la chapelle dépendrait de Saint-Remacle et que les habitants de Bois-de-Breux seraient obligés, aux grandes fêtes de l’année, à se rendre aux offices dans l’église paroissiale de Saint- Remacle.
       En outre, le sieur Beaufort devait prendre l’engagement pour lui et ses successeurs de pourvoir à l’entretien du prêtre chargé de la desserte de cette chapelle.
       La chapelle était construite à l’endroit même où s’élève actuellement notre église paroissiale, un peu plus rapprochée cependant de la chaussée, d’après les vestiges de fondations que l’on a retrouvés lors du creusement de la cave à charbon. Une grotte y était annexée.
       Le chœur était, comme encore aujourd’hui, orienté vers l’Est ; deux grandes fenêtres éclairaient le corps du temple, quatre le chœur et une dernière était située dans la façade. Un petit clocher, avec clochette très ancienne, dominait l’édifice. Le clocheton fut renversé en 1795. La croix qui le surmontait, est encore, de nos jours, plantée sur le toit du chœur de notre église.
       La chapelle était dédiée à Notre-Dame de Lorette et devint le centre d’un pèlerinage des paroisses voisines. La Vierge que l’on vénérait, est celle-là même que, chaque année, à la procession, l’on promenait par les rues de notre village et qui est en permanence exposée sur l’autel latéral.
       Ce fut d’abord un Père Minime (les archives de la paroisse de Saint-Remacle ne donnent pas le nom) qui fut nommé. Il fut ensuite remplacé par un prêtre séculier, l’abbé Rickal qui, de Bois-de-Breux, fut désigné par la suite pour la cure d’Houffalise en Ardennes.
       Un abbé Doutrange reprit sa succession et resta à Breux pendant environ quatre ans. Il devint ensuite recteur des écoles de Saint-Barthélemy à Liège.
       Le sieur Beaufort, étant venu à décéder, sa dame convola en secondes noces avec un appelé Louis Dumont, lequel continua à veiller à l’entretien de la chapelle et à pourvoir le desservant tout comme l’avait fait le fondateur lui-même.
       Or, le curé de Saint-Remacle, l’abbé de Magnery, qui avait formé le projet de reconstruire son église paroissiale, ne voyait pas volontiers le maintien de cette chapelle.
       Par contre, les habitants de Bois-de-Breux préféraient évidemment assister aux offices, chez eux, à Notre-Darne de Lorette, plutôt que faire, surtout pendant la mauvaise saison, le long et pénible chemin qui les séparait de Saint-Remacle.
       Pour vaincre leur résistance, le curé tenta de leur créer des difficultés ; cela se passait en 1709. Il exigeait la libre disposition du calice, des ornements sacerdotaux, du tronc et de toutes les réserves de la chapelle. La façon de faire du curé de Magnery indisposa à son égard la population de Bois-de-Breux d’autant plus que ce même abbé, avant d’être appelé à desservir Saint-Remacle, avait été recteur de la chapelle en question et que, fait typique, il s’était insurgé contre son propre curé, l’abbé Labbaye, qui lui avait cherché querelle pour les mêmes motifs.
       L’abbé de Magnery était même allé jusqu’à intenter, devant le tribunal archidiaconal, un procès à l’abbé Labbaye et il avait gagné sa cause. Il avait eu comme défenseur le doyen de Saint-Denis et l’avocat Brixhon. Dans l’énoncé de son jugement, rendu le 15.01.1686, Mgr Herman de Stockhem déclarait que le tronc aurait deux clés différentes.
       L’une resterait en possession du curé et l’autre du sieur Beaufort de manière qu’ils soient toujours ensemble pour lever la recette, celle-ci devant obligatoirement servir à l’entretien et la décoration de la chapelle.
       Quant au calice, décrétait notamment l’archidiacre : « S’il arrivait, que pour guerre, on serait obligé de sauver le calice hors de la chapelle, il devait être rapporté dans la maison du donateur ou de son fils aîné ou de son plus proche de Liège et point ailleurs. »
       Le 28 juin 1709, le sieur Dumont porta à son tour le différend devant l’archidiacre (c’était Jaspar de Stockhem) qui s’empressa de réclamer des explications à l’abbé de Magnery. Malheureusement, dit M. Delarge, dans son ouvrage, j’ignore quels arguments le curé de Saint-Remacle apporta pour faire triompher son point de vue. Je n’en vois guère qu’un seul à demi plausible : la nécessité pour lui de recueillir le plus d’argent possible pour la construction de son église.
       La chapelle Notre-Dame de Lorette n’en subsista pas moins.
       À partir de ce moment, jusqu’en 1782, date à laquelle apparaît, dans les archives de Saint-Remacle, un abbé J. B. Englebert comme vicaire de Bois-de-Breux, nous ne trouvons plus de nom de desservant de notre paroisse.
       Dans ses recherches aux archives de l’État, que publie, au n° 30 de décembre 1977, le Cercle Historique de Fléron, P. Guerin note que  Jean Oultrage, ecclésiastique natif de Verviers et desservant de la chapelle Notre-Dame de Lorette, située au milieu du chemin royal du bois de Breux, adresse une supplique en janvier 1687 pour obtenir un terrain contigu et en parallèle avec la susdite chapelle pour y bâtir une “maison” et occuper un jardin qui est bien loin d’empêcher la commodité des rouliers et des voyageurs.
       Supplique signée par Jean Oultrage desservant, Noël Hoyoux, pasteur de Saint-Remacle-au-Pont, Catherine Georges au nom de Gilles Renottf, son mambour de la Chapelle et Thone Cocksay, commis du quartier du bois de Breux.
       La réponse du Prince-Évêque dépassa leur attente (longue de dix ans) puisque c’est gratuitement que cette faveur fut accordée le 17 janvier 1687. Le 24 septembre 1703, le vicaire général de Liège accorda la permission à Charles Mulkay de pouvoir porter l’habit d’ermite et fixer sa demeure au voisinage de la chapelle Notre-Darne de Lorette afin de garder et veiller à l’entretien d’icelle ; étant informés qu’il seroit convenable et mieux séant que ledit Charles ermite et ses successeurs qui pourront dans la suite être autorisés pour la garde de cette chapelle y auraient une petite demeure contigüe, laquelle ledit Charles Mulkay offre de faire construire avec l’assistance de gens charitables…
       Cette “maison”, n’était autre qu’une petite cabane qui servait de retraite à un ermite, bâtie contre la muraille de la chapelle. Une cabane qui n’a qu’une seule pièce, sans cave, ni plancher, bâtie d’ailleurs sans fondement.
       Le 25 avril 1728, le vicaire-général accorda à Jean-Baptiste Rodier, ermite, la permission de résider dans l’ermitage de Bois-de-Breux, avec mission notamment d’orner la chapelle et de développer le culte marial. L’inventaire des meubles et effets de la chapelle, dressé le 28 février 1754 par le notaire N. J. Lambinon, mambour de la chapelle, fut rédigé en présence d’Henri Cajot, bourgmestre de Bois-de-Breux.
       L’ermitage du bois de Breux fut démoli en 1780 lorsqu’il fut question d’établir près de la chapelle un vicaire résidant dans ce quartier, autrefois peu considérable, mais présentement composé de plus de quatre-vingts ménages, pour administrer les sacrements, tenir école et instruire les nombreux habitants.
       Le 11 août 1782, après la messe, la Communauté de Bois-de-Breux, assemblée devant la chapelle convint en présence du notaire J. D. D. Barbière, de Bernard Lambinon, bourgmestre de la communauté de Bois-de-Breux, de loger et stipendier un vicaire à leur chapelle dudit bois de Breux et d’employer à cet effet la rétribution annuelle.
       Nous pensons, d’après le document ci-dessous, que la chapelle fut gardée par de pieux ermites et d’après une note trouvée dans les archives de Bois-de-Breux, desservie par les Chartreux de Robermont.
       Dans les archives de Saint-Remacle est mentionné, en 1716, comme cénobite de Breux, le frère Maréchal qui fit démarche auprès de Clément-Joseph de Bavière, Prince-Évêque de Liège, en vue d’obtenir la célébration de la fête de Noël dans la petite chapelle de Lorette ; cet anachorète semble avoir résidé à l’ermitage jusqu’en 1728, date à laquelle le frère Rodier lui succéda. Le naïf document suivant en fait foi :
       « Georges-Louis, par la grâce de Dieu, évêque et prince de Liège, duc de Bouillon, marquis de Franchimont, comte de Looz, de Horne, etc. À tous et à chacun, qui nos présentes lettres verront, salut en Dieu.
       « Nous faisons sçavoir, que, comme il nous a été manifesté, que le cher Frère en J. C. Jean Rodier a embrassé déjà depuis plusieurs années l’état d’hermite et qu’il a fait profession auprès des tertiaires de Rome, et qu’il est recommandable tant à cause de sa pieuse et modeste manière d’agir, par notre autorité ordinaire nous lui avons accordé comme nous accordons par les présentes, la permission de pouvoir passer ses jours dans l’hermitage appelé  Bois-de-Breux, selon les règles et statuts desdits Tertiaires, et selon les ordonnances portées par nos sérénissimes prédécesseurs évêques et princes de Liège pour les anachorètes de ce diocése ; de sorte qu’il soit obligé de fréquenter diligemment l’église paroissiale de Saint-Remacle-au-Pont, principalement les dimanches et fêtes commandées, d’obéir au pasteur et aux recteurs de la même église qui seront pour lors et de se montrer obéissant à lui ou à eux en toutes choses, de s’abstenir tout à fait de l’entrée des tavernes ou cabarets, de travailler de toutes ses forces à orner la chapelle et augmenter le culte de Marie, d’avoir soin de ses affaires domestiques pour soi-même, et de cultiver ses jardins et d’accomplir fidèlement et sous peine d’éjection ; lui défendant sous la même peine de ne présumer s’absenter dudit hermitage dans aucun tems (sinon pour des causes raisonnables qui doivent être approuvées par ledit pasteur) où d’aller quelque parte d’un côté et d’autre, de ne point introduire dans icelle des personnes d’un autre sexe, ni de loger aucun soule quel prétexte ou couleur que ce soit.
   
       Donné dans notre cité de Liège, sous la signature de notre vicaire général dans les spirituels et soub notre seel accoutumé, ce 25 avril 1728.
   
       Signé : P. A. T. E. Comte de Rougrave, vicaire général de Liège.
   
       Rodier ne semble plus avoir eu de successeur, dit M. Delarge. En effet, c’est l’ancienne cabane des ermites que l’on appropria afin de loger le vicaire M. l’abbé J. G. Englebert, en 1782. Le 01 juillet 1751, notre village qui comptait alors quelque 300 habitants fut dans le plus vif émoi.
Le crime Lamarmite
       Cette nuit-là s’était perpétré à côté de la chapelle un crime épouvantable. Les époux Bailly-Dejardin, habitant la petite ferme, aujourd’hui, local paroissial dénommé “Li cinse dè Bosquèt”, étaient égorgés sauvagement dans leur lit, par les célèbres bandits Lamarmite, dont parle Marcellin La Garde dans son ouvrage : « Le Val de l’Amblève ».
       Voici la relation reprise à la page 70 de la dixième Edition :
       « Un jeune homme de Grivegnée qui est aux études à Louvain et est venu passer ses vacances dans sa famille, se promenait, tout en lisant, aux environs d’une petite cense isolée, située aux bois de Breux et habitée par deux vieilles gens et un petit garçon de six ans.
       « Il entend des cris d’enfant partir de l’habitation, dont la porte est hermétiquement close. Il frappe, personne ne répond, et les cris continuent de se faire entendre du fond de la seconde pièce. L’étudiant fait le tour de la maison et va regarder à la fenêtre de cette pièce qui n’a pas de volets, mais est solidement grillée.
       « Il voit le petit garçon, la chemise tout ensanglantée, près de l’alcôve des vieilles gens et tenant par le bras sa grand’mère, placée sur le devant du lit et qui semblait, ainsi que son mari, d’une immobilité complète. Le jeune homme, saisi d’un terrible pressentiment, s’efforce d’attirer l’attention de l’enfant pour se faire ouvrir, main à sa vue, le pauvre petit se cache sous le lit.
       « Non loin de là, deux hommes travaillaient aux champs. Ils sont appelés, la porte est enfoncée. Et que voit-on ? Le maître de la maison et sa femme ayant tous les deux la gorge coupée et baignant dans leur sang ; les armoires et les coffres vides de tout ce qu’ils contenaient d’objets ayant quelque valeur. Quant à l’extérieur, aucune trace d’effraction. La justice s’est immédiatement rendue sur les lieux du crime, et son premier soin a été d’interroger l’enfant.
       « On n’en a pu tirer que ceci : il s’était couché de très bonne heure, comme d’habitude, dans une espèce de coffre formant l’étage inférieur du lit de ses parents, construit à l’ancienne mode ; la pluie qui fouettait les vitres et le vent qui ébranlait la maison l’avaient réveillé. Peu après, il avait entendu son grand-père et sa grand-mère causer, dans l’avant-pièce, avec des personnes parmi lesquelles se trouvait une femme ; la conversation roulait sur le mauvais temps. Il avait regardé à travers la porte entrouverte, mais comme les étrangers lui tournaient le dos, il n’avait pu rien voir et s’était endormi.
       « À son réveil, il était grand jour et il vit que son lit était inondé d’une “eau toute rouge”. Après avoir appelé sa grand-mère à différentes reprises sans obtenir de réponse, il avait avancé la tête et avait vu qu’elle dormait encore ; il l’avait laissée en repos ; mais, tenace et sentant qu’il avait faim, il s’était levé et s’était de nouveau efforcé d’éveiller les vieillards, dont la hauteur du lit l’empêchait de voir le visage. Comme ils ne donnaient plus signe de vie, le pauvre petit avait eu peur et s’était mis à pleurer. C’est alors que l’étudiant était arrivé et qu’on avait pénétré sur le théâtre de ce forfait abominable, qui ressemble tellement à ceux commis depuis un certain nombre d’années dans le pays, qu’ils doivent être le fait des mêmes individus. »
       Une croix, placée d’abord sur le lieu de l’exécution des coupables et aujourd’hui encastrée dans le mur de clôture du cimetière, face à l’église, rappelle ce triste souvenir par l’inscription y gravée : « En mémoire de feu le sieur Gilles Bailly et d’Élisabeth De jardin, sa seconde épouse, lesquels ont été égorgés dans leur maison, dans la nuit du 01, juillet 1751. Pater. Ave. R. 1. P. »
       Dans les archives du conseil de Fabrique, nous trouvons les indications suivantes : « La maison du crime est celle occupée actuellement par Pierre Lambert-Garray, café du "Bosquet", à droite de l’entrée de l’église ». (note de M. le curé Dardenne).
       Les archives de la Fabrique d’église contiennent, en outre, une déposition faite au garde-champêtre M. Aug. Grailet par M. Borguet-Jeunehomme, décédé le 10 mai 1860, à l’âge de 80 ans. D’après cette déposition, l’exécution des deux assassins par le supplice de la roue aurait eu lieu sur le plateau des Bruyères, à l’intersection des rues actuelles Malaise et Bordet.
       Marcellin La Garde, à la page 89 de son livre « Le Val de l’Amblève » rapporte quelques renseignements supplémentaires : « Soumis à la torture, Toussaint Lamarmite et son fils avouèrent, furent condamnés à mort par la Cour des échevins de Liège. Nous ne nous appesantirons pas sur le supplice horrible qu’eurent à subir les deux misérables. Ils furent tenaillés depuis la prison jusqu’au lieu du gibet ; là, ils eurent le poing droit coupé, on leur rompit, à coups de barre de fer, les bras et les jambes ; on les laissa pendant une heure sur une roue, puis on les pendit ! »
       Ces bandits célèbres dans les pays de Liège, Franchimont et Luxembourg provenaient de Pepinster.
       M. le curé Franck qui rapporte ce témoignage, en 1865, note que cet endroit est encore couvert de ronces et d’épines et laissé tel en souvenir de l’événement. Quant aux corps des suppliciés, ils furent enterrés immédiatement avant l’entrée du bois de M. le baron Amédée de la Rousselière (entrée sur le plateau des Bruyères, avec passage à niveau privé sur le chemin de fer). Cette place, en 1865, s’appelait encore la “fosse Lamarmite”, plus tard elle fut dénommée “fossé gravier” par suite du gravier que l’on y avait extrait pour couvrir les allées du parc de Fayenbois. Les hommes (en 1935), âgés de 40 à 50 ans, se rappellent très bien ce terrain vague, témoin des jeux de leur enfance.
       Dans les archives de la paroisse d’Oupeye figure, comme curé : M. l’abbé Gilles Bailly, né à Bois-de-Breux, nommé curé à Oupeye, le 24 janvier 1773, y décédé le 22.02.1816, à l’âge de 72 ans et enterré dans ladite église, sous le confessionnal. Ce révérend abbé, du même nom patronymique que les victimes de Lamarmite seraient donc né en 1744 et, partant, âgé de 6 à 7 ans, au moment du crime. Ne serait-il pas l’enfant caché sous le lit, la nuit du 01.07.1751 ?

*
 *           *
       En 1752, le gouvernement de Charles de Lorraine, représentant de Marie-Thérèse en Belgique, fit construire la grand-route reliant Louvain à Aix-la-Chapelle par Tongres, Liège et Herve, laquelle contribua grandement à faciliter les communications avec la ville. En effet, jusqu’à ce moment, la seule voie charretière pour atteindre Liège, était le vieux chemin passant “derrière l’île” par le “Trosoris” (rue des Orchidées, actuellement), le “Couvent” (rue de la. Tuilerie, actuellement), puis se dirigeait vers Robermont, pour suivre le tracé actuel, à hauteur de l’entrée de l’école de l’État.
       La chapelle de Notre-Dame de Lorette continua à subsister et à être un lieu de pèlerinage fort fréquenté par les habitants des villages environnants. En 1782, les habitants de Bois-de-Breux, dit M. Delarge, dans son ouvrage déjà cité, demandèrent que leur vicaire ait un logement dans la localité. L’autorité épiscopale accéda à leur désir et le 28.07.1782, l’abbé J. B. Englebert, au sermon de la messe, lut l’avis suivant :
       « On fait savoir que dimanche en quinze, onzième du mois d’août 1782, après la messe, il y aura devant la chapelle une assemblée des habitants de cette communauté et quartier de Bois-de-Breux pour résoudre et convenir des moyens de fournir un logement et un appointement ou rétribution convenable à un vicaire.
       « Ainsi, on prie tous les chefs de famille de s’y trouver et comme plusieurs des habitants ont fait connaître que, dans leur cas particulier, ils contribueraient à une aussi bonne œuvre, les uns en donnant des matériaux, comme bois, planches, breux, chauffage pour cuire les breux, chaux, pierres, clous, ferrailles, waaz3 et autres choses, tels autres en faisant par corvées de charriages, des journées de maçon, de manœuvre et autres, on prie tous ceux qui sont bien ainsi intentionnés d’approcher ou M. le sindic Lambinon, mambour4 de la chapelle ou M. notre révérend Pasteur, pour leur faire part de ce qu’ils donneront en matériaux ou feront en charriages et journées. De quoi, il sera fait une note qui sera communiquée à l’assemblée. »
       Quelques mois après cette réunion, le 23.12.1782, une convention fut conclue par devant Maître Barbière. Cette convention définissait avec minutie la situation des habitants de Bois-de-Breux et de leur vicaire vis-à-vis du curé de Saint-Remacle.
       Mais où étaient situées la chapelle et l’habitation du vicaire ?
       La chapelle se trouvait à l’emplacement actuel de l’église, un peu plus rapprochée cependant de la chaussée, puisque M. le curé Dardenne écrit dans les archives paroissiales que seul un petit sentier ou accotement la séparait du chemin. Et, en effet, en 1930, en creusant la cave à côté de l’église, les ouvriers mirent au jour d’énormes fondations.
       L’habitation de l’ermite était contigüe à la chapelle et à la sacristie dans laquelle on se rendait par un petit vestibule du côté chaussée. Cette habitation, transformée par les travaux de 1783, servit de logement au vicaire résidant, puis à M. l’abbé Arts, premier curé, jusqu’en 1846.
       Après 1782, nous ne trouvons nulle part trace des noms des desservants de la chapelle. Le presbytère de Saint-Remacle, dans lequel se trouvaient les archives, a été détruit par un bombardement des troupes autrichiennes. (La cour de Wetzlar qui avait confié à l’empereur Léopold II, comme chef du cercle de Bourgogne, le soin de reconquérir les Pays-Bas révoltés, l’avait chargé de rétablir, en passant, l’évêque de Liège). Au sujet des desservants de la chapelle, nous trouvons les lignes suivantes dans les archives reconstituées par M. le curé Dardenne :
       « Le vieux Christophe François, âgé de 74 ans en 1865, m’assure avoir connu un prêtre ardennais de haute taille dont il ne peut se rappeler le nom et qui desservait la chapelle en qualité de vicaire. Il était, sans doute, d’origine ardennaise, puisque les marchands d’écuelles, cuillères en bois de ce pays, lorsqu’ils passaient par Bois-de-Breux, descendaient souvent chez ce vicaire qui leur donnait l’hospitalité.
       « Ce bon prêtre partageait son temps entre le saint ministère et l’école qu’il tenait dans sa maison. Il a laissé une grande renommée de mortification ; la nécessité de manger était pour lui, comme pour Saint-Bernard, un véritable tourment. Souvent, il remettait pour le soir le repas que son corps affamé demandait pour midi. À la retraite des troupes autrichiennes, en 1793, survint un orage, lorsqu’elles passèrent à Bois-de-Breux.
       « Selon un pieux usage, le vicaire sonnait les cloches pour inviter les fidèles à la prière. Les troupes, croyant qu’on sonnait pour exciter à un ameutement, se mirent à tirer contre la chapelle et forcèrent le prêtre à rentrer chez lui. On a vu, jusqu’à la démolition de la maison, les trous de plusieurs balles qui s’étaient enfoncées dans la muraille. »
       Ce bon prêtre est mort à Bois-de-Breux et a été enterré à Grivegnée. On ignore, écrit encore M. le curé Dardenne, si l’on a fait des inhumations dans la chapelle ; en la démolissant, on n’en a trouvé nulle trace.
       Le premier prêtre, résidant après l’“Ardennais”, que notre sacristain, M. Jean Lambinon, âgé en 1865 de 62 ans, se rappelle avoir connu et avoir fréquenté à l’école dans le vicariat, a été M. l’abbé Bérard, lequel est allé mourir à Saint-Martin à Liège, où il s’était retiré dans la vieillesse.
       En troisième lieu, vient le père Vincent, ancien religieux de Stavelot ou de Malmédy. Il venait chaque dimanche de Liège où il demeurait derrière l’ancien palais des Princes-Évêques. On cite aussi un ancien religieux, surnommé “Pendart” parce qu’autrefois, il assistait de son ministère, les criminels et les condamnés.
       Dans la 4ème question d’octobre, conférence de 1864, paroisse de Saint-Remacle, on lit ces mots : après le bombardement du presbytère en 1794, à la suite duquel les archives ont été détruites ou éparpillées, cinq curés de Saint-Remacle se sont succédé : les révérends MM. Grégoire, Bertrand, Hayneux, Mottard et Laoureux.
       Ces prêtres se partageaient avec leurs vicaires respectifs : MM. Deleuze, Lejeune, Hayneux (frère du curé), Franck et Merveille, la desserte de cette chapelle.
       Enfin, le 23 janvier 1833, Bois-de-Breux, ayant été détaché de Saint-Remacle pour être réuni et former une cure indépendante avec Grivegnée, M. l’abbé Maréchal, premier curé, venait dire la messe. M. Derouaux, qui fut par la suite curé de Heusay et qui vint finir ses jours à Bois-de-Breux, a été le dernier prêtre chargé de la desserte de la chapelle avant son érection en cure indépendante.
       Dans les notes recueillies par M. Jean Lejeune de Jupille, nous trouvons une délibération, datée du 04 juin 1820, qui dit que Bois-de-Breux était encore Commune distincte et que ce n’est qu’à la fin du régime français (1815) qu’elle fut réunie à Grivegnée.
       Le hameau de Bois~de-Breux qui a été réuni à la commune de Grivegnée, formait avant l’arrivée des Français une commune particulière et avait son bourgmestre propre, le dernier fut le sieur Bernard Lambinon (registre déposé au secrétariat communal de Grivegnée).
NOTES SUR LE CHAPITRE
       1. La Santa Casa de Lorette en Italie est une très modeste bâtisse de forme rectangulaire de 10,71 m sur 5,21 m en breux cuites et en blocs de grès avec une seule porte. (Dom Henri Leclercq dans Dictionnaire d’Archéologie chrétienne et de Liturgie).
       2. Supplique très humble : « Les surseants du dit Bois-de-Breux aiant très humblement remonstré à l’Altesse de Maximilien-Henri leur évêque et prince d’estre assé malheureux que de se voir festes et dimanches souvent privés du saint Sacrifice de la messe et des autres soulagements spirituels à raison du grand éloignement qui se trouve entre leur habitation et leur parochiale église de Saint-Remacle-au-Pont, ce qui les obligeoit à dresser leurs instantes prières afin d’obtenir la permission d’ériger une chapelle dans leur hameau et d’y faire célébrer la messe » (Liasse 1: Pièces diverses cf. La paroisse de Saint-Remacle-au-Pont par Georges Delarge, p. 164)
       3. Waaz est vraisemblablement un terme propre à la région pour désigner un matériau de construction. Le dictionnaire liégeois de Jean Haust donne : Wô, paille de seigle servant à couvrir les toits de chaume. Le lexique de l’ancien français de Frédéric Godefroy donne Wauz, paille destinée à couvrir les toits.
       4. Au sujet du mot mambour de l’église. Les affaires de la Fabrique de chaque église, écrit le chanoine Daris, dans l’ « Organisation du diocèse du XVIIIème siècle T. 1. P. 4 », étaient gérées par le curé et par un ou deux mambours qui, dans la plupart des paroisses, étaient élus par la généralité des paroissiens.
       Les mambours devaient rendre chaque année un compte public de leur administration. Leurs attributions ne s’étendaient que sur la gestion journalière.
       Toute affaire d’une certaine importance devait être consentie par les paroissiens et approuvée par l’archidiacre. Lorsqu’il s’agissait de la gestion des biens de son église, locations ou ventes de terrains, partages de propriétés, etc, la Fabrique, dénommée souvent “le Luminair”, formait une véritable cour de justice, une cour jurée composée de son “maire” (c’était le curé) et de ses “tenans ou mambours”.
       Au début du XVIIe siècle, l’archidiacre Évrard, comte de Mandercheit, jugea utile de codifier les anciens statuts de l’administration religieuse, civile et judiciaire de l’archidiaconé du Condroz dont Bois-de-Breux relevait comme partie intégrante de la paroisse Saint-Remacle-au-Pont. Au chapitre II des règlements remis à jour par Jean Delderen, un des successeurs d’Evrard, il est question des mambours. Tous doivent obéissance à leur curé.
       Outre leur charge, ils sont tenus d’instruire les enfants “touchant les bonnes mœurs, lettres et catéchisme de chrétiens”. Lorsqu’une “mambournerie” devient vacante, les derniers mambours présentent à leur curé une liste de 3 ou 4 paroissiens, jugés les plus aptes à remplir cette charge.
       Le pasteur en choisit un ou deux, selon les exigences de la Fabrique et de son église. Ces mambours prêtent le serment d’usage et sont nommés pour une année entière. Les comptes de la Fabrique et des pauvres se rendent en présence du pasteur, des mambours précédents et de tous ceux de la communauté qui s’y voudront trouver, y étant appelés par la publication en chaire de vérité et au jour convenu, par le son de la cloche.
       Il est strictement défendu de faire des « gourmandises aux dépends de l’église et des pauvres. » Lorsque les mambours ne sauront écrire, les pasteurs pourront désigner quelque salaire à quelque écrivain député, selon les commodités de l’église et le labeur dudit écrivain. Les conseillers de Fabrique actuels seraient donc une survivance des mambours du XVIIème siècle.

















VIII
Événements de 1790

       Dans le « Dictionnaire historique et géographique des communes Belges » d’Eugène de Seyn, nous trouvons sous la rubrique “Beyne-Heusay”, la note suivante : «  le prince-évêque de Liège céda la seigneurie (de Beyne-Heusay) en garantie, le 20 août 1754, au baron de Stembier, chanoine tréfoncier de Saint-Lambert, à Liège, puis la seigneurie passa au baron de Villenfagne de Sorinne, qui, en 1790, vit sa maison de campagne de Bois-de-Breux, dévastée par les « patriotes ».
       Dans « L’histoire du diocèse et de la principauté de Liège », tome Il, de Daris, nous trouvons, à propos de cet événement, les lignes suivantes :
       « Au moment, où a éclaté la révolution de Liège (18 août1784) le prince-évêque était Hensbruch ; les deux bourgmestres Ghaye et de Villenfagne ; le meneur de la révolution De Chestret. Après moins de deux heures de révolte, les “patriotes” étaient maîtres de la ville. Huit jours plus tard, dans la nuit du 26 au 27 août, le Prince-Évêque jugea prudent d’émigrer (il ne rentrerait à Liège que le 13 février 1791).
       « Les “patriotes” avaient fait appel, pour la défense de la cité, à des troupes prussiennes qui arrivèrent le 30 novembre 1789, sous le commandement de Schlieffen. Bientôt, ces troupes les gênèrent et par leur présence et par l’argent qu’elles exigeaient. Ils décidèrent donc de s’en débarrasser (ce qui eut lieu le 16 avril 1790) et, forts de leur domination, ils se livrèrent à une foule de destructions, à Beyne, à Bois-de-Breux, ils dévastèrent la maison de campagne du baron de Villenfagne de Sorinne ».
       Daris ne donne pas la date de cette destruction, mais il la situe après une autre du 12 avril et avant une du 19 avril 1790.
       Le 17.07.1789, le duc d’Enghien, qui, le 17.03.1804, devait périr si tragiquement et sans nulle forme de procès, dans les fossés de Vincennes, parce que telle était la volonté du premier consul Bonaparte, mais dans une attitude de noblesse d’un descendant des Condé, fuyait Paris et la révolution et se dirigeait vers Bruxelles.
       Notre capitale l’abrita du 19 juillet au 03 août 1789. Le grand-père et le père du Prince ayant fixé, au comte d’Artois, la ville de Turin comme point de réunion, les fugitifs, pour éviter les frontières françaises, se dirigèrent vers Aix-la-Chapelle en passant par Liège.
       Dans son “journal”, où il consignait depuis l’enfance tous les événements, le Prince note qu’ils partirent de Bruxelles, le 03 août 1789, à 6 heures du matin et durent coucher à Liège, la voiture de sa tante n’étant arrivée que fort tard. Le lendemain 04 août, ils quittèrent à 6 heures du matin « la ville où tout est noir, à cause de la grande quantité de charbon de terre qu’on y brûle en guise de bois ».
       C’est donc vers 7 heures du matin que les voitures, emportant vers l’exil les illustres descendants de la maison de France, traversèrent notre paisible paroisse.














IX
Érection de Bois-de-Breux
En cure indépendante

       Les habitants, formant alors une population de six cents âmes, furent agréablement surpris en apprenant, fin 1839, que leur territoire formerait désormais une cure indépendante.
       Monseigneur Van Bommel avait compté notre village au nombre de 27 paroisses à établir de nécessité urgente, quoique les habitants n’eussent jamais fait pétition à cette fin. Voici le document concernant cette érection :
       « Liège, le 15 janvier 1840.
       « L’Évêque de Liège,
       « Vu l’arrêté royal, en date du 25 septembre 1839, par lequel Sa Majesté a daigné attacher à la desserte de l’église de Bois-de-Breux, commune de Grivegnée, le traitement dont jouissent les desservants des succursales à charge de l’État ;
       « Considérant qu’il est moralement impossible de faire administrer convenablement par un seul desservant, les églises de Grivegnée et de Bois-de-Breux, tant à cause de la distance qui les sépare et de la difficulté des chemins qu’en égard à l’accroissement de la population ;
       « Prenant, en outre, en considération, que quelques maisons isolées faisant actuellement partie de la paroisse de Saint-Remacle, ainsi que le hameau de Fayenbois qui appartient à la paroisse de Jupille, seraient plus convenablement placés sous l’administration spirituelle de Bois-de-Breux ;
       « Nous avons résolu d’ériger une nouvelle succursale dans l’église du Bois-de-Breux et après avoir entendu Messieurs les Desservants de Grivegnée, de Saint-Remacle et de Jupille sur la circonscription de la nouvelle succursale, nous avons de leur consentement assigné les limites suivantes :
       « Partant de l’angle supérieur du mur d’enceinte du cimetière de Robermont, près de la grand-route de Herve, longeant ce mur jusqu’à son extrémité supérieure vers Jupille, tirant de là une ligne directe qui laissant à droite la maison de M. Lambinon Bernard fils aboutit un peu plus loin aux limites séparant la commune de Grivegnée de celle de Jupille, suivant ensuite ces limites jusqu’à l’endroit où se trouve placé un Christ et au point d’intersection du grand chemin qui conduit de Bois-de-Breux à l’église de Jupille, près de la houillère de Houlleux, tirant de ce point une ligne sur les limites de la paroisse de Heusay, à gauche du château de Fayenbois, tournant à droite et longeant les dites limites jusqu’à la chaussée et suivant ensuite en descendant les chemins vicinaux de Gaillardmont, à droite Malvaux et Frecheux pour rejoindre le point de départ ; tout ce qui se trouve à droite de la démarcation, formera avec ce qui est enclavé l’arrondissement de la paroisse de Bois-de-Breux.
       « Le présent décret publié le dimanche après sa réception, dans l’église de Bois-de-Breux, des copies en seront adressées à Messieurs les Desservants de Grivegnée, Jupille et Saint-Remacle et il sera inscrit mot pour mot dans les registres pastoraux des quatre paroisses, pour en conserver la mémoire.
       « Donné à Liège, sous notre seing, notre sceau et le contreseing de notre secrétaire, le 13 janvier 1840.
       « Signé : Corneille, évêque de Liège.
       « Contresigné : Beckers, secrétaire.
       « Pour copie conforme pour l’église de Bois-de-Breux : J. Jacquemotte, vicaire général.
Érection canonique
       Traduction libre du document rédigé en latin :
       « Corneille,
       « Par la miséricorde de Dieu et la grâce du Saint-Siège, évêque de Liège,
       « Étant donné le consentement du très favorable Roi des Belges, nous pensons devoir établir et fonder une nouvelle église auxiliaire dans le village de Bois-de-Breux, commune de Grivegnée ; nous l’établissons et nous la fondons avec tous les droits, les privilèges, les avantages et tout ce qui est propre aux autres églises auxiliaires du diocèse de Liège ; et nous déclarons cette église de Bois-da-Breux tout à fait libre, affranchie et indépendante de l’église auxiliaire de Grivegnée et de son curé.
       « Permettant que le curé puisse exercer en temps utile sa juridiction spirituelle sur les fidèles de cette paroisse auxiliaire nouvelle comme c’est écrit avec plus de détails dans les lettres patentes, nous recommandons que ce décret de l’érection soit transcrit dans les registres paroissiaux pour livrer mémoire.
       « Donné à Liège, le 14 janvier 1840
       « Corneille, évêque de Liège.
       Le même mois de janvier 1840, M. l’abbé Arts, né à Ravenstein (Hollande), le 08 juillet 1808, ci-devant chapelain à Robermont et vicaire à Saint-Remacle-au-Pont est nommé curé à Bois-de-Breux. Il est installé le 02 février 1840.
Premier Conseil de Fabrique
       Par décrets du 12 mars et du 20 avril 1840, M. le Gouverneur nomme MM. G. F. Girouard et Nicolas-Joseph Lambinon, membres du premier conseil de Fabrique.
       Par décret du 12 mai 1840, Monseigneur l’Évêque nomme M. le baron Amédée de la Rousselière, MM. Corbusier, Jean Lambert et Godville Herman, conseillers de Fabrique.
       Le 21 juillet suivant, le nouveau conseil de Fabrique tint sa première réunion et M. le bourgmestre Vignoul, membre de droit y assiste.














X
L’église
       En 1842, nous trouvons le Conseil de Fabrique fort désireux de se débarrasser de l’antique chapelle, au reste trop petite et trop vétuste pour l’ampleur des assemblées religieuses et de la remplacer par une église.
       On conçoit un hameau avec une chapelle, mais on ne comprend plus une paroisse érigée canoniquement et par arrêté royal sans un temple de dimensions respectables.
       L’administration communale, se faisant tirer l’oreille, boudant à l’idée de décaisser un subside, le sacristain J. H. Lambinon, son beau-frère le révérend curé Arts et un ami M. Creutz Léopold, eurent recours à un stratagème. Par une nuit, où le vent s’attaquait avec une rare violence contre les murs de la chapelle, ils vinrent en aide aux éléments décharnés. Un pan de muraille s’écroula. Manifestement, il n’était plus possible de maintenir un édifice aussi branlant !
       Le curé, son beau-frère et M. le baron de la Rousselière se mirent en voyage, se rendirent dans la capitale et allèrent conter au Ministère l’infortune de leur paroisse. En ce temps des diligences, le voyage dura une semaine. Nos ambassadeurs rapportèrent la promesse de l’autorisation de construire une église. En bons paysans madrés, ils avaient eu soin de mettre un puissant atout dans leur jeu, en confiant la facture des plans du futur temple à M. Dumont, architecte du Gouvernement.
       Nous sommes en 1844.
       Le 23 juin 1845, après bien des difficultés surmontées, l’adjudication des travaux de construction peut enfin s’effectuer à Grivegnée, en présence du collège échevinal et de M. Dumont, architecte à Bruxelles.
       Les travaux sont adjugés à M. Dormal, entrepreneur, pour la somme de 23.000 F, l’administration communale fournissant les pierres, les breux, de la chaux, etc.
       On n’exécuta pas tout le plan dressé par l’architecte, on se contenta de la nef principale (de 3 fenêtres de chaque coté) à laquelle on adjoignit un chœur provisoire de dimensions restreintes.
       Le 09 juillet 1845, on démolit la chapelle et les offices eurent lieu dans la sacristie jusqu’au 02 février 1846. Le 21 juillet 1845, M. le doyen Groteclaes, de Saint-Nicolas, Liège, bénit solennellement la première pierre de la nouvelle église. Celle-ci se trouve placée à l’angle du chœur primitif, du côté de l’épître, (à droite), à l’entrée du chœur actuel. Cet emplacement est encore marqué, en ce moment, dans le dallage de l’église, par une ligne de dalles de plus grande longueur. Contrairement à la coutume générale, on n’aurait déposé ni parchemin, ni médaille, ni pièce de monnaie dans cette pierre angulaire.
       Les travaux de construction marchèrent rapidement, car le 25 novembre 1845, les ardoises étaient déjà placées sur toute l’église ; le 02 décembre, le bois de la flèche de la tour était terminé et le lendemain même la croix dominait le clocher.
       Ce n’est cependant qu’en été 1849 que les ressources permirent le plâtrage des murs et plafonds. Ce travail fut adjugé à M. Pirotte de Liège, qui, disent les architectes, exécuta fidèlement son travail.
       Pour réparer l’oubli du 21.07.1845, le 25 février 1865, M. l’abbé Dardenne, 3ème curé, a déposé sous un pavé du chœur, à 3 pieds sous terre, le document suivant enfermé dans une bouteille, elle-même déposée dans une caisse de plomb, ainsi que deux médailles : une à l’effigie de Pie lX, une de Saint-Benoît et un chapelet. Le document étant rédigé en latin, pour en faciliter la compréhension à nos lecteurs, nous en donnons une traduction libre.
       « Au nom du Seigneur, ainsi soit-il.
       « Nicolas-Auguste Dardenne, troisième curé de l’église paroissiale de l’Immaculée Conception à Bois-de-Breux.
       « Pour perpétuer la mémoire de la cérémonie, nous écrivons dans le registre des archives : "Je n’ai pas trouvé le document dans les fondements de cette église. En vertu des facultés accordées par l’Ordinaire, le 21 juillet 1845, le soussigné doyen de Saint-Nicolas, Liège, a béni et a placé la première pierre de l’église à élever à Dieu en l’honneur de la Bienheureuse Vierge Marie sous le titre de l’Immaculée Conception, en présence du baron de la Rousselière, du bourgmestre de l’endroit et de la foule des fidèles invités à cette cérémonie, avec l’aide du baron Arthur de la Rousselière, sous le pastorat du révérend curé Arts. »
       Mathieu Groteclaes.
       Après avoir reproduit ce texte, ajoute M. l’abbé Dardenne, sur le parchemin qui se trouve dans la bouteille, nous avons ajouté (cet ajout est aussi écrit en latin) :
       « Le 25 août 1865, sous le pavement du chœur, près de la première pierre, sous l’angle de celle-ci, le troisième curé de cette église a déposé cette feuille avec un chapelet, une médaille de Sa Sainteté le Pape Pie IX glorieusement régnant et une médaille de Saint-Benoît. Dardenne.
       « Bienheureuse Vierge Marie,
       « Conçue sans péché,
       « Notre Sainte Mère daignez
       « Nous protéger, nous et nos descendants
       « Et recommander au Christ
       « Tes enfants.
       « Aie confiance en nous afin que notre esprit
       « Te serve et que notre bouche parle sincèrement
       « Afin que nous aimions vraiment Dieu
       « Et afin que, si près de nous
       « Tu ne nous abandonnes pas dans la lutte.
       « Aide-nous avec bienveillance,
       « Et fais-nous voir dans le ciel
       « Jésus, Toi et les Anges
       « Ainsi soit-il."
       Par l’autorité de N. S. J. C., des bienheureux Apôtres Pierre et Paul et de nous-mêmes, nous déclarons, nous prononçons et nous définissons la doctrine qui concerne la bienheureuse Vierge Marie ; elle a été remarquable dès le premier instant de sa conception. Par la grâce et le privilège du Dieu Tout-Puissant et en considération des mérites de Jésus-Christ, le Sauveur du genre humain, Elle a été préservée et exempte de toute tache du péché originel ; ce qui a été révélé par Dieu et doit, par conséquent, être cru fermement et constamment par tous les fidèles.
       Donné à Rome, le 08 décembre 1854.
       Pie IX, pape.
       Sur le pavé qui recouvre la boîte contenant les documents susdits, écrit le révérend M.Dardenne, (à 3 pieds sous terre) nous avons fait graver, le 25 février 1865, l’inscription suivante :
       “Dei genetics Inmate
       “Anno Dno1845, die 21 juli
       “Infra hunc angulum
       “Benedixit et imposuit prim. lapid hui ecclesiae
       “Rever Dno Math. Groteclaes, christ. dec.
       “Et paroch. ad S. Nic. Léod.
       “Locus iste sanctus est.
       Comme on le voit par les documents ci-dessus, M. Arts, curé, d’accord avec les marguillers de son église, a, en choisissant pour titre patronal de la nouvelle paroisse, l’Immaculée Conception de la Sainte Vierge, devancé la proclamation de foi de Sa Sainteté Pie IX. C’est qu’en effet, en ce temps, la piété des fidèles suppliait ardemment le Souverain Pontife de définir solennellement cet article de foi si cher à tous les cœurs et si impatiemment attendu.
       Pour commémorer cette proclamation, M. le curé Arts composa et fit graver en lettres dorées sur l’encadrement de pierre entourant la niche située au-dessus du porche d’entrée de l’église le chronogramme suivant :
VirgInIs Del genItrICIs ConCeptIonI eXstrVXIMVs. 
(Nous avons construit à la Conception de la Vierge, mère de Dieu, 1845.)
       Le terrain communal sur lequel devait s’édifier l’église, n’étant pas suffisant, le mois de juillet 1845, les époux Xhauflair-Varlet donnèrent au C onseil de Fabrique une nouvelle parcelle de terrain (vers le midi).
       L’acte original stipule :
       « Les soussignés, Jean-François-Joseph Xhauflair et Catherine Varlet, son épouse, de lui autorisée, propriétaire, domiciliée à Retinne, déclarent par les présentes consentir que l’église dont la bâtisse projetée est à la veille de s’effectuer au Bois-de-Breux, commune de Grivegnée, s’avance sur leur propriété de 384 pieds carrés faisant une verge petite et demie, dont ils font cession gratuite à la Fabrique de ladite église pour laquelle le révérend M. Arts, ici présent et soussigné a accepté. »
       L’église fut bénie le 02 février 1846 et consacrée solennellement le 11 septembre 1850 par Sa Grandeur Monseigneur Van Bommel, évêque de Liège.
       En 1938, le Conseil communal se vit obligé par la Députation permanente du Conseil provincial à faire réfectionner complètement le plâtras du plafond de l’église. En suite de quoi, le Conseil de Fabrique fit renouveler les peintures du temple (murs et plafond) dont le coût fut de 15.000 F. La précédente peinture du temple avait eu lieu en 1907 aux frais exclusifs de M. le baron Gaston de la Rousselière.
       En septembre 1906, le Conseil communal avait fait construire aux frais de la caisse communale, une seconde sacristie, à droite du chœur (côté du lecteur).
       Le 11 janvier 1945, un V1 (bombe volante) tombe sur l’école Saint-Joseph, explose et endommage l’église. Les offices ont lieu, dans un premier temps, au Cercle Saint-Joseph (actuellement détruit) et dans un deuxième temps, dans la salle de l’école du Sacré-Cœur. On rentre à l’église le 24 mai 1951.
       La guerre de 1940-1945 retarda l’organisation de manifestations religieuses pour célébrer le centenaire de l’érection de Bois-de-Breux en cure indépendante. Elles n’eurent lieu qu’en 1952. Un cinéaste amateur réalisa un film qui fut projeté à plusieurs reprises. Une procession exceptionnelle parcourut à peu près toutes les rues de la localité, transportant notamment des Vierges de paroisses voisines : celles de Heusay, des Thiers-Chênée, de Beyne, de Grivegnée, de Robermont, des Oblats. Les groupes paroissiaux bien représentés, les délégations des confréries de la Vierge, la présence des doyens de Saint-Nicolas et de Saint-Barthélemy, la participation de Monseigneur Kerkhof accompagné de quelques chanoines, la population jalonnant le parcours, donnèrent à cette après-midi dominicale, un caractère festif et religieux bien en rapport avec un centenaire.
Mur d’enceinte de l’église
       M. le curé Tomsin, deuxième pasteur, fit construire à ses frais personnels, partie en 1853, partie en 1860, le mur de clôture à rue qui enfermait aussi le presbytère. Il a été détruit une centaine d’années plus tard pour dégager les deux constructions et permettre un accès plus aisé par l’entrée latérale, aux fidèles et au personnel des pompes funèbres.
Le presbytère
       Le presbytère date de 1856-1857. La première pierre en fut posée le 02 juillet 1856 et l’immeuble fut terminé le 30 mars 1857. Le coût des travaux s’éleva à 5.480 F. M. le baron Gaston de la Rousselière intervint pour 1.500 F, l’Administration communale pour 2.000 F, la Province et l’État chacun pour 900 F, les paroissiens pour le restant. La peinture sur bois a été déposée au musée diocésain, le 14.10.80.
Le jardin du presbytère,
       Par devant Maître Maurice Renard, notaire à Beyne-Heusay, le 07juin 1904, M. le baron Gaston de la Rousselière fait don à la Fabrique de l’église de deux parcelles de terrain devant, selon la volonté du donateur, servir à titre de jardin du desservant de la cure. La 1ère parcelle : 88 mètres carrés, cadastrée partie du n° 139 E, section C. 2ème parcelle : 427 mètres carrés, cadastrée n° 139 C, section C.
Vicariat
       Ainsi que nous le verrons au chapitre des écoles, le bâtiment destiné primitivement à abriter l’école libre des garçons, ayant été désaffectée, M. le baron Gaston de la Rousselière, propriétaire, l’avait transformé en maison d’habitation pour l’instituteur en chef, M. Brokart Emmanuel.
       Par devant Maître Van den Berg, notaire à Liège, le 26 avril 1907, M. le baron Gaston de la Rousselière fait donation à la Fabrique de l’église de la nue propriété de cette maison et de ses dépendances, sise à Bois-de-Breux, commune de Grivegnée, cadastrée section C, n° 137 B et partie section C n° 137 A, occupée par M. Em. Brokart, instituteur, usufruitier à titre de reconnaissance pour services rendus à l’école libre.
       La Fabrique n’entrera en jouissance qu’après le décès de l’usufruitier. Le donateur exprime le désir que la Fabrique d’église lorsqu’elle sera en jouissance de la maison, la donne de préférence en location au vicaire de la paroisse, moyennant un loyer en rapport avec la valeur réelle de la maison, de façon à assurer aux environs de l’église l’ordre et la tranquillité nécessaires et de faciliter au vicaire l’exercice de son ministère. M. Em. Brokart, ayant le 01 avril 1922, renoncé à son droit d’occupation, l’immeuble fut, depuis cette date jusqu’en 1969, occupé par le vicaire.
Donation de M. Walthère Cleen
       Par testament authentique reçu par Maître Wathelet, notaire à Liège, le 03 novembre 1905, M. Walthère Cleen, décédé le 30 mai 1907, lègue à la Fabrique : 1° une maison avec dépendances, sise à Bois-de-Breux, commune de Grivegnée, section B, n° 352 B d’une contenance de 95 mètres carrés ; 2° une parcelle de terrain, sise au même endroit, cadastrée section B, n° 359 D d’une contenance de 240 mètres carrés.
Quelques détails sur l’intérieur de l’église
       Le maître-autel, attaché primitivement à la muraille du fond du chœur provisoire, est en marbre et constitue un don de M le baron de Favereau-Waroux, propriétaire du « Chabot » (aujourd’hui, annexe de la clinique des Bruyères). M. le baron avait eu l’intention de s’établir dans cette propriété et faisait construire le corps principal de son château, lorsqu’une chute mortelle vint empêcher la réalisation de ce projet. Néanmoins, son fils, baron de Favereau de Jenneret exécuta la promesse de son père à l’endroit de notre église. Les armoiries de la famille de Favereau se trouvaient peintes sur la « tombe » de l’autel ; elles ont disparu à la suite du renouvellement de la peinture. Le maître-autel contient les reliques des martyrs : Valentin et Laurent.
       Au maître-autel primitif étaient appendus deux médaillons sculptés, attribués à Jean Delcour de Hamoir-sur-Ourthe, auteur de la Vierge en Vinâve d’île à Liège et constituaient un don du couvent Saint-Joseph en Beauregard à Liège (1862). M. Julien de Macar avait donné les deux anges adorateurs du maître-autel, le 16.09.1864.
       Aux murs du chœur, outre les statues de la Vierge et de Saint Joseph, étaient exposées celles de Saint Paul et de Sainte Élisabeth, patrons de la famille de Favereau-Waroux, et celles de Saint Roch et de l’ange gardien.
       L’horloge de la tour provient de l’ancienne église du Monastère de Robermont et est un don de Jean-Henri Lambinon.
       En 1853, M. le baron de la Rousselière fit don des autels latéraux en style composite et dédié primitivement à la Sainte Vierge et à Saint Joseph.
       La cloche de 1845, ayant été revendue au fondeur Goular de Liège qui en trouva emploi au couvent de Sainte Agathe à Liège, les époux Guillaume-Minet firent don de deux nouvelles en 1853. La bénédiction en eut lieu le dimanche 07 août, sous la présidence de M. le doyen Groteclaes. De mémoire d’hommes, disent les archives paroissiales, on ne vit pareille affluence à Bois-de-Breux. Des loustics n’avaient-ils pas faits circuler dans les communes environnantes et à la ville le bruit que le jour de la bénédiction des cloches, le parrain, âgé de plus de 80 ans, épouserait la marraine, âgée seulement de 18 ans !
       Les cloches portent les inscriptions suivantes :
       « La grosse, “Melchior Guillaume, parrain et Marguerite Minet, son épouse, marraine, m’ont fait couler en l’honneur de N. D. de l’Immaculée Conception. M. J. Groteclaes, curé-doyen m’a bénite sous M. A. C. Arts, curé de Bois-de-Breux. Groular, père, fondeur, 1853.
       « La petite, “Melchior Guillaume, président du bureau des marguillers, parrain et Marguerite Minet, marraine, m’ont fait couler en l’honneur de Saint Joseph. Groteclaes, curé-doyen, consacrant sous A. C. Arts, curé de Bois-de-Breux. Groular, père, fondeur à Liège, 1853”. »
       Le 02 octobre 1853, M. Jean-Henri Lambinon, ses frères Bernard et Laurent et leur sœur firent don des orgues qu’ils avaient rachetées à M. Decharneux, organiste à Saint-Servais, Liège, lequel les avait en dépôt du couvent de Sainte Agathe de Liège. Le buffet de cet instrument existe encore, les tuyaux, clavier, jeux ont été renouvelés en 1901, par le facteur Kerkhofs de Bruxelles. Ce dernier travail a été payé par Mlle Nadine de la Rousselière à l’occasion de son mariage avec M. le comte de Rohan-Chabot.
       Les confessionnaux des transepts et la chaire de vérité sont des œuvres du sculpteur Detombay de Liège et ont été offerts à l’église par Mlle Henriette d’Ancion de Ville (habitant de son vivant au château de Gaillardmont) en 1852, 1856 et 1859.
       Les cinq tableaux, peints sur toile, dus au pinceau de M. Grand-maison, ornant primitivement le chœur et les murs latéraux des transepts, constituent un don de la famille de la Rousselière et de M. le Gouverneur de la Province.
       La peinture sur bois, incrustée dans le mur latéral du baptistère, représente Saint Jean-Baptiste dans le désert. C’est un don de M. l’abbé Arts, curé de Beyne, frère du premier curé .de notre paroisse. M. Chauvin, directeur de l’Académie de Liège, à l’époque du don, déclara cette œuvre de grande valeur, notent les archives paroissiales. On ignore le nom de l’artiste qui l’exécuta. Ce tableau fut prêté à l’église Saint-Vincent, lors de l’Exposition internationale de Liège, en 1930 et fut fort remarqué des visiteurs et des connaisseurs. Il fut aussi exposé à l’église Saint-Remacle, Liège, pour les festivités organisées à l’occasion du 900ème anniversaire, en 1979. Depuis le 14.10.80, il est déposé au musée diocésain qui en assure la surveillance et la garde.
       Le 23 septembre 1888 eut lieu la bénédiction d’un chemin de croix, peint sur toile, par le peintre Lecrenier de Liège, il est dû à la générosité de M. le baron Gaston de la Rousselière. Il a été remplacé peu avant 1980 par un nouveau, plus dépouillé, réalisé dans l’atelier créatif de Bois-de-Breux, sous le pastorat de M. l’abbé M. Minon et originalité : il comporte une l5e station.
       Ce ne fut qu’en 1857 que l’église reçut une première couche de badigeon et un lambris marbré ; elle fut peinte à l’huile on 1907, aux frais exclusifs de M le baron Gaston de la Rousselière et le fut à nouveau après les travaux du second agrandissement aux frais du Conseil de Fabrique cette fois.
       Le monument, en l’honneur de Notre-Dame des Douleurs, a été placé le 28 mars 1869, à la clôture d’une mission prêchée par les RR.PP. Vanbreuse et Saint-Omer, rédemptoristes. Le groupe du monument est dû au ciseau de M. Alex de Tombay et la peinture du fond au pinceau de M. Désiré Everaets, paroissien et directeur de l’Académie de dessin de Tirlemont (Cette peinture a disparu en 1951 lorsque l’on renouvela d’une teinte uniforme l’église.)
       En 1907, M. le baron Gaston de la Rousselière fit placer des vitraux à toutes les fenêtres du temple. Détruits par fait de guerre en 1945, ils durent tous être remplacés.
       Le lambris de chêne, courant tout autour de l’église, est un don de M. l’abbé Fryns, curé. Il fut exécuté par M. Joseph Magermans, ébéniste à Bois-de-Breux et placé vers 1920.
       En 1864, les paroissiens se cotisèrent pour ériger la barrière en fer du baptistère. Celle de l’entrée du jubé ne fut placée qu’en mai 1869, grâce à un subside accordé par la commune. Toutes deux ont été façonnées par M. Delsemme, serrurier à Heusay.
       À l’entrée du jubé, une croix de mission porte les indications 1850, 1866, 1869, années où eurent lieu des missions paroissiales prêchées par des religieux étrangers à la paroisse. Elles duraient une semaine et étaient très attendues.
       Le sceau paroissial date de 1865 et a été gravé par M. L. Crampon, graveur, rue Trappé à Liège.
       À l’occasion de la consécration de la paroisse aux Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie, le 25 septembre 1870, M. et Mme Wauters-Nagant firent don à l’église de tableaux dus au pinceau de M. Thonon. Ils ont disparu depuis la chute du V1 de 1945.
       Si la situation de l’église, sur la crête de la colline, la rend visible de loin, son exposition, à découvert aux vents du Nord-Ouest, rend le bâtiment humide et froid, partant onéreux à chauffer. Le clocher, dominant les alentours, est une cible de choix par temps d’orage. Il a fallu plus d’une foi faire réparer la couverture du clocher, notamment en 1980 et 1981, à 12 mois d’intervalle, ce qui a décidé la ville de Liège, propriétaire, à faire installer un paratonnerre.




















XI
L’épidémie de choléra en & 1866

       L’épidémie de choléra de 1866 fit de nombreux victimes en notre paroisse. Aux registres ad hoc, nous relevons 49 décès pour la période du 19 juillet au 01 septembre et 84 pour l’ensemble de l’année alors que la moyenne de la mortalité était de 28. En cette occasion, dans la seconde quinzaine d’août, les écuries de Fayenbois furent transformées en hôpital desservi par les sœurs de l’Espérance. Celles-ci quittèrent la paroisse le 22 septembre seulement. Les habitants du “Trosoris” élevèrent la croix existant encore au coin des rues de l’Espoir et des Orchidées afin d’attirer les bénédictions du divin Crucifié et être préservés du terrible fléau.
   







XII
                                 Les cimetières
       Jusqu’au 22 juillet 1842, les inhumations continuèrent à se faire dans le cimetière de Grivegnée. Cependant, les raisons que l’on avait fait valoir pour l’érection d’une paroisse indépendante, existaient pour la création d’un cimetière à Bois-de-Breux. La Providence inspira une généreuse bienfaitrice laquelle donna le terrain nécessaire. Voici la transcription de l’acte advenu devant Maître Lambinon, notaire à Liège.
       « Nous, Léopold premier, Roi des Belges,
       « A tous présents et à venir, faisons savoir :
       « Par devant Maître Lambinon, notaire à Liège, soussigné et en présence des témoins ci-après nommés, ont comparu : M. Jean-François-Joseph Xhauflair et Mme Catherine Varlet, son épouse, de lui autorisée, propriétaires domiciliés à Retinne. Lesquels ont, par les présentes, donné et cédé à perpétuité à la Fabrique de l’église succursale de Bois-de-Breux, pour laquel1e M. Jean-Henri Lambinon, propriétaire, domicilié à Gaillardmont, commune de Grivegnée, trésorier de ladite Fabrique, ici présent et acceptant ensuite de l’autorisation accordée par la Députation permanente du Conseil provincial de Liège, en date du 24 septembre dernier, dont une expédition est demeurée ci-annexée, pour servir à son cimetière :
       « Un terrain vague et inculte contenant quatre ares cinquante-huit centiares vis-à-vis de la même église de Bois-de-Breux, commune de Grivegnée, joignant au jardin des donateurs, aux époux Girouard à la chaussée et à un terrain ci-devant communal, dont lesdits sieurs et dame Xhauflair sont propriétaires à titre de la vente par licitation faite aux enchères publiques par acte passé devant Maître Legrand, notaire à Soumagne (cf. les archives paroissiales) le 25.09.1842. »
       La Députation permanente, par arrêté du 24.09.1841, avait autorisé la Fabrique d’église à accepter la clause-donation insérée dans l’acte ci-devant à charge de remplir les conditions imposées par les époux Xhauflair (messe basse annuelle pendant un certain nombreux d’années).
       Le cimetière a été béni solennellement le 06 novembre 1842, un dimanche, à l’issue des Vêpres, par le doyen Groteclaes. Quelques décès, ayant eu lieu avant cette date, on avait béni les fosses en particulier. Le premier inhumé a été M. Guillaume-Legrand, décédé le 22.07.1842.
       L’autre moitié, égale en superficie, appartient à la commune. La propriété est donc mitoyenne entre la Fabrique de l’église et la commune de Grivegnée. Le lot de la Fabrique est la moitié vers l’ouest.
       En suite de cette situation, en séance du 01 mars 1863, le Conseil communal proposa au Conseil de Fabrique un accord que celui-ci accepta par décision ci-après :
Le bureau des Marguillers :
       Présents : Dardenne, Lambinon, Cajot et Charlier.
       « Vu la délibération du Conseil communal de Grivegnée, en date du 01mars 1863 qui répartit comme suit le prix du mètre de terrain à concéder dans le cimetière de Bois-de-Breux, appartenant par moitié à la Fabrique de cette église selon la concession faite par les époux Xhauflair-Varlet par devant Maître Lambinon, notaire à Liège, le 25 juillet 1843 et appartenant pour l’autre moitié (en entrant dans le cimetière) à la commune, répartition faite comme suit : 2/5 à la Fabrique de l’église, 2/5 à là commune et 1/5 au bureau de bienfaisance.
       « Considérant l’avantage qui en résulte pour la Fabrique, le bureau déclare accepter la répartition établie par le Conseil communal dans sa délibération précitée. Expédition de la présente sera transmise à l’Administration communale pour information. »
       Cette délibération, bien qu’approuvée par la Députation permanente le 05.08.1863, ne fut jamais respectée par la commune. Le registre aux délibérations du Conseil de Fabrique contient de fréquentes allusions à ce manquement, suivies chaque fois de l’envoi d’un rappel écrit à la récalcitrante.
Partie profane du cimetière
       Le 03.12.1868, Monseigneur Neven, vicaire général, de vive voix, accorda l’autorisation de rendre profane une partie du cimetière adjacente à la partie déjà profane du côté gauche de l’entrée du cimetière, la partie non bénite du côté droit, ayant été prise pour le caveau de la famille de la Rousselière. La partie destinée aux inhumations de ceux auxquels l’Église refusait la sépulture chrétienne, se trouvait alors exclusivement du côté gauche de l’entrée. Le caveau de la famille de la Rousselière se trouvant ainsi en terre profane, fut bénit le 01.11.1868, par M. le curé Franck, ainsi qu’il ressort du texte suivant, trouvé dans les archives paroissiales :
       « Anno Domini millesimo octingentissimo sixaaegesimo octavo, mensis novembris, die rivgesima prima, ego, Gasparus-Josephus Franck, infrascriptus parochive de Bois-de-Breux, rector, testor, me specialiter ab IIImo Episcopo nostro delegatum, bone dixis se sepulchrus nobili farniliae Baronum de la Rousselière abhilitis ritibus et ceremoniis un Tituali Romano prescriptis, adstrantibus qua testibus. C. J. FrancK J.    A. J. Derouaux, parocho in Heusay et F. J. Herman, parocho in Beyne.
       « Bromisit autem nobilis Amedeus Baronibus de la Rousselière et nomine Familiae suse lege sponpondit, leges canonicas de eccleaeastica sepulture in hoc loco fideliter semper fore servantes »
       Ont signé : J. Franck, curé. A. G. Derouaux. P. J. Hermah. Amédée de la Rousselière. Baronne Amédée de la Rousselière. F. de la Rousselière, Gaston de la Rousselière. Arthur de la Rousselière.
Nouveaux cimetières
       En 1905, par suite de l’augmentation croissante de la population et de l’achat de plus en plus fréquent de parcelles de terrain pour construction de caveaux, il apparut que très prochainement l’ancien cimetière ne pourrait plus satisfaire aux nécessités. Le Conseil communal décida d’acquérir un terrain mis en vente et situé, suivant les exigences du règlement provincial d’hygiène, en dehors de l’agglomération, à l’angle de la rue Malaise et Large-Voie.
       Cependant, une soixantaine d’années plus tard, un 3ème cimetière a dû être ouvert rue du Bassin et dénommé « Cimetière de la Bure. » Le règlement communal stipulant la suppression des tombes lorsque la redevance annuelle n’est plus payée et offrant aussi la possibilité de crémation des défunts, les terrains réservés à la sépulture seront peut-être suffisants.




XIII
Pollution à Bois-de-Breux

       Voici, sous la signature de P. Guérin, d’après référence aux archives de l’État à Liège, et publié le 23.01.81 par la Gazette de Liège et en décembre 82 par le Cercle historique de Fléron, ce qui menaça de corrompre l’air pur des bois de Breux et de Bellaire en 1785 :
       « Pierre Joseph Chèvremont, marchand droguiste ou apothicaire construisit en 1781, au lieu-dit Trou-Souris une fabrique de sel ammoniac au pré du vivier qui longeait vers le sud le chemin conduisant de Belleflamme à Malvaux et au Trou-Souris. Il établit 15 fourneaux sur une longueur de 80 pieds et une largeur de 24 pieds. Dès la mise à feu, une fumée épaisse se dégagea mais l’odeur très forte qui se répandit, rappela celle de la cuisson de l’argile et des briques ; elle provenait donc de la construction nouvelle, et de fait, au fur et à mesure que l’ensemble du bâtiment sécha, odeur et fumée diminuèrent sensiblement.
       Deux clans se constituèrent ceux du brasseur Massillon et de ses ouvriers, les plaignants, ceux de Chèvremont, de voisins et de ses ouvriers qui ne furent jamais incommodés ni par les fumées, ni par les odeurs quoique œuvrant dans les souterrains, mangeant et buvant à l’usine avec appétit, dormant même la nuit au-dessus des fourneaux.
       Ce fait remet en mémoire les briqueteries et tuileries itinérantes qui s’installaient au gré des couches d’argile à pouvoir exploiter. On pouvait encore en rencontrer dans la première moitié du siècle, de part et d’autre de la rue Nicolas Spiroux, au carrefour avec la rue de Belleflamme, rue Bailly Deflandre, rue de la Tuilerie (el ‘Panetreye).
       Les fours, des cubes du volume d’une demi-saison, étaient constitués de briques crues, assemblées à claire-voie. Faites d’argile trempée et d’un peu de sable, pétri à pieds nus, elles étaient moulées dans un cadre de bois, disposées en couches séparées par des fagots ou, des “moussades” ou de la paille, avec cheminée centrale, d’abord pour les sécher puis pour les cuire. Pendant de nombreux jours, une fumée épaisse, à l’odeur caractéristique assez âcre et désagréable, se dégageait. On n’imaginait pas en cette période de vie simple et rude qu’on pût brandir le terme pollution sans passer pour un concitoyen à la fierté mal placée.





XIV
Le complexe paroissial
       L’église, la place de l’église et le presbytère sont devenus propriété de la ville de Liège depuis la fusion de Grivegnée avec le Nouveau Liège. L’école Saint-Joseph, les garages annexés, l’ancien local du patronage des garçons, le couvent qui abritait la Communauté des Frères des Écoles Chrétiennes, l’école du Sacré-Cœur, la salle des fêtes, le Pavillon, “li Cinse dè Bosquèt”, les locaux des différents groupes paroissiaux, la chapelle, le couvent d’Auxilium, les terrains avoisinant ces immeubles sont propriété paroissiale et gérés par un Comité de Gestion.
       La maison vicariale (place de l’église) et la maison, sise rue de Herve, 274 (dont la Poste occupe le rez-de-chaussée) sont des biens de l’Église et ils sont gérés par le Conseil de Fabrique.
       Quelques paroissiens pourraient encore rappeler que le local “Li Cinse dè Bosquèt” fut appelé pendant bien des années “Bébra ”. Â la fin de la guerre 40-45, une trentaine d’enfants de diverses nationalités étaient réunis chaque jour dans ce local pour différentes activités.
       C’était pendant les vacances d’été. Ils étaient hébergés chez l’habitant, pour 3 semaines. Ils provenaient d’un camp de personnes déplacées établi en Autriche. Ils avaient été triés et autorisés à un séjour hors frontière parce que non porteurs de germes de maladies contagieuses. Ce local, à la guerre 14-18, servit de cantine pour la distribution d’un bol de soupe que préparaient pour les indigents les Filles de la Croix. Il servait encore à certaines heures de dispensaire pour les petits soins et les urgences car, jusqu’en 1920, la localité ne comptait ni médecin, ni pharmacien, ni infirmière. On s’en remettait à la bonne Sœur des malades, en premier lieu et en toute confiance.
       Le dimanche 08.01.78, un violent incendie s’est déclaré vers 13 h 55 dans les locaux où se réunissent habituellement les filles du Patro. Ce bâtiment comprend un atelier créatif, la bibliothèque et le bar des jeunes. Le feu a été alimenté par le gaz d’une bonbonne qui n’a pas explosé. Les pompiers ont mis trois heures pour éteindre le feu qui a ravagé tout le premier étage du bâtiment. Pendant ce temps, des paroissiens, sur les conseils de M. le Curé Minon, ont évacué les livres de la bibliothèque vers l’église. Les dégâts furent évalués à plus d’un million de F. Les causes de l’incendie restent inconnues. Il fallut plus d’un an pour reconstruire. Les indemnités, ne suffisant pas, de nombreux paroissiens s’engagèrent à apporter leur aide financière régulière au Comité de Gestion naissant.



XV
L’enseignement
       Jusqu’en 1859, Bois~de-Breux était dépourvu d’école publique. Différents abbés, ainsi que nous l’avons lu précédemment, avaient ouvert une école dans leur vicariat. Mais ce n’était là qu’écoles de fortune. En 1852, M. Florent Dive de Sclayn, précédemment instituteur à Lize-Seraing, tint quelque temps classe dans différentes maisons du village, en qualité d’instituteur privé.
       Cette même année 1859, M. Jean Lambinon bâtit, de ses deniers personnels, un local d’école avec maison pour le maître, contigu à sa propriété. Ce local, transformé en habitation, a été détruit par bombe volante en 1945. Il était situé rue de Herve, 663 et 665. La moitié Est servit de logement à la famille Dive. L’administration communale alloua une indemnité de location à M. Lambinon.
       En 1864, le Conseil communal décida enfin la construction d’un nouveau local plus vaste sur un terrain lui vendu par M. Lambinon-Detombay, situé à quelque 400 mètres plus bas vers Liège. C’est l’emplacement actuel de l’école communale. Le 29 décembre 1861, M. Dive fut nommé instituteur communal pour la section de Bois-de-Breux, prêta serment le 29 janvier suivant et entra dans les nouveaux locaux le 01 mars 1866.
       Ces derniers furent bénits le 11 mars 1866, à l’issue des vêpres, par M le curé, en présence de l’instituteur, des enfants et de la population. C’est processionnellement, bannière en tête, que le cortège se rendit de l’église à l’école. M. le cure prononça l’allocution de circonstance. L’école communale des filles ne fut ouverte qu’au mois de mai 1867 et l’institutrice fut Mlle Philippe, devenue par son mariage Mme Grayet.
       Les directeurs de l’école communale furent successivement : MM. Dive Florent, Woyave Jean, Lambinon Eugène, Thiry Eugène, Burette Léopold, Hanquet René, Raskin Louis.
       Les institutrices en chef : Mesdames Grayet-Philippe, Demarteau Maria, Désiron Marie, Destinay-Loxhay, Kaiser.
       La coéducation, ayant été appliquée, filles et garçons sont sous direction unique, depuis quelques années.
École libre pour filles
       Vers 1872, M. le baron Gaston de la Rousselière, ayant acquis la propriété du “Bosquèt” près de l’église, fit transformer café et corps de ferme en couvent et salles de classes. Pour diriger l’école, il fit appel aux révérendes Sœurs de la Providence de Portieux (Vosges), lesquelles y restèrent et firent un bien immense jusqu’en 1897.
       La nouvelle loi scolaire belge de 1895, n’octroyant les subsides-traitements de l’État qu’au personnel de nationalité belge des écoles primaires, M. le baron dut, à regret, se séparer de celles qui, pendant 25 ans, avaient fonctionné à l’entière satisfaction de la population.
       Les révérendes Sœurs des Filles de la Croix prirent possession des locaux en septembre 1897. Elles les abandonnèrent en 1965, faute de vocations. Leur maison d’habitation fut reprise par des re1igieuses laïques et prit d’abord le nom de « villa de la Rousselière » puis d’ « Auxilium »
École libre pour garçons
       La loi sectaire de 1879 provoqua dans tout le pays par ses stipulations anti-chrétiennes, la riposte des catholiques. Partout surgirent des écoles libres, souvent ouvertes dans des locaux de fortune. M. le baron de la Rousselière en ouvrit une pour garçons. L’ayant installée dans le bâtiment converti plus tard en vicariat (l’immeuble unique place de l’Église), il reçut de la Députation permanente interdiction de l’y maintenir : “la proximité du cimetière, disait-on, pouvant propager des maladies infectieuses parmi la population scolaire”.
       Les bancs d’école furent transportés au château des Bruyères et le grand salon devint salle de classe en attendant l’achèvement de nouveaux locaux en construction en bordure de la rue de Herve. M Brokart Emmanuel, instituteur communal à Romsée, démissionnaire pour obéir aux ordres de son Évêque, prit la direction de la nouvelle école et la conserva jusqu’en août 1905, date de sa retraite. À cette date, l’école qui comptait trois classes fut confiée aux Frères des Écoles chrétiennes. Ceux-ci quittèrent l’établissement en août 1930 et l’école redevint une école adoptable laïque sous la direction de M. Straetmans Charles.
       Au 15 août 1940, l’institut du Sacré-Cœur pour filles comptait 2 classes gardiennes, 5 classes primaires, une classe d’enseignement supérieur de coupe ; l’institut Saint-Joseph pour garçons comportait 4 classes correspondant aux 4 degrés primaires. Directeurs successifs : MM van der Kaa Lambert, Jacob Émile.
       L’école communale de garçons comptait deux classes et celle des filles trois classes primaires et deux classes gardiennes. L’école Saint-Joseph pour garçons fut “robotée” le 11.01.45. Les locaux actuels furent inaugurés le.01.09.53. La coéducation (mixité) a été appliquée aux deux écoles paroissiales à partir de la rentrée de 1972.





XVI
Les œuvres paroissiales

Le Cercle Saint-Joseph
       Le 10 juillet 1898, un groupe d’hommes se réunit, à l’issue de la grand’messe, à l’école catholique. Étaient présents : M. le baron Gaston de la Rousselière, Duquenne Auguste, juge de paix du canton de Grivegnée, Woyave Hubert ; Duchesne Jean, Genot Guillaume, Schwaiger Denis, organiste, Ers Antoine, Moureau Hubert, Adam Jean, Degeer Jean, Bourguignon Alexis, Blaise Modeste ; Ghysen Nicolas, instituteur, Peclers et Pirson Désiré.
       Ces pionniers décident de former un cercle d’agrément pour hommes. Une commission provisoire est constituée comme suit :
       Président d’honneur : M. le baron de la Rousselière,
       Président effectif : M. Woyave Hubert,
       vice-présidents : MM. Duchesne et Peclers, secrétaires,
       Secrétaires : MM. Ers Antoine, Moureau Hubert et Ghysen Nicolas,
       Trésoriers : MM. Genot Guillaume et Schwaiger Denis,
       Commissaires : Adam, Pirson, Bourguignon et Blaise.
       Comme local, cette commission fit choix de la ferme “Habran” appartenant à ce moment à M. Brokart Emmanuel, directeur de l’école catholique, salle située “en amont” de l’école communale. Il fut abandonné en 1963 car il ne savait plus subvenir à ses besoins et fut vendu à l’administration communale. Il fut démoli en janvier 1968.
       M. Dethier Lambert, locataire principal, devint le premier limonadier. Le 21 août 1898, le Cercle Saint-Joseph est définitivement fondé et la commission provisoire devient effective. Les locaux sont solennellement inaugurés et ouverts aux membres le dimanche toute la journée, les lundis et jeudis soir. Une location est payée à M. Dethier.
       Dès ce jour, le Cercle compte 43 membres. Après quelques mois, l’ameublement comportait : deux billards, un jeu de quilles et plusieurs jeux de table, tels que cartes, dames, échecs, jacquet, etc. La chorale de l’église qui, jusqu’à ce jour, tenait ses répétitions en la maison de l’organiste, M. Sohwaiger, profitera du nouveau local d’œuvres.
       Au 01 décembre, le nombre des membres était de 110. On organise des concours de jeux de cartes et de quilles. Une section dramatique est fondée, elle est régie par M. Marganne Félix.
       Entretemps, la commission avait fait, le 17 novembre, achat à M. Piret d’une parcelle de terrain pour érection d’une scène de spectacle. La première séance dramatique eut lieu le 29 janvier 1899, le programme en était bien modeste ; mais il fut fort goûté par les membres et leurs familles nullement blasés de divertissements, en ce temps-là : “Six domestiques dans l’embarras”, “On demande un piston solo"”, “Gros bouname” et “li kpagneye”, trois comédies et deux intermèdes de chansonnettes gaies déridèrent les fronts pendant toute la soirée.
       Notons les noms des premiers acteurs : MM. Bourguignon Alexis et Joseph, Bidart François, Biesman Mathieu, Moureau Hubert, Fassotte Vincent, Pirson Désiré, Genot Jean, Rener Laurent, Dethier Lambert.
       Une première symphonie est créée aussi ; elle est dirigée par M. Marganne Félix. M. le baron Gaston de la Rousselière fait don du piano de sa fille Marie.
       Le 19 septembre 1900, la commission décide l’achat d’un drapeau ; mais le président d’honneur entend en être le généreux donateur. Ce nouveau cadeau fut reçu avec reconnaissance, béni le 11 mai 1902, au cours d’un sa1ut solennel, et conduit en cortège au local des œuvres. Le 07 janvier 1904, le cercle devient le locataire principal de l’immeuble. En 1907, par suite des dégâts miniers, la réparation des locaux s’avère indispensable. La grande salle des fêtes est démolie et complètement reconstruite suivant les plans dressés par M. l’architecte Demeuse de Grivegnée.
       Le 24 février 1907, par devant Maître Maurice Renard, notaire à Beyne-Heusay, se constitue, pour un terme de trente années, la société anonyme du Cercle de Bois-de-Breux. Celle-ci achète la propriété de M. Brokart, située à Bois-de-Breux, commune de Grivegnée, cadastrée section B, n° 329 g, d’une contenance de 9 ares 65 centiares.
       Inutile d’ajouter, pensons-nous, que les fonds nécessaires à cet achat furent une fois de plus fournis par M. le baron Gaston de la Rousselière.
       Le 29 juin 1927, M. le vicaire Duquenne Léon conçoit et propose au comité un projet grandiose que d’aucuns taxèrent de téméraire et de “beau rêve”. Il ne s’agissait de rien moins, qu’avec une encaisse de 72 F, de décider et de mener à bien l’agrandissement des locaux par construction à front de rue d’une spacieuse salle de café avec ameublement moderne, d’une salle de bibliothèque, d’un logement pour le tenancier et, dans la cour, d’une petite salle de réunion, d’un vestiaire pour la dramatique, d’une cuisine et de chambres à coucher pour le locataire.
       M. le Vicaire ne doute pas du succès, il est persuasif, il entraîne les membres à sa suite, il met en campagne tous les groupes y compris les enfants pour la récolte des fonds et l’inauguration des nouveaux locaux eut lieu au mois d’août 1928. Le comité avait emprunté auprès de ses membres leur garantissant un intérêt annuel et le remboursement du prêt en dix annuités, ce qui fut fait. Le 30ème anniversaire de la fondation du Cercle était donc ainsi grandissement marqué.
       Le terme de la société anonyme du Cercle de .Bois~de-Breux, étant venu à expiration le 24 février 1937, le comité envisagea de lui donner la forme des associations sans but lucratif organisé par la loi du 27 juin 1921.
       Ayant regroupé en leurs mains les actions de la société anonyme défunte, les liquidateurs les apportèrent en dot à la nouvelle association lors de sa constitution, le 05.01.1938, par devant Maître Auguste Watelet, notaire à Liège. Comparurent à cette constitution : MM. Bay Jules, agent de change, abbé Lonnoy, curé, abbé Malherbe, vicaire, Marganne Louis, instituteur, abbé Nagant, curé-doyen de Saint-Nicolas, Liège, Poumay Henri, employé et Straetmans Charles, directeur de l’école Saint-Joseph.
       L’acte constitutif a .été enregistré à Liège (actes-civi1s-sud) le 06 janvier 1938, folio 23, case 1, et publié au Moniteur Belge du 22 janvier 1938, sous le n° 76.
   Comités successifs du Cercle
       A
       Présidents d’honneur : M. le baron Gaston de la Rousselière ; après son décès, M. le comte de Rohan-Chabot ; ensuite M. Sepulchre François, enfin M. Sepulchre Gérard.
       B
       Président : M. Woyave Hubert, du 10.07.1898 au 06 avril 1905.
       Secrétaire : M. Ers Antoine, du 10.07.1898 au 06 avril 1905.
       Trésorier : M.Genot Guillaume du 10.07.1898 à 1902.
       C
       Président : M.Ers Antoine, du 06.04.1905 au 14.03.1926.
       Secrétaires : MM. l’abbé Dresse Albert, vicaire, puis l’abbé Philippet, puis M. Bourguignon du 17 novembre 1907 au 18 octobre 1908, ensuite M. Férard Joseph du 07.05.1909 au 14.03.26.
       Trésoriers : M. Cajot Hubert, de 1902 au 10.09.1909. M. Collinet Joseph du 10.09.1909 au 14.06.1923. M. Straetmans Charles du 14. 06.1923 à 1940. 
       D
       Président : M. Marganne Louis, du 12.04.26 au 27.06.31.
       Secrétaires : M. Ghysen Nicolas, du 24.03.26 au 28.12.28, M. Poumay Henri du 28.12.28 à 1940.
       E
       Président : M. Bay Jules, du 27.06.31 à 1940.
La conférence de Saint-Vincent de Paul
       Fondée le 01 juin 1866, elle n’a jamais cessé son activité, ni ralenti sa bienfaisante sollicitude pour les pauvres. Il ne nous est pas permis de lever le voile qui recouvre ses interventions morales et pécuniaires ; cependant qu’il nous soit autorisé de saluer bien bas cette œuvre qui a secouru la misère cachée de centaines de foyers, apporté le réconfort aux désespérés, légitimé nombre d’unions irrégulières, fourni quantité de layettes, envoyé au grand air nombre d’enfants débiles, etc. Présidents successifs : MM. le baron Gaston de la Rousselière, Duquenne Auguste, Brokart Emmanuel, Ers Désiré…
       Bien après la guerre 40-45, la Conférence s’est remise en question. Elle a étendu ses activités charitables à un prêtre de la paroisse, curé en Amérique latine, à une Conférence d’Afrique, à la Maison heureuse de Bressoux, à la Fraternité Saint-Paul qui prête des fonds à des organisations qui réalisent des projets économiques au Tiers-Monde. Les recettes proviennent de la collecte effectuée chaque quinzaine à la sortie des messes et la collecte annuelle à toutes les maisons de la paroisse.
La bibliothèque populaire
       Fondée modestement le 13 octobre 1905 par M. l’abbé Dresse, premier vicaire de notre paroisse, connut un certain déclin de 1912 à 1916 par manque de bibliothécaire fixe. Le 01.01.1916, la commission du Cercle nomma à ce poste bénévole M. Marganne Louis qui resta en fonction jusqu’en 1954. Le nombre des volumes, mis à la disposition des lecteurs, ne dépassait pas alors 200. Pour obtenir la reconnaissance de l’État et bénéficier ainsi des subsides gouvernementaux, le 20. 06. 22, il fallut même faire passer comme annexe à la bibliothèque principale, celle du Patronage. Le nombre de volumes, au 15.11.40, est de 4045 ; celui des livres prêtés pendant l’exercice 39-40 fut de 4325 pour 1070 lecteurs.
       Depuis la date de la reconnaissance jusqu’en 1940, l’État a alloué, en reconnaissance de la bonne tenue, un subside en livres pour une somme totale de 10.693 F, dont 2.380 F de subside supplémentaire. À noter que ni la Province, ni la Commune n’interviennent en rien. Achat de livres, reliures, registres, meubles, entretien, fiches, etc., sont dus à la générosité de la communauté paroissiale.
       Les inspecteurs de l’État considèrent l’œuvre comme une des plus actives et des plus florissantes de la région. Depuis la fermeture du Cercle en 1963, la bibliothèque dispose d’un local à la maison paroissiale. Elle est ouverte trois fois chaque semaine pendant deux heures. Elle compte à ce jour (en 1982) 16 000 livres. Depuis plusieurs années, Mme Braem, écrivain à ses heures, aidées de quelques volontaires, assure la continuité de ce service culturel.
Caisse de retraite
       Elle fut fondée le 02 février 1899 pour faire pénétrer dans la population l’idée de prévoyance. M. le baron Gaston de la Rousselière accordait, chaque année, un subside au prorata des sommes inscrites au livret de retraite. Depuis l’organisation par la loi de la prévoyance en vue de la vieillesse, ce subside a été supprimé, mais l’œuvre fonctionne toujours, grâce à une personne très dévouée, disposée à vous renseigner, à vous conseiller et même à prendre en charge les problèmes à résoudre.
Société de secours mutuels Saint-Joseph et Saint-Hubert
       Elle fut fondée dès le 23.03.1899. Elle ne cesse de marcher de progrès en progrès, d’initiative en initiative, pour le bien de ses membres. Elle compte un nombre appréciable d’affiliés. Elle a pu bénéficier des services incessants des membres de la famille Dethier. Elle est affiliée à la Fédération des Mutualités chrétiennes de la province de Liège. La permanence est assurée trois fois par semaine par un employé itinérant, assisté de membres bénévoles. Signalons encore des groupes disparus après de nombreuses années d’activité et de services appréciés :
       -la section dramatique, fondée le 27.10.1898, qui interprétait alternativement des pièces françaises et des pièces en wallon.
       -l’harmonie Sainte-Cécile, fondée le 24.01.1919, dont la sortie principale chaque année était la fête paroissiale avec les aubades et la procession.
       -la symphonie, fondée en décembre 1919, qui prêtait son concours à toutes les soirées théâtrales.
       -l’œuvre de la bonne presse, fondée en décembre 1918, qui recommandait les publications d’inspiration chrétienne, au moment où la loi sur l’instruction obligatoire allait augmenter le désir de s’informer et de se cultiver grâce à la lecture régulière.
       -la gymnastique “les Semailles”, fondée en 1930, pour trois sections masculines, au moment où les écoles ne proposaient pas cette discipline à l’horaire hebdomadaire et en 1942, pour trois sections féminines, à l’initiative du médecin-inspecteur qui misait sur des activités physiques régulières et rationnelles pour favoriser la santé. C’était faire œuvre de pionnier dans la région.
       -la jeunesse Saint-Louis, créée le 16.06.1904, elle est depuis après guerre 14-18 transformée en section de l’Association Catholique de la Jeunesse Belge ; elle comprend la J. O. C., la J. I. C., la J. E. C. La paroisse fournit à l’A. C. J. B. son premier secrétaire national en la personne de M. Jurdant René et à la J.O.C. un de ses membres fondateurs, Dumont Pascal.
La ligue ouvrière chrétienne
       L’antique confrérie Saint-Léonard qui avait une grande vogue au début de la paroisse, déclina vers la fin du siècle. M. le vicaire Philippet se donna à charge de la reconstituer sous une forme nouvelle et syndicale. Son initiative eut peu de succès. M. l’abbé Duquenne reprit l’idée et l’œuvre eut une vie assez active. Elle créa le "Secrétariat populaire". L’avocat Jurdant René en était l’âme.
       Chaque mardi soir, il tenait bureau gratuit au Cercle. Les consultations furent nombreuses surtout à l’époque de la refonte des lois sur les loyers, sur les pensions de vieillesse. Elle créa aussi une section d’épargne pour la classe ouvrière.
       Mais l’œuvre ne dépassait pas le cadre paroissial, on sentait qu’il lui manquait un souffle plus puissant et c’est alors que les dirigeants orientèrent leurs efforts vers la constitution d’une section locale de la Confédération des syndicats chrétiens.
       L’ancienne “ligue chrétienne Saint-Léonard” se mua dès lors en “ligue des Travailleurs chrétiens, section de Bois-de-Breux” et travailla en complet accord avec les fédérations régionale de Liège et nationale.
       Elle reprit à son compte “le secrétariat populaire” et créa plusieurs sections nouvelles : la section syndicale rattachée à la confédération des syndicats chrétiens de Belgique, la section mutuelle, sous-section de la mutuelle Saint-Eloi et Sainte-Barbe des œuvres de Liège ; la section d’épargne, succursale de la coopérative ouvrière belge, organisme financier de la ligue des Travailleurs chrétiens.
       Chaque mois se tinrent deux réunions du cercle d’études, une réunion du comité, une assemblée générale des membres en vue d’intensifier la formation religieuse, sociale, civile et politique des membres. Président : M. Serulier Eugène, secrétaire : M. Dumont Pascal, trésorier : M. Joseph.
       Chaque année à l’Ascension, les travailleurs chrétiens célébraient l’anniversaire de l’encyclique “Rerum novarum” traitant de la condition des ouvriers, du pape Léon XIII et l’encyclique “Quadragesimo anno” sur la doctrine sociale de l’Église, proclamée par le pape Pie XI par la participation à un grand rassemblement à Liège, avec cortège et discours.
       Cette ligue est devenue l’Équipe populaire où se rencontrent des travailleurs qui veulent vivre leur foi de croyants dans le monde du travail sans négliger tout ce qui peut concourir à la promotion ouvrière. Des réunions ont lieu au plan paroissial mais aussi aux plans sectoriel, fédéral. L’approfondissement religieux prévoit pèlerinage et retraite chaque année.
Le patronage des garçons
       Le 07.10.1866 fut fondé un patronage pour garçons, sous le vocable de Saint-Joseph et M. le baron Gaston de la Rousselière le dota d’une bannière en vue de la procession paroissiale. Elle fut bénite à l’occasion de la Fête-Dieu de 1867.
       Par suite du mauvais état de santé des abbés Moret et Depont et de leur court passage à Bois-de-Breux, cette œuvre tomba de plus en plus en léthargie pour disparaître complètement.
       En mai 1896, sous l’impulsion de M. le curé Josse, elle fut reconstituée et prit le titre de patronage Saint-Antoine. M. Duquenne Auguste, juge de paix, en assuma la présidence ; tandis que MM. Ers Antoine et Désiré, Blaise Modeste se dépensaient à l’agrément des patronnés. M. le curé Josse, assisté d’un étudiant de 4èmeannée de théologie du Grand Séminaire, en assumait la direction spirituelle.
       Depuis lors, le patronage a vécu prospère grâce au dévouement de jeunes gens consacrant leurs loisirs du dimanche après-midi sous la direction des vicaires de la paroisse, à la préservation morale, à l’éducation religieuse, à l’amusement eh groupe de jeunes âgés de 7 à 20 ans.
       Qui dira la somme de sacrifices que cette œuvre ingrate a demandé à ses dirigeants. Des liens d’amitié solides et durables ont uni bien des patronnés entre eux mais aussi des sentiments d’admiration et de reconnaissance se sont élevés envers les dirigeants, formés sur le tas, car plus d’un connaissait depuis l’âge de 14 ans la rude condition ouvrière.
L’unité scoute
       Après la guerre 40-45, le patronage des garçons devint Unité scoute qui, suivant les âges, groupe les garçons en louveteaux, en éclaireurs, en pionniers, en J. E. R. Elle essaie par la pédagogie du projet d’éduquer, à côté de la famille et de l’école, dans une vie de groupe, avec de très jeunes chefs. Des directives sont soumises aux Unités par le Comité national. La vie hors paroisse par des week-ends, par un camp d’été, favorise l’ouverture vers le monde. Une fête d’hiver témoigne de la vitalité de cette troupe dans la paroisse.
Le patronage des filles
Il a pris naissance avec le siècle. Son objectif était la sanctification du dimanche après-midi, en prolongement de la messe matinale, Par des loisirs en groupes, sous la direction de religieuses et de dames respectables, dans les locaux paroissiaux. En dehors du pèlerinage annuel à Chèvremont, il n’y avait ni sortie, ni camp de vacances.
       De nos jours, le patro a fait peau neuve avec l’uniforme à chemise verte et l’adaptation aux circonstances de vie par les réunions le samedi après-midi, le camp de vacances d’été et quelques week-ends hors paroisse. De manière éducative, de très jeunes dirigeantes essaient d’inculquer le goût du service, la joie de vivre en groupe dans des sections de Benjamines, d’étincelles, de Dynamites, d’Alpines et de Grandes. Elles reçoivent des directives de leur Comité national. Elles manifestent leur présence et leur vitalité à la paroisse par la participation à des Opérations humanitaires et par une fête d’hiver.
Dispensaire et consultation des nourrissons
       Dès 1880 s’ouvrait un dispensaire en l’école des Sœurs (école du Sacré-Cœur). Il élargissait celle des layettes, fondée l’été de 1866. Chaque mercredi après-midi, un médecin examinait les malades pauvres de la paroisse, ou visitait à domicile ceux auxquels l’état de santé ne permettait pas le déplacement. Les frais de vacation ou de visite du médecin aussi bien que les produits pharmaceutiques ordonnés par le dispensaire étaient à la charge complète de M. le baron de la Rousselière, ensuite à celle de sa fille Nadine devenue par son mariage, comtesse de Rohan-Chabot.
       Lorsqu’en 1897, les révérendes Filles de la Croix prirent la direction de l’école, le dispensaire se compléta par l’adjonction au médecin d’une religieuse-infirmière-visiteuse. La révérende sœur Marie-Huberta fut chargée de cette fonction pendant 43 années. De jour aussi bien que de nuit, la brave “petite sœur des malades”, cabas de paille noire tressée à la main, trottinait par les chemins, portant à tous ceux, de préférence pauvres, qui la réclamaient ses soins attentifs, avertis et toujours gracieux ainsi que sa parole réconfortante et sa gaieté communicative que facilitait son tutoiement à la mode flamande.
       C’est par milliers que ses mains expertes ont appliqué des ventouses. Son rayon d’action débordait largement sur les villages environnants, si bien que la Société des tramways Est-Ouest lui délivra un libre parcours, à titre gracieux, et que bien des wattman la chargeaient ou la déchargeaient en dehors des points d’arrêt. Rappelée à la maison-mère, le 10 mai 1940, elle fui remplacée par la douce sœur Léopold. C’est l’inoubliable sœur Marthe de la Croix, montée sur sa Deux-Chevaux nerveuse et capricieuse qui mettra le point final à ce service caritatif.
       Par suite de l’extension prise par les sociétés de secours-mutuels, après la guerre 14-18, le dispensaire fut de moins en moins fréquenté et finit par disparaître. Il fut remplacé par la “consultation des nourrissons”, fréquentée chaque année par de nombreuses mères de famille soucieuses de la bonne santé de leurs bébés. Une œuvre similaire, mais officielle avec subsides à la clé, a été créée au cours de la même guerre et fonctionne encore de nos jours dans les locaux de l’école communale avec outillage et personnel spécialisés.
       Sans se concurrencer, les deux consultations des nourrissons marchent parallèlement pour le plus grand bien de la jeune enfance de la paroisse. La mortalité infantile régresse de plus en plus. Les enfants débiles sont repérés et envoyés en cure de grand air aussi bien pendant la période scolaire que pendant les vacances.
       Maintenant, seule subsiste la consultation sise à l’école communale vu la dénatalité de cette seconde moitié du vingtième siècle.
Les habitations à bon marché
       Il convient de citer une initiative aussi ingénieuse que sociale réalisée sous l’impulsion de M. le vicaire Duquenne et de M. l’avocat Jurdant René.
       Dans le but de venir en aide aux familles nombreuses, trop souvent, hélas, écartées des locations d’immeubles par des propriétaires exigeants, ces hommes entreprenants et dévoués conçurent le projet de leur faciliter l’accès à la propriété.
       Ayant aisément rallié à leur généreux projet quelques paroissiens, ils constituèrent deux sociétés :
       1° la ligue du coin de terre et du foyer, fondée le 07.01.1930 par MM. Duquenne Léon, vicaire, Jurdant René, avocat, Sepulchre Gérard, Ers Désiré et Mathot Robert, association sans but lucratif dont les statuts furent publiés par le “Moniteur belge” (Journal Officiel en France pour toutes décisions du même ordre) du 16 mars 1930, sous le n° 2970 ;
       2° la société coopérative : “le foyer de la famille nombreuse” fondée le 27.02.1930 par MM. Ers Désiré, Marganne Mathieu, Mathot Robert, Sepulchre Gérard, de Franquen Raoul, Férard Joseph, Fassoul Albert, Jurdant René, Straetmans Charles. Les statuts de la coopérative parurent au “Moniteur belge” du 16.03.1930, sous le n° 2970,
       La ligue acquit, par-devant Maître Bodson, notaire à Grivegnée, un lot important de terrains à front des rues des Orchidées et Gail1ardmont, le lotit en parcelles qu’elle céda au prix coûtants.
       La société coopérative se chargea de mettre, à des conditions fort peu onéreuses, à la disposition des nouveaux propriétaires, les capitaux nécessaires à l’édification d’une maison d’habitation saine, confortable, et suffisamment spacieuse. À l’effet de diminuer le prix de revient de la construction, les adjudications groupèrent plusieurs immeubles. Pour en varier l’architecture, un concours fut organisé entre divers architectes.
       Grâce à ces diverses initiatives, moyennant une mensualité voisine d’une location, une trentaine de familles nombreuses se libéreront entièrement de leur dette en des périodes variant entre 20 ou 25 ans. L’assurance-vie assurera l’apurement immédiat de la dette en cas du décès du chef de famille.
       En 1940, la ligue et la coopérative n’ont point terminé leur activité car plusieurs lots de terrain étaient encore à concéder.















XVII
La vie des habitants au XIXème siècle

       Au XIXème siècle, les habitants de Bois-de-Breux se partageaient en un groupe très restreint de petits rentiers, des cultivateurs, des fermiers, quelques maraîchers, des ouvriers de la mine qui, l’hiver terminé, se muaient la plupart en ouvriers du bâtiment comme briquetiers, maçons, plafonneurs, des artisans comme ardoisiers, menuisiers, ébénistes, serruriers, maréchaux-ferrants, forgerons, cordonniers, boulangers, carreleurs, des ouvriers métallurgistes occupés soit à l’usine “Orban” (rue du Fourneau à Grivegnée-centre), soit chez “Lavallée” (conduites d’eau des Vennes), soit chez “Pirlot” (usine à cuivre et à zinc), soit chez “Dothée” (Espérance-Longdoz) ou chez “Piedboeuf” (laminoirs de Jupille).
       Quelques-uns travaillaient dans les verreries de Chênée. D’autres forgeaient des clous en fer. Il n’était pas rare de trouver des femmes-forgerons dans ces ateliers. Cette industrie, fort florissante à la fin du XVIIIème siècle et qui avait été encouragée par le gouvernement de Marie-Thérèse pour lutter avantageusement avec les établissements étrangers du même genre et assurer du travail à la population ouvrière, était sur son déclin au début du XIXème siècle par suite de la mécanisation de l’industrie, jetant sur le marché et à bon compte les “pointes de Paris”.
       Jusqu’en 1914, date de la promulgation de la loi sur l’obligation scolaire, l’enfant du peuple quittait l’école dès le lendemain de la première communion (12 ans) pour commencer sa vie de travail, dans les mines, les verreries. Aussi l’hiver venu, les écoles d’adultes, ouvertes tant à l’école catholique qu’à l’école communale, étaient-elles florissantes pour parachever l’instruction rudimentaire reçue avant l’entrée au travail. Néanmoins, le nombre d’illettrés était élevé.
Industrie charbonnière (1)
       1. Houillère de la “Chartreuse et de la Violette”, sise rue du Bassin et à l’endroit occupé actuellement, au cimetière de Robermont, par le monument aux morts de la guerre 14-18. Ce charbonnage fut à deux reprises inondé : le 16 mai 1877 et le 29 octobre 1881. Nulle vie humaine ne fut cependant à regretter, les chevaux eux-mêmes purent être remontés à la surface, sains et saufs. Après la seconde catastrophe, cette mine fut définitivement abandonnée.
       2. Houillère de la “Jobette”, rue de la Mutualité. Ce charbonnage, fin du XIXème siècle, rentra dans la concession du “Homvent”, absorbée elle-même dans la suite par l’importante société de “Wérister”, qui ferma ses portes en 1968 et se reconvertit en activités diverses sur le site.
       3. Le charbonnage de la “Rouge-Croix”, sis au coin des rues Gaillardmont et Malvaux eut le même sort que la “Jobette”.
       4. La houillère du “Houlleux”, sise au début des “Trixhes” (entre le passage à niveau et la rue de Bois-de-Breux, en 2009) abandonna par manque de moyens financiers pour l’approfondissement.
       5. Existaient encore des “burtais” au pré “Jihenne”, au bas du “sentier du Prince de Liège” et au “Trosoris”. Ces exploitations rudimentaires extrayant les couches affleurantes disparurent les unes après les autres par épuisement des gisements. (2)
       6. Un puits de prospection fut encore ouvert “sur les Pleins”, non loin de la fosse “Lamarmitte” mais fut abandonné après quelques mois de travail.
Cultures
       Jusqu’en 1914, les “Prés des Monts” et les “Pleins” étaient, chaque année, emblavés de froment, d’avoine, de trèfle et de luzerne. Par la suite, ces terrains ont été convertis en pâturages pour insensiblement être lotis en parcelles à bâtir. La “campagne de Belleflamme” et les “Waides des Dames” jusqu’aux fortifications de la Chartreuse, de même que “Les Sarts” étaient livrés à la culture maraichère pour l’approvisionnement des marchés de la ville de Liège. Quelques pépinières “Defourny” s’allongeaient à front des rues de Herve (fond du Bois-de-Breux), des Pépinières (rue Demoulin), Jules Cralle et Verte-Houmeresse.
Commerce
       Quelques boutiques où l’on trouvait de tout : aunages, faïence, farine, laine, épices, denrées alimentaires, pain, charcuterie, pétrole, alcools, fagots, moussades, se partageaient la clientèle, laquelle faisait souvent ses achats à crédit à la “quinzaine”, c’est-à-dire à crédit se soldant, sans intérêt, au jour du paiement de la quinzaine de travail.
       Pour les achats plus spéciaux, tels que vêtements, chapeaux, chaussures, outils…etc., les habitants se rendaient en ville, à l’occasion d’un beau dimanche. Quant aux légumes et pommes de terre, chacun cultivait ce qui était nécessaire aux besoins de son ménage, dans le lopin de terre attenant à toute habitation. Beaucoup de demeures possédaient un four à cuire le pain, une porcherie, un poulailler, un clapier. On ne trouvait de la viande de porc qu’une fois par semaine, le mercredi dans les “boutiques” ci-devant indiquées. Un seul boucher tenait étal à côté du passage à niveau du chemin de fer. Le village comptait plusieurs cabarets et même un hôtel.
Loisirs
       Trois concerts par hiver suffisaient à combler les désirs des habitants. Quant aux bals, ils étaient rares aussi et consistaient en sauteries après les concerts organisés par la chorale “Les échos de Bois-de-Breux”, chez Charles Habran (en amont de l’école communale), chez Leprince (en deçà de la propriété Dartois) ou chez Lambin à Beyne-Heusay. Il y avait aussi les “guinguettes” de la fête paroissiale, le premier dimanche d’août, et le bal en plain air de la “cour Brisko”, (à droite, en deçà du viaduc de la rue de Herve, à l’arrêt des bus).
       Les journées de travail étant fort longues (12 heures en hiver et 14 heures en été), chacun, le soir, rentrait harasser au logis, heureux d’y trouver le repos bien mérité. Le dimanche, seul jour chômé presque généralisé, on jouait en famille, après les offices ou les emplettes matinales à Liège, aux cartes, aux dominos, au loto, quelques-uns s’exerçaient au tir à la carabine “Flobert”, fréquentaient les cabarets, se rendaient au jeu de quilles du “Trosoris” ou encore, mais clandestinement voir “batte lès coqs”, comme le raconte si savoureusement Marcel Rémy dans l’ouvrage “Les Ceux de Chez Nous”.
       Par beau temps, en famille, on faisait une promenade pédestre ou l’on rendait visite à quelque parent ou connaissance. La vie était simple, les soucis et les besoins peu nombreux, aussi les chants et les rires fusaient-ils, et les bonnes farces toujours de saison. Beaucoup de ceux qui remuent le passé regrettent ce temps, peut-on leur donner tort ? Si le progrès n’avait eu comme résultat que d’abolir les abus du pouvoir capitaliste, tout en laissant à l’homme et à la femme leurs croyances et le goût de la vie simple et de la vie de famille, on pourrait l’applaudir et se réjouir du confort que, par ailleurs, il a apporté à notre humanité.
NOTES SUR LE CHAPITR
       1. Le 02 décembre 1645, permission fut donnée à A. Renard et V. Beaufort de faire une xhorre au lieu de Trosory dit “fiot de cheval” pour rendre ouvrables les houilles de Breux et Bellaire.
       2. Le 09 septembre 1659, octroi fut donné à A. Moes et ses comparchoniers de la fosse “Mal d’accord” au bois de Breux, en lieu-dit Fondrivaux, de faire une nouvelle arène.










XVIII
Le chemin de fer

       La ligne du “Plateau de Herve” a été mise en service le 15 juillet 1872. Au début, Bois-de-Breux n’était qu’un point d’arrêt. La petite maison du type chemin de fer, jouxtant le passage à niveau, à droite au pied de la côte, fut la gare primitive, avant de servir d’habitation au garde-barrière. Les voyageurs prenaient leur ticket au bureau, puis attendaient patiemment, sur la voie publique, l’arrivée du “vapeur”.
       La première des trois marches pour atteindre le compartiment étant assez élevée par rapport an niveau du sol, il fallait être très alerte pour y arriver sans aide ; à cet exercice, les hommes éprouvaient moins de difficulté que les femmes, encombrées par leurs longues jupes, aussi ne refusaient-elles pas une main secourable. Le passage à niveau, en ce temps-là, n’était fermé que par une barre en bois que l’on tirait en travers de la route.
       La première gare fut construite en 1890 et agrandie en 1923, à l’époque où la ligne fut mise à double voie entre Liège et Micheroux. Avant le 10 mai 1940, sept trains de voyageurs à la montée et huit à la descente assuraient le trafic entre Liège et Herbestal.
       La moyenne des entrées était de cinquante par convoi. De nombreux trains de marchandises transportaient les productions du Pays de Herve : la houille principalement, ensuite le bétail et les fruits ; ils assuraient l’approvisionnement en fourrage, paille, bois de mine, matériaux de construction, etc.
       Au cours de la guerre 40-45, les Allemands réquisitionnèrent le matériel billes et rails constituant la seconde voie. À partir de la seconde moitié du XXème siècle, le transport par chemin de fer périclita. Il était concurrencé sans scrupule par 1a route et le moteur à essence qui offraient la rapidité, le confort, le porte à porte notamment. Inoccupée et désaffectée, la gare fut démolie en 1976 et 5 à 6 emplois supprimés. Les barrières du passage à niveau qui ne s’abaissent plus qu’une ou deux fois par jour sont automatisées.
       Depuis 1957, des autobus assurent le transport des voyageurs, avec comme avantage important d’emprunter les chaussées qui passent au centre des agglomérations traversées. Par deux fois, au passage à niveau, une locomotive à vapeur tamponna de plein fouet un tram bondé de voyageurs, il y eut chaque fois plusieurs victimes. La compagnie des tramways Est-Ouest avait pourtant installé une voie de déraillement en descente qu’il fallait rectifier avant d’aborder le croisement et prescrit en plus au receveur de précéder son convoi et s’assurer que la voie était libre de train.
       À deux reprises également, un wagon à charbon dévala la pente depuis Beyne pour s’embourber dans la voie de détresse du Trosoris. Une autre fois, un autobus 66 de la ligne Chênée-Herstal, heurté par une locomotive-diesel au passage à niveau non gardé de MaIvaux, a été entraîné sur une vingtaine de mètres. Du bus replié en deux, on retira une dizaine de blessés ; la plupart, des femmes qui revenaient du marché hebdomadaire de Chênée.













XIX
Tramway – trolleybus - autobus

       En septembre 1880, la concession de la ligne Cornillon-Haut-Pré, traversant la ville de Liège, d’Est en Ouest, était accordée à Frédéric Nyst. Cette ligne, à traction chevaline, fut exploitée dès mai 1881 par les frères Frédéric et Émile Nyst, en société en commandite simple. L’approbation du cahier des charges eut lieu le 04 septembre1880 et comportait un parcours de 3750 mètres. Les voitures roulaient sur rails encastrés dans la chaussée.
       Le 19 juin 1895, un nouveau cahier des charges autorise le prolongement du parcours jusqu’à Bois-de-Breux. Depuis une vingtaine d’années, un “char à bancs”, nanti de roues à bandages en fer, assurait en cahotant, sur les gros pavés de la route et en une heure, le trajet aller-retour Cornillon-Bois-de-Breux-gare, soit à peu près du 7km/h. Malheur aux personnes souffrant de l’estomac ! mais satisfaction pour l’allure car on prenait le temps de vivre à cette époque.
       Pour la montée, un troisième cheval, dit cheval d’allège, était attelé en flèche à partir de Cornillon jusqu’à Robermont. Mais, malgré ce renfort, il n’était pas rare, aux jours d’affluence, de voir les voyageurs des plateformes, descendre en cours de montée et suivre à pied le petit véhicule afin de permettre à l’attelage d’atteindre le haut de la côte. Heureux temps où l’on riait d’une telle aventure, en échangeant de gais propos soit avec le conducteur Auguste Van Brussel ou le percepteur Constant Seressia. On traitait les animaux avec gentillesse !
       L’arrêté royal du 18 mars 1897 autorise l’exploitation de l’extension Bonne-Femme et Chênée, traction animale et sur rails ; celui du 15 mars 1897 autorise l’exploitation de l’extension Cornillon à Bois-de-Breux, sur rails également. À dater de ce moment, le trafic comporte des voyages aux heures d’arrivée et de départ des trains de la ligne de Herve. En tout, huit voyages par jour. Un train dit “de théâtre” quittait la place Saint-Lambert à 23 h 30, mais le prix du voyage était doublé. Enfin, un arrêté royal du 09.05.1898 autorise l’électrification du réseau Est-Ouest de Bois-de-Breux à Haut-Pré et de Chênée à Ans.
       Le réseau comporte alors 10.080m de rails. L’arrêté royal du 08 mars 1902 autorise l’exploitation du tracé Bois-de-Breux-Fléron, ce qui ajoute 4650 m au réseau. La succession des voyages devient plus fréquente, les trams passant à intervalle moyen d’un quart d’heure. Mais la voie est toujours unique et parfois un tram doit stationner longtemps à l’endroit du “croisement”.
       Sous la signature d’Agnès Denis, « Les tramways Est-Ouest, publié dans “Neuf cents ans de vie autour de Saint-Remacle-au-Pont”, on peut lire ces quelques renseignements supplémentaires :
       « La guerre de 1914-1918 va d’ailleurs se charger de stopper net tout projet de modernisation des réseaux. Elle oblige les responsables et le personnel à de réelles prouesses techniques pour maintenir un service à la disposition des voyageurs, tout en palliant les obstacles successifs qui surgissent : coupure du réseau par la suite de la destruction du Pont des Arches, destruction du matériel, réquisition de pièces diverses en raison de la pénurie de cuivre, etc. Le réseau Est-Ouest fonctionne, bon an mal an, avec de nombreux coupures de lignes et des retards importants.
       « Son exploitation prend certains visages inattendus pendant cette période. Des tramways qui ne peuvent plus regagner leur dépôt sont entretenus dans la rue où ils passent d’ailleurs la nuit. La voiture-échelle, chargée de l’entretien des lignes aériennes, doit être tirée par un bœuf, suite aux réquisitions des chevaux. Et l’Est-Ouest participe au mieux-être de la moitié en assurant, avec les Tramways Liégeois, le ravitaillement de la population… »
       En 1918, dans leur hâte de fuir vers leur pays, les troupes allemandes en déroute utilisent non seulement la chaussée pavée mais aussi l’accotement réservé au tram, si bien que les sabots des chevaux et les roues des chariots remuent la terre qui finit par recouvrir les rails ; ce handicap et l’envahissement du site propre interrompent le trafic du tram pendant plus d’une semaine de novembre.
       En 1925, les tramways liégeois et Est-Ouest fusionnent pour s’appeler Tramways Unifiés de Liège et Extensions (T. U. L. E.), 40 ans plus tard, ils prendront la dénomination de Société des Tramways Intercommunaux Liégeois (S. T. I. L.).
       C’est en 1930 que la voie deviendra double sur tout le parcours, le service se normalisera à une fréquence de 15 minutes pour descendre à 12 minutes aux heures de pointe.
       C’est la ligne 10.
       À certaines heures du jour, pour dégorger le service Liège-Fléron, un “intensif” circule de la Place Saint-Lambert à Bois-de-Breux-gare : c’est la ligne 11. À partir du 01 octobre 1940, cet “intensif” montera jusqu’au viaduc de la rue de Herve. Le passage à niveau de Cornillon qui causait des interruptions anormales de 15, voire de 20 minutes dans la circulation, disparut en avril 1939, étant remplacé par un viaduc.
       À partir du 11 mai 1940, par suite de la destruction du “Pont des Arches” (ce pont, ainsi que les autres ponts de la Meuse, avait été miné et détruit par le Génie militaire belge sur ordre de l’État-major), les trams 10 et 11 font la boucle à la place Saint-Pholien. À partir de 1954, des trolleybus et à partir de 1971, des autobus remplaceront les trams permettant du même coup l’élargissement de la chaussée.
       Hormis le service des voyageurs, la ligne 10 connaîtra : le tram à charbon, une motrice et deux wagons-tombereaux, pour approvisionner régulièrement les centrales électriques en combustible, chargé à Homvent (Beyne), le tram au lait, motrice transformée en messagerie qui transportait chaque matin les cruches pleines des fermes des hauteurs vers la ville.
       Au cours de la guerre 14-18, les chevaux, ayant encore été réquisitionnés en 40-45 par l’armée allemande, Grisette, une motrice, assurait la messagerie de toute marchandise, le tram-échelle, motrice tractant une échelle surmontée d’une plate-forme pour l’entretien et la réparation des fils, le tram-atelier, motrice attelée de wagons pour le transport des ouvriers, des outils et des matériaux nécessaires au service de la voie, la remorque de beau temps, sans parois mais surmontée d’une toiture festonnée, avec marchepied et chaîne de sécurité courant le long de la voiture dont les banquettes étaient latérales.
       Si le tram, le trolleybus, l’autobus concourent à l’activité économique, ils maintiennent une animation irremplaçable dans les localités traversées, ils font partie de la santé morale de la population, ils concourent à donner un air de fête avec 3 fois rien… un drapelet attaché à la perche du trolley qui s’en va flottant par les routes rappelant les expositions internationales de Liège, les fêtes nationales…etc.
       Qu’il nous manque — en cette période de morosité et de crise économique depuis 1970, un espoir peut-être, car un essai très timide a été tenté pour l’inauguration du nouveau dépôt de la S. T. I. L.
       Quelques souvenirs d’enfant, peut-être très sensible aux bruits et à la musique, comme la roulette ou le patin qui suçait l’électricité du câble chantait agréablement les jours d’été, tout en modulant à chaque agrafe, comme les roues du premier tram faisaient vibrer les vitres de la chambre à coucher après les nuits de forte gelée…
       Un autre signe du changement de société : “intrez el couhène nasse dame !”(Entrez dans la cuisine, notre dame !), invitation du receveur ou d’un voyageur à une dame pour qu’elle entre et s’assoie sur les banquettes intérieures où on savait aussi qu’elle sortirait son matériel à tricoter car on était avare du temps et puis c’était déchoir pour un homme de rechercher ou de disputer le confort à ses compagnes ou aux personnes respectables.
       Un dernier signe, comme les conducteurs maugréaient contre cette “racuzète”, était horloge pointeuse installée au fond du Bois-de-Breux, et qui notait aussi bien à la montée qu’à la descente si on respectait les horaires… ce n’était déjà plus le “bon temps” où la confiance régnait. Son existence fut éphémère.

XX
LA GUERRE 1914 -1918
       Les notes qui vont suivre ont été écrites, au jour le jour, par M. le curé Fryns. Elles ont le mérite d’avoir été rédigées sur le vif et ont d’autant plus de force ; aussi les transcrivons-nous telles quelles.
       « Le mercredi 29 juillet, Mme de Harlez de Deulin, châtelaine des Bruyères, m’annonce ainsi qu’à quelques habitants, la possibilité d’une guerre. Nul ne veut y croire ; le lendemain, les élèves des religieuses, habitant Fléron, arrivent à l’école tout en émoi à 9 h 30. La nuit, le tocsin a vibré pour le rappel des soldats. Les adieux sont déchirants ; mais on ne veut croire à la guerre : les soldats iront, comme en 1870, garder la frontière.
       « Dimanche 02 août, fête paroissiale, il pleut à torrents. Vers 9 h 30, M. le Curé décide de sortir le Saint-Sacrement en procession : peu de monde, quelques dames et quelques messieurs accompagnent. C’est lugubre ! Là procession monte la grand-route et ne va que jusqu’au château des Bruyères. Ce parcours est entravé par les troupeaux de vaches, descendant des hauteurs et réquisitionnées par l’armée belge. Tous les cœurs sont dans l’attente de graves événements. À 14 heures, le garde champêtre annonce l’arrivée des troupes belges. On prépare les locaux des classes pour les recevoir.
       « Lundi 03 août, les soldats absorbent le café que leur préparent les religieuses.
       « Mardi 04 août, les personnes étrangères s’empressent de regagner leur domicile, les trains cessent leur service. Vers 16 heures, messieurs, dames, jeunes-filles, religieuses, avec une activité fébrile, nettoient des mannes de légumes et épluchent des pommes de terre pendant que vont et viennent nos petits soldats. Tout le monde veut travailler pour eux, pour la patrie en danger. Ordres et contre-ordres, marches et contre-marches ont exténué les défenseurs de la cité. Ceux-ci sont bien convenables, pas de gros mots, pas de plaisanteries déplacées, pas un qui se permettrait de toucher aux belles pommes du potager. Plusieurs demandent des médailles, d’autres en montrent données par des êtres chers, la plupart écrivent des cartes postales au galop.
       « Mercredi 05 août, La soupe est prête à 7 h 30 du soir, mais l’ordre de partir est donné. L’ennemi est signalé sur les hauteurs. Tous les habitants ovationnent les braves enfants qui sont pleins d’enthousiasme, ils montrent leurs armes et leurs cartouches dans lesquelles ils ont confiance. Ils vont écraser les boches ! Quelques-uns, cependant, songent à la dure réalité, l’un d’eux jette en guise d’adieu : “Priez pour nous”. Ils sont partis, un calme apparent règne, les cœurs sont oppressés. Le canon tonne. Les maisons sont secouées.
       « Jeudi 06 août vers 8 h 30. Tous les cœurs sont étreints par la souffrance. L’armée a battu en retraite. On s’est battu à Romsée ; les blessés arrivent et sont soignés dans les ambulances improvisées dans les écoles libres ; va-et-vient des médecins et des ambulanciers, des soldats. Un parlementaire allemand, les yeux bandés, passe en auto dans la soirée, le quartier des Bruyères est envahi par l’ennemi, les habitants fuient épouvantés, les portes sont enfoncées à coups de haches par les soldats teutons.
       « Nombre de pauvres gens viennent chercher asile aux couvents des Frères et des Sœurs, on les installe le moins mal possible. Les boches ont obligé les traînards à marcher devant leurs canons pour servir de couverture. D’autres habitants sont obligés à passer la nuit, couchés sur la terre humide devant les canons prussiens bombardant la citadelle de Liège. Le moindre mouvement est puni d’un coup de crosse de fusil.
       « Vendredi 07 août. Sans arrêt, défilent les troupes allemandes ; il pleut aussi sans arrêt. Toutes les portes sont closes et on regarde par les fentes des volets les soldats, l’arme au bras, le doigt sur la gâchette, guettent tout mouvement et malheur à qui hasarderait un geste. Les jours se succèdent et on espère l’arrivée des Français que l’on dit être à Esneux et des Anglais que l’on prétend débarquer à Ans. Les nuits sont agitées et on les passe dans les caves. Des greniers, on aperçoit les incendies de la rue de l’Université, de la Citadelle.
       « Dimanche 16 août, à l’issue de la grand’messe, la population a la douleur de voir une longue file de nos braves petits soldats prisonniers s’acheminer pédestrement vers la captivité, entre une double haie de “casques à pointe”. Ils sont harassés de fatigue et affamés. Une halte. De toutes les maisons sortent provisions de toutes espèces. L’ennemi laisse faire cependant et la troupe se remet en marche, mais plusieurs prisonniers, grâce à la foule et à la complicité d’habitants qui leur ont passé veston ou casquette, ont réussi à tromper la surveillance et à prendre la clé des champs.
       « Jeudi 20 août. Vers 9 h 30, une automobile s’arrête devant la porte du presbytère, en descendent un capitaine-commandant allemand, deux soldats, fusil n la main, conduisant M. l’abbé Gaspar, prêtre retraité qui célébrait chaque matin une messe à Saint-Denis, Liège. Ils venaient de l’arrêter sur la grand-route, peu avant qu’il n’atteigne son domicile. Ils sonnent.
       —Vous êtes le curé de la paroisse, vocifère Vondergrabus.
       –– Oui, Monsieur.
       –– Entrez dans l’automobile, accompagnez-nous au château de Fayenbois. Si vos paroissiens tirent encore sur nos soldats, vous serez fusillé. Man hat geschossen !
       Or, les seuls coups de feu entendus dans le village, étaient ceux de l’escarmouche entre soldats belges et allemands au midi du 06 août. Arrivé au château, cet aimable officier fait rédiger à M. le curé Fryns un écrit par lequel celui-ci engage ses paroissiens au calme et à déposer leurs armes et à être serviables envers les Allemands.
       Du jeudi au vendredi, le brave curé est retenu au château, traité avec assez d’égards ; mais le 21 au soir, après le souper, les choses changent de face. Les officiers ne peuvent plus, disent-ils, admettre le curé en leur compagnie, car ils ont des dispositions de guerre à prendre. Et, en effet, le samedi 22 août, vers huit heures du matin, une fusillade éclate aux environs de l’école communale, des hussards de la mort sillonnent la route ventre à terre. On fusille sans jugement, on incendie des habitations.
       Les habitants se précipitent aux fenêtres pour savoir. Les fidèles, sortant de l’église, sont affolés en se rendant chez les bonnes Sœurs. La fusillade continue, on se terre dans les caves. On commence la messe vers 9 heures, écrit M. le Curé, deux Boches me surveillent. Après l’office, nous exhortons les habitants au calme et à la soumission car, comme toujours, “on a tiré” et les représailles vont suivre. Oui, en effet, “on a tiré”, mais ce sont eux, les traîtres.
       « Je les ai vus tirer, alors que je me trouvais tout seul sur la route avec quatre Boches qui viennent encore soutenir que ce sont mes habitants qui tirent sur leurs soldats. Avec M. le curé de Magnée qui s’était réfugié à Bois-de-Breux, nous nous confessons mutuellement à la sacristie. Un Boche, croyant que nous allions nous sauver, frappe à la porte, on le rassure. Après la messe, on ne me laisse pas le temps de déjeuner et tous deux, nous sommes emmenés au château de Fayenbois.
       « M. le curé de Magnée est relâché vers 10 heures. Le commandant me fait enfermer disant que c’était regrettable pour moi ce qui s’était passé dans ma paroisse. Depuis ce moment jusqu’au mardi matin, je fus traité avec rigueur. On me menaçait de me fusiller, de brûler toutes les maisons de la rue de Herve. Le soir, on ouvrait ma porte et on criait.
       Ce que ce saint homme n’écrit pas par humilité, mais qu’il a confié à quelques intimes, est un raffinement de cruauté : on verse du pétrole près de la chambre, en lui disant que puisque l’armée va évacuer le château, on y met le feu et qu’il sera rôti ; on l’éveille brusquement et un soldat est là, debout, qui le met en joue. On s’amuse véritablement de lui. Aussi, le brave prêtre en gagne-t-il une affection cardiaque qui, peu d’années après, le conduira prématurément à la tombe.
       « Six habitants ont été tués lâchement : MM. Defrère André et Jean-Baptiste, deux frères, sous les yeux de leur mère et sœurs qui supplient, à genoux, les bourreaux. L’un des deux fusillés, non tué sur le coup, est achevé à coups de crosse sur la tête.
       « Quelle barbarie !
       « M. Claessens Jean-Henri, abattu sur le seuil de sa maison, entre sa femme et ses enfants, tombés à genoux pour implorer grâce.
       « M. Fassotte Jean-Mathieu, vieillard, sourd, percé d’un coup de baïonnette, puis brûlé vif dans sa maison.
       « M. Hubin Joseph-Léon, tiré à travers les vitres de la fenêtre, alors qu’il déjeunait en compagnie de sa femme et de ses six enfants.
       « M. Rener Jacques.
       « Les Allemands ne permettent pas aux parents de toucher aux corps des victimes. L’épouse Claessens et ses enfants devront même enjamber le corps de leur mari et père pour sortir de leur habitation et fuir l’incendie. Lorsque M. Thiry Eugène, directeur pensionné des écoles communales, beau-père de M. Defrère Jean-Baptiste, demandera à connaître le motif du meurtre de son gendre, l’officier allemand lui répondra : “Il y a eu erreur, voulez-vous 500 F de dédommagement ?” Il avait le sens de la dignité humaine, celui-là !
       « Vers 11 h 30, les ennemis chassent tous les habitants des maisons comprises entre la rue de la Rousselière (récemment baptisée Trousouris) et le Viaduc du Chemin de fer, vers une prairie située en face de la ferme Desert (immédiatement au-dessus du viaduc). Ils sont fouillés à plusieurs reprises, on leur enlève leurs canifs, puis ayant séparé les hommes des femmes et des enfants, on les oblige à se coucher dans l’herbe humide. “Nous allons fusiller tout ce monde”. »
       Mais vers 13 heures, on renvoie les habitants, M. le curé Fryns s’étant porté garant au prix de sa vie de la tranquillité de ses paroissiens. À 11 h 30, nouvelle alerte, nouvel ordre : tous les habitants de la rue de Herve, depuis la gare jusqu’au viaduc, ne pourront plus désormais, sous peine d’être fusillés, occuper leur maison sinon de 9 heures du matin à 17 heures et ce, sur autorisation à aller quérir chaque matin au château de Fayenbois. Ce régime dura jusqu’au 07 septembre. Quiconque, dit l’ordre, n’obéit pas, sera fusillé sur le champ.
       « Dimanche 23 août, pas de messe, l’église est fermée. L’après-midi, on apporte les victimes de la veille au cimetière. Les corps reposent dans de simples caisses ; du pauvre vieux Fassotte, il ne reste que quelques ossements calcinés. Le 08 septembre est apposée sur les murs la célèbre affiche du commandant Dieckmann dont le texte fit le tour du monde. En voici le texte fameux :
   
       Commune de Grivegnée.
       Avis très important.
       Château des Bruyères, le 06.09.1914.
       Bataillon Dieckmann
       À la présente discussion assistaient :
   
       Monsieur le curé Fryns de Bois-de-Breux ;
       Monsieur le curé Jansen de Beyne ;
       Monsieur le curé Le Propre de Heusay ;
       Monsieur le curé Paquay de Grivegnée ;
       Monsieur le bourgmestre Dejardin de Beyne ;
       Monsieur le bourgmestre Hodeige de Grivegnée ;
       Le major Dieckmann.
   
       Monsieur le lieutenant P. R. Reil par le major Dieckmann porte ce qui suit à la connaissance des personnalités présentes :
       Jusqu’au 06 septembre 1914, à 4 heures de relevée, toutes les armes, munitions, explosifs, pièces d’artifices qui seront encore en possession des citoyens seront remises au château des Bruyères. Celui qui ne le fera pas, sera passible de la peine de mort. Il sera fusillé sur place ou passé par les armes, à moins qu’il prouve qu’il n’est pas fautif.
       Tous les habitants des maisons occupées des localités de Beyne-Heusay, Grivegnée, Bois-de-Breux, Fléron, devront rentrer chez eux à partir de 7 heures. Les maisons pré-désignées seront éclairées aussi longtemps que quelqu’un y sera sur pied. Les portes d’entrée seront fermées. Celui qui ne se conformera pas à ces prescriptions, s’expose à des peines sévères. Toute résistance quelconque contre ces ordres entraînera la mort.
       Le commandant ne doit rencontrer aucune difficulté dans les visites domiciliaires. On est prié, sans sommation, de montrer toutes les pièces de la maison. Quiconque s’y opposera, sera sévèrement puni.
       À partir du 07 septembre à 09 heures du matin, je permettrai l’occupation des maisons de Beyne-Heusay, Grivegnée et Bois-de-Breux par les personnes qui y demeuraient précédemment, aussi longtemps qu’une défense formelle de fréquenter ces lieux n’aura pas été prononcée par les habitants susvisés.
       Pour avoir la certitude qu’il ne sera pas abusé de cette permission, les bourgmestres de Beyne-Heusay et de Grivegnée devront dresser immédiatement des listes de personnalités qui seront retenues, par alternance de 24 heures, comme otages, au fort de Fléron, pour la première fois de 6 heures du soir jusqu’au 7 septembre à midi. Il y va de la vie de ces otages à ce que la population des communes précitées se tient paisiblement en toutes circonstances.
       Pendant la nuit, il est sévèrement défendu de produire des signaux lumineux quelconques. La circulation des vélocipèdes n’est autorisée que de 7 heures du matin à 5 heures du soir (heure allemande).
       Je désignerai hors des listes qui me seront soumises les personnalités qui, de midi d’un jour à midi de l’autre jour, ont à séjourner comme otage. Si le remplacement n’a pas lieu en temps utile, l’otage reste de nouveau 24 heures au fort. Après ces nouvelles 24 heures, l’otage encourt la peine de mort si le remplacement n’est pas fait. Comme otages, sont placés en première ligne les prêtres, les bourgmestres et les autres membres de l’administration.
       J’exige que tous les civils qui circulent dans ma circonscription, principalement ceux des localités de Beyne-Heusay, de Fléron, de Bois-de-Breux, de Grivegnée, témoignent leur déférence envers les officiers allemands, en ôtant leur chapeau ou en portant la main à la tête comme pour le salut militaire. En cas de doute, on doit saluer tout militaire allemand. Celui qui n’exécute pas, doit s’attendre à ce que les militaires allemands se fassent respecter par tous les moyens.
       Il est permis aux militaires allemands de visiter les véhicules, paquets, etc, de tous les habitants des alentours. Toute résistance à ce sujet sera punie sévèrement.
       Celui qui a connaissance que des quantités supérieures de 100 litres de pétrole, benzine, benzol et d’autres liquides se trouvent à un endroit déterminé des communes précitées et qui ne l’a pas annoncé au commandant militaire qui y siège et lorsqu’il n’y a aucun doute sur le lieu et la quantité encourt la mort. Les quantités de 100 litres sont seulement visées. Celui qui n’obtempère pas de suite au commandement "levez les mains" se rend passible de la peine de mort.
       L’entrée du château des Bruyères de même que celle des allées du parc est interdite, sous peine de mort, depuis le crépuscule jusqu’à l’aurore (de 6 heures du soir à 6 heures du matin) à toutes les personnes qui ne sont pas de l’armée allemande.
       Pendant le jour, l’entrée du château des Bruyères n’est permise que par l’entrée nord et là où se trouve la garde et pour autant de personnes qu’il y a de cartes d’entrée. Tout rassemblement à proximité de la garde est défendu dans l’intérêt de la population. Quiconque, par la communication de fausses nouvelles qui seraient de nature à nuire au moral des troupes allemandes, de même que celui qui de n’importe quelle manière cherche à prendre des dispositions contre l’armée allemande se rend suspect et encourt le risque d’être fusillé sur le champ.
       Tandis que par les dispositions susvisées, les habitants de la région de la forteresse III B sont menacés de peines sévères lorsqu’ils enfreignent ces dispositions d’une manière quelconque ; ces mêmes habitants peuvent lorsqu’ils se montrent paisibles compter sur la protection la plus bienveillante et le secours en toutes occasions lorsqu’on leur fait ou pourrait leur faire du tort. Les demandes de remise de bétail pour une quantité déterminée se font journellement de 10 à 12 heures et de 14 à 15 heures, au château des Bruyères auprès de la commission du bétail. Celui qui, sous l’égide de l’insigne de la convention suisse, nuit ou même cherche à nuire à l’armée allemande et est découvert, est pendu.
   
       (s) Dieckmann,
       major-commandant. 
   
       Jusqu’en novembre 1918, nombre d’habitants eurent à héberger, sans interruption importante, des soldats ou sous-officiers allemands. À diverses reprises, les maisons furent visitées de fond en comble pour découvrir : cuivre et caoutchouc. Rares furent les citoyens chez qui on trouva ces produits : ils étaient bien cachés. Aussi, le 11 novembre 1918, lorsque fut connu l’armistice, apparurent aux façades et aux fenêtres : drapeaux tricolores, vélos, bassines et autres ustensiles en cuivre. Les Boisdebreusiens, tout en fêtant la très prochaine délivrance, le départ de leurs ennemis de plus en plus abhorrés, aimaient à montrer aux troupes en retraite ce que le patriotisme avait soustrait aux perquisitions.
       Note : Dans le récit de M. l’abbé Fryns, à la date du 22 août, s’est glissée une omission importante : après les fusillades, les Allemands incendièrent, non seulement les maisons habitées par leurs victimes, mais vingt-cinq autres encore. Les habitations reconstruites, après guerre, sur l’emplacement des ruines, portent comme signe distinctif, dans leur façade, une petite pierre de taille carrée, avec les lettres O. R. D. (Office des Régions Dévastées). Cependant plusieurs maisons ne furent pas reconstruites, les descendants de leur propriétaire ayant fixé leur domicile ailleurs.
Paroissiens morts pour la patrie pendant la guerre  14-18
1. Mort en captivité
       M. Chantraine, Louis-Joseph
                            2. Morts sous les drapeaux
       M. Marchal, Prosper-Jean
       M. Vaume, Renier-Joseph, Léon
                            3. Civils fusillés, le 22 août 14
       M. Claessens, Jean-Henri
       M. Defrère, André
       M. Defrère, Jean-Baptiste
       M. Fassotte, Henri-Mathieu
       M. Hubin, Joseph-Léon
       M. Rener, Jacques
              4. Morts des suites de leurs blessures
       M. Caby, François-Nestor
       M. Cannaerts, Félix-Jean
       M. Charbonnier, Gilles-Émile
       M. Hanquet, Henri-Simon
                     5. Morts au champ d’honneur
       M. Balthazar, Joseph-Valentin
       M. Degeer, Léonard-Joseph
       M. Dolhain, Jules-Louis
       M. Grossman, Hermand-Bernard
       M. Lycops, Jean-Louis
       M. Mossoux, Pierre-Jean
       M. Collinet, Jean-Laurent
       M. Dolhain, Joseph-Hubert
       M. Fassotte, Émile-Henri
       M. Lepère, Désiré-François
       M. Marchand, Jules-Nicolas
       M. Thone, Léopold


















XXI
La guerre 1940 - 1945
       Depuis le 26 août 1939, l’armée est sur pied de paix renforcé ; les armées sont à leur poste de combat, les mois passent et l’espoir grandit de voir notre pays échapper à la guerre. La mobilisation qui, en se prolongeant, fait le plus grand tort au moral des rappelés et à la discipline militaire.
       À l’aube du vendredi 10 mai 1940, vers 3 h 30 du matin, la population est subitement tirée de son sommeil paisible par les détonations des canons de la D. T. C. A. (Défense Terrestre Contre Avion) dont une batterie est installée à la “cité des Déportés”. Les coups claquent serrés. Ce n’est pas une alerte quelconque. Dans le lointain au N. E., d’autres canons tonnent sans interruption aussi.
       L’impression d’un fait nouveau, d’un fait général se précise, l’air vibre lugubrement du vrombissement d’avions nombreux, on est partout aux fenêtres. Que se passe-t-il ? Un poste de T. S. F. (de radio) du voisinage capte une émission, vite, on descend au rez-de-chaussée, on branche le poste sur Bruxelles.
       Pour la seconde fois en ce vingtième siècle, l’Allemagne, et cette fois, cyniquement, sans ultimatum, sans déclaration de guerre, sème sur son passage la désolation, la ruine, l’incendie, le massacre. C’est la guerre, l’horrible fléau qui s’abat à nouveau sur notre malheureuse Patrie.
       Dès 4 heures du matin, les habitants sont sur le pas de leur porte, commentant avec indignation et douleur la tragique nouvelle.
       Mais le système défensif, créé à coups de milliards de francs, est solide. Un film ne l’a-t-il pas bien présenté à la population pour la rassurer ? On a confiance, cette fois, on en a la ferme assurance que l’ennemi sera bloqué à la frontière, les forces françaises et anglaises arriveront toutes à la rescousse. Mais quel enfer vivront les régions de l’Est ! On pense douloureusement à son époux, à ses enfants, à ses proches, jetés brutalement dans le carnage. Certains ne sont-ils pas déjà à cette heure les innocentes victimes du bourreau ? Les âmes s’élèvent vers le Maître de la vie, en faveur des défenseurs de la cité.
       À partir de 6 heures du matin, commence un défilé ininterrompu de familles du Plateau de Herve, évacuant la “zone des forts”. Les plus de quarante ans revivent la journée du 04 août 1914 ! Véhicules de toutes espèces sont employés pour l’exode : autos, camionnettes automobiles, chariots de fermes, les vélos sont particulièrement nombreux, conduits à la main, parce que lourdement chargés de tout ce que l’on a cru, dans l’affolement, bon à être emporté ; les voitures d’enfants, des plus vieux modèles, ont été retirées des greniers pour servir de porte-fardeaux.
       Combien de ces choses s’avéreront tantôt encombrantes, inutiles et devront être abandonnées le long du chemin alors que des objets de première nécessité ont été oubliés là-bas, dans la chère maison, que l’on sent, s’éloigner, pas à pas, sans espoir du revoir ?
       Les visages sont empreints de la plus indicible douleur ; les yeux regardent sans voir le paysage qui fuit, continuant à fixer en imagination le coin natal, dans une longue et fervente expression d’amour et de regrets. Des vieux et des vieilles, juchés inconfortablement, sur des chariots, des camions, font peine à regarder partir pour l’exil ; des jeunes mamans serrent contre leur sein oppressé l’enfant de celui qui, en ce moment, répondant au devoir, est exposé aux balles ennemies.
       Quatre femmes s’accoucheront à Bois-de-Breux, ce jour-là, l’une à même le trottoir, près du viaduc de la rue de Herve, les trois autres à l’école communale, transformée hâtivement en asile pour évacués.
       Le sanatorium N. D. des Bruyères est vidé de ses malades par ordre de l’Autorité pour être à la disposition de l’armée(l) MM. Martens et Jacoby, respectivement médecin et pharmacien du village, sont rappelés à l’armée. Alors que les autorités communales fuient et abandonnent leurs administrés, les curés et vicaires qui ne sont pas touchés par un ordre de rejoindre, restent au poste.
       La panique est une “maladie contagieuse”: les avis lancés sans interruption par radio, concernant les précautions à prendre contre les bombes incendiaires que lancent les avions (vider les greniers de tout ce qui est inflammable, tenir du sable ou de la terre à portée de main), contre les bris de vitre dus aux explosions (coller des bandes de papier entrecroisées) ; il faut dénoncer les parachutistes que l’ennemi laisse choir, l’annonce de l’incendie de la gare de Jemelle et le pilonnage de nos aérodromes, sont tous éléments en faveur de l’extension de la psychose.
       Bientôt, beaucoup d’habitants, se souvenant des horreurs du 22 août 1914, des atrocités de la campagne de Pologne, des déclarations concernant la guerre totale, gagnés par l’ambiance morbide que crée le cortège des évacués, prennent eux-aussi le chemin de l’exil. Lorsque le 11 mai, le génie militaire fera sauter les ponts de la Meuse, ils ne couperont la fuite qu’à de très rares familles. L’armée et la gendarmerie battent en retraite. Il ne reste d’autorités que M. le curé Lonnoy et M. Cornet, commissaire-adjoint et Evans, agent de police. Ce sont ces derniers qui organiseront le ravitaillement des familles restées sur place.
       Par suite de la résistance de plusieurs forts et de la rupture des ponts de Liège, les premiers “verts de gris” ne paraîtront à Bois-de-Breux que le 22 mai, sans toutefois commettre de méfaits. Il faudra attendre qu’un pont de bateaux ait été jeté solidement sur la Meuse, en aval du pont Maghin, pour voir sans cesse les files d’autos gris-noir, descendre ou monter la chaussée, pour entendre la marche lourde que cadencent les chants heurtés, des fantassins qui envahissent notre pays. Les avions à croix gammées passent à basse altitude. Tout ce branle-bas, auquel on ne s’habituera jamais, rendra la vie de plus en plus désagréable, jusqu’à atteindre la nausée.
       À partir de fin mai cependant, les premiers évacués rentrent au foyer, étonnés de retrouver leur village encore debout ; sur le chemin de l’exil, les rumeurs les plus alarmantes leur avaient été rapportées :“Au pays de Liège, il ne restait pas pierre sur pierre, tout était démoli”.
       Les retours s’échelonnent jusqu’à la fin août car des familles ont été refoulées jusqu’au midi de la France, voire jusqu’aux frontières espagnoles. L’accueil qu’elles y reçurent fut parfois peu sympathique : “les Belges étaient la cause de tous les maux de la France, ils avaient trahi, leur Roi, en tête, la cause sacrée des Alliés.”
       Quel souvenir des Français de 40 doivent aussi avoir bien des C.R.A. B. (jeunes volontaires de 16 ans et plus, appelés à rejoindre des Centres de Recrutement de l’Armée Belge en France) à qui on allait réserver trains, autobus, camions pour le transport et qu’on contraignit à se rendre d’un lieu à un autre, sans jamais pénétrer profondément vers l’Ouest ou le Sud, comme pour encombrer la route des envahisseurs et retarder leur progression.
       Cependant, en cours de route du retour, bien des paroissiens connurent les raisons qui dictèrent la reddition de l’armée belge, le peu de résistance de l’armée hollandaise et l’écroulement de l’armée française. Ils ne condamnèrent pas la décision royale et reçurent comme le plus grand des affronts les propos tenus par Reynaud, ministre français.
       À l’occasion du 21 juillet 40, maintes maisons de particuliers et de commerce de la localité montraient la photographie du Souverain à leur fenêtre. L’occupant porta la valeur du “mark” à 12 F 50. Ce même jour, Hitler annonçait au monde, à l’occasion d’un grand discours radiodiffusé, la libération immédiate des prisonniers belges et leur retour imminent au foyer.
       D’autre part, les troupes allemandes et leur comportement correcte, voire amicale envers la population, simulant, dans les tramways notamment, une politesse voisine de l’obséquiosité, s’abstenant de piller et payant tout “mark comptant”, faisait que certains compatriotes étaient trop indulgents et oubliaient presque les faits brutaux de 1914, les innocentes victimes militaires et civiles, et la domination étrangère sur notre sol.
       À ceux qui se tenaient sur une prudente réserve, remettant à plus tard leur jugement, se permettant de rappeler les faits, il était répondu que les soldats nationaux socialistes n’avaient rien de commun avec les soudards du kaizer Guillaume II.
       Cependant, par la suite, les yeux s’ouvrirent lorsque l’on vit que, sous le couvert d’achat, tous les soldats allemands, nantis de quantité de marks sans valeur en dehors du territoire occupé, rapinaient le pays, le vidaient de toutes les denrées de nécessité et acculaient la population à la famine. Seuls quelques rares aveuglés par les De Man, les Degrelle, les journaux à la solde de l’occupant, faisaient encore belle figure au passage d’un Allemand.
       Le départ, souvent forcé d’ouvriers pour l’Allemagne, les restrictions alimentaires de plus en plus dures, le cantonnement d’une troupe au village, achevèrent de désiler les yeux des plus aveugles. Le patriotisme sain avait reconquis la cité et l’Allemand redevenait l’ennemi abhorré.
       Petit à petit, la conviction de la libération grandissait dans les cœurs. Ni l’occupation de toute la Belgique, ni la capitulation et la soumission de la France, ni les revers de l’Angleterre n’émoussaient plus les volontés. L’Allemand était vainqueur, soit, mais ce ne serait que temporairement. La victoire du droit viendrait, on en était persuadé. “Notre cause est pure” avait déclaré le Roi. “Crime criant vengeance au ciel” avait proclamé le Vatican.
       Les bonnes nouvelles, lancées par la radio anglaise, écoutées d’abord dans le plus grand secret, ensuite sans souci de représailles, volaient de bouche en bouche, commentées, grossies, tandis que les défaites étaient minimisées ou considérées comme inexistantes. L’attitude du haut-clergé et du clergé paroissial dictaient celle de la population.
       On se passait sous le manteau des feuilles clandestines, on lisait avidement et l’on communiquait des “prophéties” plus ou moins authentiques. Les jeux de mots, parfois très peu spirituels, faisaient les délices des rencontres, assaisonnaient les conversations.
       Dès septembre 1940, tout ce qui pouvait contribuer à soutenir le moral, était accueilli les yeux fermés, comme parole d’évangile. Le bon peuple belge s’était repris de la défaillance bien explicable du début.
Faits notés au jour le jour
       En août 1940 : un poste de contrôle de la circulation automobile miliaire est installé à la limite des communes de Beyne et de Grivegnée, puis à mi-chemin du viaduc au passage à niveau ; il est supprimé définitivement le 25 novembre.
       En octobre 1940, par suite de l’application du rationnement des pommes de terre à 1/2 kg par jour et par personne, celles-ci disparaissent du commerce régulier au profit des navets et des rutabagas.
       En novembre 1940, octroi de timbres supplémentaires d’alimentation à certaines catégories de travailleurs mais défense formelle d’augmenter les salaires et appointements afin de ne pas entraver l’embauchage des ouvriers pour l’Allemagne. Instauration de la soupe scolaire : 1/2 litre par enfant et par jour. Sont laissés pour compte les adolescents aux études.
       12 décembre 1940, cantonnement d’une centaine de soldats chez l’habitant. Aucun ne participera à un office religieux paroissial.
       01 janvier 1941, les bouchers cessent tout commerce par manque de viande. Des distributions rationnées seront organisées à la cadence d’une par mois.
       En février 1941, le commerce de vêtements et de chaussures est soumis à des bons d’approvisionnement, accordés après enquête administrative.
       En mars 1941, par suite du manque total d’aliments de base dans beaucoup de familles dont les revenus modestes ne permettent pas d’approvisionnement au commerce noir, M. le vicaire Pirnay trouve accueil, pour un mois en Hesbaye et en Ardennes, pour une quarantaine d’enfant débiles et un dîner complet pour une vingtaine d’autres dans certaines familles de la paroisse. Le “secours d’hiver” commence la distribution mensuelle de charbon aux nécessiteux et “Saint-Vincent de Paul” assure une 2èmedistribution de 100 kg par ménage visité. Les vieux, économiquement faibles, résistent au froid et à la faim en prolongeant les heures de sommeil : perte de moins de calories, un repas de moins et du combustible épargné.
       25 mars 1941, incendie d’un dépôt militaire de paille à Bressoux. 500 000 F d’amende aux communes du Grand-Liège dont Bois-de-Breux fait désormais partie et rentrée des habitants à leur domicile avant 21 heures ; cette sanction est levée le 08 mai car l’enquête a prouvé qu’il s’agissait d’un court-circuit ; mais l’amende…
       29 avril 1941, départ pour le front russe, en préparation, des troupes cantonnées à Bois-de-Breux. Par certains habitants, en contact avec un Allemand hébergé, la nouvelle se répandit qu’on les envoyait au sacrifice suprême, ce que les événements confirmèrent, car le régiment dont elles faisaient partie, fut décimé.
       En mai 1941, les enfants des écoles primaires et gardiennes recevront chaque mois : un bâton de chocolat à la crème (50 g), des vitamines et de l’huile de foie de morue ; cette promesse ne sera pas tenue longtemps.
       21 mai 1941, affichage des personnes autorisée à pratiquer l’art de guérir (non juives).
       15 juin 1941, apparition des souliers à semelle de bois et rationnement du charbon. À cette date, la paroisse compte 110 prisonniers en Allemagne. À la demande de la ligue ouvrière féminine, on organise une octave de prières en vue de leur libération. Elle rencontre un grand succès auprès des familles éprouvées. L’œuvre de Saint-Vincent de Paul décide l’organisation d’un repas pour enfants débiles pendant les quinze derniers jours de chaque mois. Il sera servi au vicariat. Des demoiselles passeront de maison en maison pour récolter des timbres de rationnement et des victuailles, les hommes trouveront les 800 à 900 Francs nécessaires mensuellement à ce service. Ayant débuté avec une dizaine d’enfants, on en vint bientôt à en restaurer 40 ; néanmoins, on continue à envoyer des enfants à la campagne.
       22 juin 1941, nouvelle journée de prières en faveur des prisonniers, avec octave de “saluts du Saint-Sacrement” à la même intention. Périodiquement, ces prières se continueront toute la guerre, à l’occasion de la récitation du chapelet, en commun, le soir, en l’église paroissiale, pratique instaurée depuis la mobilisation de l’armée en août1939.
       Nuit du 08 au 09 juillet 1941 : bombardement par avion du mur du cimetière de Robermont. Deux pans de mur sont écroulés, des caveaux éventrés, des débris de cadavres jonchent, au matin, la chaussée, en face de la rue des Bassins.
       07 août 1941, consécration des familles à la Sainte-Vierge à 12 heures, au son de la cloche ; dans toutes les maisons, le chef de famille récite la formule de consécration.
       15 août 1941, préparée par un triduum de sermons, consécration de la paroisse à la Sainte-Vierge avec affluence énorme aux offices.
       10 septembre 1941, premier rationnement de charbon, 200 kg par ménage, par mois. Premier ravitaillement normal en pommes de terre. Toutes ces bonnes nouvelles se répandaient comme traînée de poudre, de bouche à oreille, car rares étaient les Belges qui lisaient les journaux à la solde de l’ennemi. Ils étaient reconnaissables d’ailleurs à leur moral inébranlable.
       En octobre 1941, exposition et adoration du Saint-Sacrement, tous les dimanches, prescrites par Mgr l’Évêque, avec récitation ininterrompue du chapelet pendant l’adoration ; exercice bien suivi par les paroissiens.
       En novembre 1941, parution de l’ordonnance allemande sur la réquisition des métaux non ferreux.
       04 novembre 1941 : interdiction de circuler après 20 heures car on a fait sauter le tambour des mollettes du charbonnage du Gosson ; punition levée le 08, l’auteur de l’attentat étant arrêté.
       16 novembre 1941 : inauguration de la garde civile des lignes de chemin de fer. À tour de rôle, les habitants de Grivegnée, tout comme ceux du Grand-Liège, doivent, la nuit, monter de garde le long des voies de Liège à Verviers.
       27 novembre 1941 : bombardement aérien. Une torpille et deux bombes tombent dans la prairie située derrière le couvent des religieuses. 259 vitres sont brisées à l’établissement, 60 à l’école des garçons, 26 à la cure et un grand nombre dans les habitations voisines et dans la rue des Orchidées. Pas de victimes à déplorer.
       02 décembre 1941 : distribution à une cinquantaine de familles de quelques 160 jouets récoltés par les demoiselles de la J. I. C. chez les habitants et remis à neuf par leurs mains habiles. Un comité portugais commence à faire distribuer, deux fois par semaine, des sardines aux enfants débiles des écoles, à concurrence du 1/5 de la population scolaire.
       05 décembre 1941 : bombardement aérien. Cette fois, les bombes tombent à Fléron, où l’on déplore quatre victimes : M. le curé et 3 religieuses. Les succès obtenus par les Alliés au front russe et au front de Lybie galvanisent les courages ; malgré les privations très dures, la population résiste magnifiquement ; on ne constate que très peu de signes de découragement, même chez les pauvres secourus ; c’est la foi tenace en des jours meilleurs ! On se serre la ceinture, on a le sourire aux lèvres, on trouve de bons mots, on se salue du signe V ! On tient.
       18 décembre 1941 : par suite de la non parution de “l’appel des cloches”, servi toutes boîtes, une partie de la population échappe à l’action bienfaisante du petit hebdomadaire. Un groupe d’hommes décide de lancer un bulletin paroissial dactylographié. Le premier numéro de 3 pages “Pro patria” est sorti en vue des fêtes de Noël. La garde des lignes de chemin de fer qui avait été levée le 13 décembre, est réinstaurée par nos maîtres temporaires le 22 à la suite de l’attentat commis à Wandre contre un pilonne supportant un câble à haute tension que les Allemands ont installé entre Bressoux et l’Allemagne. Il reste toujours 110 prisonniers de guerre en Allemagne, originaires de notre paroisse ; ne rentrent au pays que des néerlandophones, des grands malades et des mutilés.
       Du 06 au 17 janvier 1942 : à la réquisition des métaux non ferreux, la très grosse majorité de la population dépose du plomb, des "vi fiérs" au lieu de cuivre jaune ou rouge et laiton. La garde du chemin de fer continue : chez nous, elle est de 12 heures, soit 4 heures de garde, 4 heures de repos, 4 heures de garde à Kinkempois.
       Du 17 au 31 janvier 1942 : les écoles primaires sont fermées à cause du froid (moins 21° à moins 27°, la nuit) et la grande pénurie de charbon. Une classe, par école, reste ouverte et chauffée pour la distribution de la soupe scolaire et des aliments du comité portugais ainsi que pour protéger du froid, pendant toute la journée, les enfants licenciés de l’école.
       19 janvier 42 : la garde du chemin de fer est supprimée. Le secours d’hiver n’a distribué en janvier que 150 kg de charbon. Les pauvres souffrent du froid et de la faim. Une épidémie de diphtérie, s’étant déclarée à Chênée, tous les enfants sont vaccinés contre cette maladie.
       28 janvier 42 : distribution de la première carte de poissons. La fermeture des écoles est prolongée jusqu’au 08 février, le froid étant toujours fort vif et le charbon continuant à manquer. Les tramways, par suite de l’accumulation de la neige, ne peuvent plus monter que jusqu’à Beyne (arrêt du pont de Gueldre) ; des équipes d’ouvriers sont occupés continuellement à déblayer les voies, tandis que les motrices roulent “en série” (petite vitesse) pour éviter le soulèvement de la neige poudreuse qui envahirait les moteurs et les mettrait en panne pour quelques heures. Les motrices sans voiture remorquée passent à intervalles d’une demi-heure ; aussi sont-elles bondées ; des voyageurs sont juchés sur les marchepieds et le timon d’accrochage. Très nombreux sont les ouvriers, employés, simples voyageurs qui doivent faire les trajets à pied tout comme “au bon vieux temps”.
       Le 04 février même, après une nouvelle et abondante chute de neige, la journée se passera sans qu’un tram puisse quitter le dépôt, même pas le “service messagerie” qui assure notamment le ravitaillement en lait ; il en sera de même le 05 ; et le 06, le service n’est repris que jusqu’à Bois-de-Breux-gare. Pour déblayer plus rapidement les voies, la société des Tramways a équipé en chasse-neige une autochenille ; les déblais, des deux côtés de la voie, atteignent 1 mètre de hauteur. Le marchand de légumes ambulant ne passe plus depuis le 04 janvier et, dans les jardins, il est impossible d’arracher quoi que ce soit ; aussi est-ce la grande pénurie de légumes. Il n’y a plus eu non plus de distribution de pommes de terre depuis fin octobre, sauf 1/2 kg à Noël et au Nouvel-an. Les nécessiteux souffrent terriblement de la faim et du froid. Les autorités communales ont transformé certaines salles en chauffoir public.
       Du 21 au 24 février 1942, nouvelles chutes de neige si bien que depuis le 05 janvier, on n’a plus vu la couleur de la terre. À partir du 25, s’amorce un léger dégel de jour ; mais le gel persiste la nuit. Ce n’est que le 10 mars que commencera le véritable dégel, lent mais continu. La première pluie tombera timidement le 15 mars.
       03 mars 42 : nouvelle punition infligée aux habitants du Grand-Liège qui doivent rentrer au logis avant 8 heures du soir parce que des attentats nouveaux ont été perpétrés contre des citoyens rexistes favorables à l’ennemi, ainsi qu’à des installations électriques de l’usine Espérance-Longdoz.
       23 mars 42 : aggravation de la peine si bien qu’il faut être rentré pour 18 heures et ne sortir qu’à 7 heures du matin.
       03 avril 42 : levée de la punition.
       Pendant le premier trimestre 42, les enterrements au cimetière de la rue Malaise ont atteint quatre fois le nombre enregistré pour le premier trimestre 41. Beaucoup d’organismes fortement affaiblis n’ont pu vaincre le froid intense.
       27 avril 42 : en déchargeant des obus de l’armée belge, les adjudants Brauns Laurent et Colson Victor de notre paroisse sont tués à Genk.
       25 juin 42 : arrestation de M. le vicaire Pirnay Jean-Louis, à la suite d’une dénonciation. Dans son sermon du 10 mai, le zélé vicaire avait tenu pour devoir de rappeler aux paroissiens les obligations de l’heure présente pour tout citoyen belge et de montrer les manquements aux devoirs imposés par le 4ème commandement de Dieu par ceux qui pactisaient avec l’ennemi de la Patrie.
       15 juillet 42 : M. le vicaire Pirnay, défendu par Maître Cassian Lohest, est, après débats extrêmement violents et qui ont duré trois quarts d’heure, condamné à deux ans de réclusion.
       Texte de l’ordonnance du Lieutenant-général et Oberfeldkommandant Keim, adressée à MM. les Curés par l’entremise de M. Bologne, bourgmestre-président du Grand-Liège, en date du 30 juin 1942.
   
       L’Oberfeldkommandant
       V. Ch. /polit.
       Liège, le 25 juin 1942
       Au Bourgmestre de Liège, (2)
   
       Président de la Conférence des Bourgmestres du Grand-Liège.
   
       Objets :
       a) messes commémoratives et autres cérémonies religieuses à caractère national.
       b) messes de mort pour fusillés.
       c) imprimés religieux.
   
       Malgré des avis répétés, des cérémonies et des offices religieux ayant tourné en démonstrations politiques, je me vois obligé d’édicter l’ordonnance suivante dont le contenu doit être porté à la connaissance de toutes les cures catholiques ainsi qu’à celles des bourgmestres de votre ressort.
       a) des fêtes commémoratives religieuses telles que des messes commémoratives pour des soldats morts au champ d’honneur, des prisonniers ou des services religieux analogues ne peuvent être célébrés que lorsqu’il s’agit de cérémonies purement religieuses organisées par l’église elle-même et ayant lieu à l’intérieur de l’église. L’organisation de tels services commémoratifs par d’autres organisations telles que les fédérations d’anciens combattants ou la participation de tels organismes à des messes commémoratives est interdite. Pour le choix du jour ou de l’heure ou d’autres circonstances, il ne peut être non plus donné un caractère politique à ces cérémonies commémoratives.
       La règle à suivre est la suivante : il est interdit de décorer l’église, l’autel ou le catafalque avec les couleurs nationales ou d’autres drapeaux qui ne sont pas proprement religieux. Le défilé et la participation de délégations avec ou sans drapeaux, le port d’uniformes ou de vêtements ressemblant à des uniformes, d’uniformes militaires, nationaux ou politiques, des signes distinctifs, la prononciation de commandements militaires sont interdits.
       Il est également interdit de donner des signaux militaires (sonneries de clairons, p. ex.) de chanter ou de jouer la Brabançonne, de chanter des hymnes ou des mélodies qui n’ont pas un caractère religieux. Le prône ainsi que toutes les autres allocutions doivent avoir un caractère purement religieux.
       Tout service commémoratif religieux de ce genre doit être porté en temps utile - au moins trois jours à l’avance ~ à la connaissance de la Kreiskommandatur compétente - l’Oberfeldkommandantur – Verwaltungschef pour l’arrondissement de Liège avec le Grand-Liège. S’il n’y avait pas de réponse à cet avis, le service est considéré comme autorisé. Au cas où cette autorisation ne serait pas accordée, vous recevrez une notification d’interdiction écrite ou verbale.
       b) En ce qui concerne les messes de morts pour les fusillés, nous répétons ce qui suit :
       La messe de Requiem, pour un habitant du pays fusillé à la suite d’un jugement rendu par l’autorité occupante, ne peut être célébrée que dans l’église de la paroisse à laquelle il appartenait en dernier lieu. L’initiative de la célébration de cette messe ne peut venir de quelconques organisations ou associations de personnes, particulièrement d’associations d’anciens combattants. Toute communication préalable d’une telle cérémonie ne peut être faite, soit de la chaire, soit sous une autre forme. Est seule autorisée une messe basse, sans catafalque et sans chant du Libera.
       Le jour et l’heure de la messe doivent être communiqués en temps utile - au moins trois jours d’avance - à la Kreiskommandantur - l’Oberfeldkommandantur – Verwaltungschef pour l’arrondissement de Liège et le Grand-Liège. Ne peuvent assister à cet office que les plus proches parents du fusillé à concurrence de 20 personnes au maximum. Afin de pouvoir respecter ce maximum, les prêtres doivent, si besoin en est, faire appel à la police. Des délégations de quelque genre que ce soit ne peuvent être admises. Les personnes de surveillance de l’armée occupante, qu’elles soient en uniforme ou non, ne rentrent pas dans ce maximum de 20 personnes. Lors de la célébration de la messe, tout caractère démonstratif doit être strictement évité. Toute décoration de l’église est interdite.
       c) Sous a) et sous b) des cas spéciaux ont été réglés. Mais toutes les autres cérémonies religieuses ne peuvent pas perdre non plus leur caractère religieux et prendre un caractère démonstratif ou politique. Il en est de même pour tous les autres domaines de l’activité de l’Église. À ce propos, il y a lieu de faire remarquer qu’il est particulièrement inadmissible que des journaux paroissiaux ou d’autres imprimés de l’Église aient un contenu qui ne soit pas uniquement religieux.
       Les infractions contre la présente ordonnance seront sévèrement punies sans considération de personnes.
       M. le Gouverneur et Monseigneur l’Évêque ont reçu copie de cette ordonnance.
       Il y a lieu de me faire parvenir un rapport me faisant savoir que les prêtres catholiques et les bourgmestres ont été avisés de la présente ordonnance.
   
       (s) Keim
       Generalleutnant et Oberfeldkommandant
       (Sceau de l’O. F. K.)

       Pour copie conforme :
       (s) Jorkowski
   
Note complémentaire :
       Je joins quelques exemplaires de la présente afin que vous puissiez porter ces instructions à la connaissance des prêtres catholiques de votre commune. Pour me permettre d’envoyer à l’autorité allemande le rapport qu’elle réclame, veuillez me faire savoir dans le plus bref délai, que lesdits prêtres ont été avisés (pour le 02 juillet prochain au plus tard).
   
       Le bourgmestre-président,
       J. Bologne
   
       Le bourgmestre Vanhamme et ses services dont la paroisse de Bois-de-Breux dépendait étaient installés à l’hôtel de ville de Beyne-Heusay. Son domicile privé était situé en face de l’école communale de Bois-de-Breux. Sachant que la grande majorité de la population lui était hostile, il était constamment armé. Il échappa de justesse à un attentat à l’hôtel de ville, attentat attribué à la Résistance, malgré une garde personnelle permanente.
       Le 05 juillet avait eu lieu, en l’église paroissiale, la première communion mensuelle des membres de la ligue du Sacré-Cœur : 220 hommes répondirent à l’appel. Ce fut un spectacle imposant de voir cette masse groupée sur les chaises près du chœur et s’approcher avec ordre de la “table sainte”. Ce spectacle se représentera dorénavant chaque mois ; une moyenne de 165 présences sera constatée jusqu’en fin décembre 1942.
       Le 26 juillet 42 fut une grande journée de prières paroissiales pour les prisonniers. Les exercices religieux furent très suivis. Du 01 août au 31 octobre 42, la ration de charbon est de 200 kg par ménage et cela dans un centre charbonnier occupant des milliers d’ouvriers mineurs.
       Fin octobre 42, commence la déportation des ouvriers et des ouvrières ; c’est dans presque tous les foyers l’angoisse et la désolation. 14 hommes sont enlevés à la firme Bailly-Mathot, 12 hommes et 8 femmes à la Téco.
       Le 09 octobre 42, Bois-de-Breux est incorporé au Grand-Liège ; cela vaudra de multiples contributions nouvelles et l’assimilation aux sanctions pour actes de sabotages contre l’armée allemande ou contre ses alliés de l’ordre nouveau ou les rexistes restés fidèles à Degrelle et aux objectifs qu’il poursuit si bien, que du 05 au 15 décembre, puis du 24 au 30 décembre, il est défendu de circuler dans les heures d’occultation soit de 16 h 30 à 8 h 30 du matin.
       Le 01 janvier 1943, l’œuvre des repas aux enfants débiles (fondation de M. le vicaire Pirnay et continuée malgré son incarcération par M. Léo Bonameau, directeur de la Téco) restaure chaque jour 55 enfants, garçons et filles, inscrits aux écoles libres et communales.
       Le 08 mars 43, départ du vicaire, le R. P. Gysemberg, de notre paroisse.
       Le 31 mars 43, du haut de la chaire, lecture de la protestation des Évêques belges contre l’enlèvement des cloches et la déportation des ouvriers en Allemagne. Installation d’une puissante batterie allemande de D. C. A. au Plateau de Belleflamme.
       En avril 43, chasse à l’homme. Les occupants arrêtent les passants, examinent les cartes d’identité, demandent leur occupation et en dirigent chaque jour un certain nombre vers la citadelle de Liège pour interrogatoire et, le cas échéant, pour la déportation en Allemagne.
       À cette date, 38 personnes de la paroisse sont déportées.
       Le 11 juin 43, après-midi, enlèvement de la plus grosse des deux cloches de l’église. Les services officiels des dommages de guerre ont envoyé au Conseil de Fabrique une attestation certifiant que la cloche enlevée avait été fondue car elle ne figurait pas parmi celles récupérées. Le Conseil de Fabrique a entrepris les démarches voulues et a été autorisé, à charge dé l’État à faire une soumission entre les 6 fondeurs belges dont le document donnait la liste. La nouvelle cloche de 450 kg a repris place au clocher en octobre 54 après avoir été baptisée par Mgr Malmendier, en présence de M. et Mme Ers, parrain et marraine notamment. C’est M. Laffineur, paroissien, qui la fixera définitivement, en remplaçant l’ancien "mouton" de bois par un support métallique, en plaçant un roulement à billes pour les deux cloches, en adaptant un système électrique de balancement et en remplaçant l’ancienne horloge par un cadran à impulsions électriques, commandé par un régulateur fixé au mur de la sacristie, côté lecteur.
       20 juillet 43 : inauguration de la statuette du Saint-Enfant-Jésus de Prague à l’église. Elle ne sera pas remise sur son socle après la peinture de l’église en 1976.
       15 juillet 43, on inaugure le souper des vieillards qui, d’abord offert une fois par semaine, est bientôt porté à deux fois. Toutes les œuvres de la paroisse, chrétiennes ou non, subsidient ce nouveau fleuron de la charité ou de l’entraide. Les repas chauds, sont pris à la “Populaire”, local socialiste, et sont surveillé par des délégués des œuvres organisatrices.
       18 juillet 43, arrivée de l’abbé Pirson Jacques, comme vicaire.
       01août 43, la procession n’étant pas permise par les rues de la paroisse, l’Équipe d’Action Catholique des Hommes (A. C. H.) décide d’en organiser une, par les allées du Sanatorium N. D. des Bruyères, avec bénédiction des malades devant le grand perron et présentation d’un panneau avec photos des prisonniers. La participation est très importante. On prie avec ferveur pour la paix, pour la protection des prisonniers et des déportés, pour la guérison des malades.
       15 septembre 43, nouvelle initiative de l’A.C. H., le clergé, escorté d’acolytes, bénit une à une toutes les maisons de la paroisse avec une relique de la vraie croix.
       15 novembre 43, suppression de la garde rurale pour tous les hommes âgés de moins de 40 ans mais instauration de la garde de la ligne de chemin de fer du Plateau de Herve.
       21 janvier 44, M. le vicaire Pirnay, gracié suite à des interventions nombreuses et à son état, rentre au vicariat. Sa santé est fortement ébranlée (il en gardera à vie d’importantes séquelles), aussi M. l’abbé Pirson est-il maintenu dans les fonctions de vicaire. Ce prêtre temporaire a fui depuis le début de la guerre la région frontalière allemande dont il est originaire, par crainte d’enrôlement obligatoire dans les armées du Grand Reich. Son dynamisme et son patriotisme sont admirables.
       À partir du 01 mai 44, les alertes d’avions sont journalières et ce sont de véritables armadas volantes venant d’Angleterre qui survolent notre village pour des bombardements massifs en Allemagne, objectifs militaires et industriels. On leur souhaite bonne réussite malgré les nombreux tirs de barrages et les attaques des chasseurs. Certains, touchés dans leurs organes essentiels, quitteront leur formation, perdront leur équilibre et tomberont en vrille sous nos regards angoissés.
       La paroisse, sous l’impulsion de ses deux vicaires, accueille une trentaine de familles sinistrées de Cointe et de Sclessin, victimes des bombardements stratégiques alliés qui, par avions en piqué, essaient de détruire les ponts ferroviaires qui enjambent la Meuse. Après chaque alerte avec bombardements, des volontaires de la Croix-Rouge aidés de jeunes gens et d’hommes s’en vont à la recherche des victimes pour les dégager et les secourir.
       04 juillet 44, réquisition de jeunes étudiants pour creuser des tranchées à Beyne-Heusay.
       22 août 44, on est dans la fièvre de la délivrance prochaine. Les résistants doivent rejoindre la position assignée. La grand-route voit le retour des “souris grises”, jeunes allemandes en uniforme, appelées ainsi en raison de leur livrée grise et qui s’occupaient à remplacer des hommes de plus en plus nécessaires pour les combats. Elles étaient occupées dans des services auxiliaires tels que téléphone, télégraphe.
       30 août 44, on est sur le pas des portes, on jubile, les Allemands remontent dans le plus grand désordre : camions chargés de mobilier disparate, groupes les plus hétéroclites refusant de charger des officiers qui retournent à pied.
       03 septembre 44, départ de la D. C. A. postée à la gare de Bois-de-Breux, cour à marchandises et à Belleflamme. Le service des tramways est suspendu.
       07 septembre 44, dans l’après-midi, du quartier du Viaduc, on aperçoit un drapeau belge, hissé au loin, sur un terril, à l’autre côté de la ville de Liège.
       08 septembre 44 à 20 heures, on exulte. Les premiers camions américains sont en vue au bas du Bois-de-Breux. Une garde allemande placée au Viaduc de la rue de Herve a l’air de se demander ce qu’elle doit faire ; elle tâche même de lier conversation avec les habitants, disant qu’elle est prête à se rendre aux Américains. 200 soldats allemands sont casernés au Sanatorium des Bruyères, des partisans les attaquent, ils ne se défendent pas ; mais l’officier dit ne vouloir se rendre qu’à des soldats réguliers. On va quérir deux soldats américains, les 200 Allemands jettent bas leurs armes et se mettent en rang pour partir vers la captivité. Une section de la Feldgendarmerie est casernée au château de Gaillardmont, l’officier voudrait se rendre, ses hommes l’abattent, enterrent le cadavre, partent dans la direction de Jupille où les Américains les cueilleront d’ailleurs.
       09 septembre 44, le charroi américain défile, on admire le magnifique armement, on jette fleurs et fruits aux soldats. Ceux-ci donnent leur préférence aux pommes et aux tomates.
       10 septembre 44, les trams ne montent que jusqu’à l’arrêt de la gare.
       11 septembre 44, la circulation est interdite dans un rayon de plus de 6 km de sa résidence, par mesure de sauvegarde contre l’espionnage ; le service postal est suspendu, sauf avec les communes limitrophes.
       12 septembre 44, les trams montent jusqu’à Homvent.
       21 septembre 44, une bombe volante tombe au cimetière de Beyne vers 19 heures. C’est la première d’une longue série que les Allemands aux abois lancent depuis des rampes de lancement établies près des frontières. Des déportés, obligés à fabriquer ces engins de mort, à longue portée, les sabotent dans la mesure du possible. Ces armes secrètes qui doivent changer le cours de la guerre, assure Hitler à ses armées en débandade, manquent de précision et atteignent rarement des objectifs stratégiques précis. Deux villes sont visées : Liège et Anvers.
       On suit facilement leur trajectoire des yeux par l’épais sillon de fumée que ces robots laissent échapper, des oreilles par leur ronflement rauque et désagréable. Ils causeront de nombreuses victimes parmi la population civile.  
       22 septembre 44, une bombe volante tombe à Fayenbois sans éclater.
       23 septembre 44, une bombe volante tombe en plein nouveau cimetière de Chênée vers 17 h 45 ; des vitres volent en éclats rue de Herve et au château de Gaillardmont. Les particuliers remplacent le verre des fenêtres et des portes par des tôles : c’est meilleur marché et plus résistant pour succéder aux vitres brisées, car le passage de ces engins se fait de plus en plus fréquent. Petit à petit, la population s’adapte à vivre dans la crainte de bombardement ; on s’installe dans les caves dont on renforce les voûtes en étançonnant, si on est en chemin et que le bruit de moteur cesse, on se couche à même le sol, les mains protégeant la tête.
       03 octobre 44, ouverture d’un camp de prisonniers allemands “sur les Pleins”. On commence les travaux pour l’installation d’un hôpital de campagne à la “plaine des manœuvres”, là où la S. T. 1. L. a établi son dépôt, et à Fayenbois, dans les prairies où sont implantées les maisons de la Petite Propriété Terrienne.
       11 novembre 44, messe solennelle au cours de laquelle la Brabançonne orchestrée à 5 voix mixtes est exécutée avec brio par la chorale paroissiale. Les anciens combattants des deux guerres et quelques militaires Américains en uniforme sont présents.
       14 novembre 44, le danger se rapproche, une bombe volante est tombée sur le bureau des Postes, à Grivegnée-centre. On dit qu’il y a 6 tués et 75 blessés. L’immeuble est complètement anéanti. Le nouveau sera construit quelques années plus tard, rue Vignoul, et une plaque commémorative sera apposée sur la façade.
       19 novembre 44, messe pour les prisonniers de guerre de la paroisse, encore au nombreux d’une centaine dans les camps allemands et pour les déportés. Sermon par le R. P. Turine S. J.
       20 novembre 44, on établit l’enseignement à mi-temps dans les écoles adoptables et communales pour tâcher de reprendre les cours interrompus. Cependant, on doit bien licencier le petit monde car la journée sera sombre ; on comptera, en effet, 13 bombes volantes chutant dans les environs de Liège. Et les jours se succèdent dans les mêmes frissons d’angoisse pour la population.
       29 novembre 44, journée record, on ne compte pas moins de 130 alertes en 24 heures.
       10 décembre 44, soixante-dix alertes avec une cinquantaine de robots qui s’abattent sur la région liégeoise.
       Le dimanche 24 décembre 44, survol d’avions allemands qui mitraillent l’hôpital militaire installé à Fayenbois. Ce sera l’hallali car la Luftwaffe est dépourvue d’essence, d’avions et de pilotes. C’est l’arme qui lui fera le plus cruellement défaut devant l’offensive russe et devant l’offensive des alliés qui progressent toutes deux implacablement.
       À partir du 01 janvier 45, les Américains installent un contrôle du charroi militaire et des civils à hauteur de l’église paroissiale, aidés en cela par des gendarmes belges.
       10 janvier 45, chute d’une bombe volante au hameau du Bois Ghéau.
       11 janvier 45, journée sinistre pour la paroisse. Jusqu’à cette date, tous les environs ont été battus par les engins destructeurs ; il ne s’accréditait que Bois-de-Breux qui était miraculeusement protégé. Hélas, à 12 h 30, un engin s’abat à Fayenbois, détruisant des immeubles et tuant même Mme Thunus. À 15 h.20, un engin tombe sur le préau couvert de l’école catholique des garçons. C’est un grand désastre : l’école Saint-Joseph est pour les trois quarts détruite, la maison du concierge est abattue ainsi que celles des frères Deflandre (première école de la paroisse), le presbytère est très sérieusement endommagé ainsi que toutes les maisons des environs. Une dizaine d’immeubles sont inhabitables, plusieurs devront être rasés car ils menacent  de tomber en ruine.
       Mme Ponçon est tuée dans sa salle à manger tandis que Mlle Cerfontaine est tuée sur le chemin ainsi qu’un cycliste, deux conducteurs de camionnette au gazogène, une dizaine de militaires américains en stationnement en ce moment pour le contrôle militaire et des occupants d’une motrice de tramway qui montait à hauteur de l’église. Nombreux sont les habitants blessés par des éclats dé toutes sortes, vitres principalement. De l’église, il reste les murs et la toiture très endommagée ; les beaux vitraux sont perdus à jamais, le plafond est effondré pour grande partie ; l’école du Sacré-Cœur et le vicariat ont aussi beaucoup souffert. M. le curé habite provisoirement chez un particulier, établi à mi-côte, dont l’immeuble n’a pas souffert de la guerre.
       Aussitôt le vicariat remis en état, il prendra possession de cet immeuble en attendant que le presbytère soit habitable. Quand un vicaire sera désigné par son évêque, il occupera momentanément un petit appartement de fortune dans l’ancien couvent des Frères, lui aussi gravement sinistré. Contre mauvaise fortune, on fait bon cœur, à l’image de bien des paroissiens qui ont paré au plus pressé en attendant l’indemnisation pour dommages de guerre. Il faudra plusieurs années de démarches multiples et décourageantes.
       L’entraide n’a jamais été si spontanée et si active pour déblayer, pour protéger, pour déménager, afin que la pratique paroissiale soit possible.
       À partir du 11 janvier 45 jusqu’au 15 août, les offices se célébreront dans la salle de spectacle du Cercle Saint-Joseph. Le jour de l’Assomption, on utilisera le préau couvert de l’école du Sacré-Cœur, sommairement réparé et transformé en chapelle provisoire (salle de spectacle actuelle). En semaine, les offices se célèbrent dans la chapelle du couvent des Sœurs. Quand les paroissiens pourront-ils à nouveau venir s’agenouiller dans leur cher temple ?
       20 janvier 45, fin du contrôle américain à la grand-route car l’offensive von Rundstedt, dernière folie suicidaire de Hitler, commencée à la mi-décembre, est arrêtée et en régression sérieuse ; les robots se font de plus en plus rares car les rampes de lancement ne résistent pas et l’alimentation régulière ne suit pas. Le dernier impact d’une bombe volante dans notre paroisse est dans une prairie du Thier Lemaire le 11 janvier après-midi et dans une prairie longeant la rue Gaillardmont vers minuit.
       08 mai 45, capitulation sans condition de l’Allemagne dont bien des régions sont en ruines et dont la population a pu mesurer l’horreur de la guerre qu’elle a imposée par deux fois aux pays voisins. On respire, on exulte, enfin la liberté. Les jours suivants, on verra rentrer des prisonniers, des déportés des camps de concentration ; on leur fait fête, on les ravitaille du peu dont on dispose, on les fleuri et cependant, un malaise flotte toujours : reviendront-ils tous et en quel état ? Chaque semaine, M. le vicaire Pirson et des dames réunissent les rentrés de la semaine, on les fête ainsi que leur famille dans un petit souper intime, agrémenté de musique, de chants, de danses.
NOTES SUR LE CHAPITRE
       1. Les péripéties de vie au sanatorium des Bruyères, au cours de la guerre 40-45, sont très bien racontées par V. Ambroisse, dans son livre illustré "le château des Bruyères à Bois-de-Breux". Il est disponible à la librairie de la clinique.
       2. Imposé par l’occupant pour ses opinions sympathisantes




XXII
Nouvelles paroisses

Robermont
       La Chartreuse, ayant été déclassée comme forteresse par l’autorité militaire pour devenir simple caserne, les terrains environnants furent relevés de leur déchéance au profit de la construction d’immeubles. Un nouveau quartier s’y édifia rapidement et la nécessité d’une nouvelle paroisse indépendante se fit sentir.
       Le 01 mai 1908, M. le curé Haaken est commissionné par Mgr l’Évêque pour le service de la nouvelle paroisse. Le 06.12.1908, Mgr l’Évêque décrète la constitution et le fonctionnement provisoire dû nouveau centre religieux à partir du l0.12.08. La reconnaissance officielle eut lieu le 26 juillet 1909. La première pierre de l’église fut posée le 18 juillet 1910.
       Bois-de-Breux céda, de son territoire, la portion située à l’Ouest et donna comme limite Est de la nouvelle paroisse :
       a. Les 2 côtés de la rue du Bassin jusqu’à son extrémité.
       b. Les 2 côtés de la rue de Herve jusqu’à hauteur de l’entrée de l’école de l’État.
       c. Les 2 côtés de la rue Nicolas Spiroux jusqu’à la rue de Belleflamme.
       d. D’une ligne idéale courant à travers champs et rejoignant ces trois pointes.
Chênée-Thiers
       En juillet 1933, la rue Malvaux (des deux côtés), les Petites Bruyères (Les Fossettes) et le côté droit de la rue Gaillarmont, en montant, jusqu’au sanatorium et exclusivement, furent détachés de notre paroisse pour former avec les parties de Chênée et de Grivegnée, la nouvelle paroisse de Chênée-Thiers, dénommée Saint-Jean Vianney. Bois-de-Breux fournit un nouveau centre de vie religieuse, son premier curé, en la personne de M. l’abbé Duquenne Léon, vicaire à l’Immacu1ée Conception depuis 13 ans.
       Bois-de-Breux paroisse céda encore des parties de territoire pour constituer les paroisses récentes de Belleflamme, des Bruyères-Jupille, de Fayembois.






XXIII
Administration communale
       Au point de vue politique, la commune de Grivegnée, dont Bois-de-Breux est partie, fut administrée, jusqu’en 1896, sans interruption, par le parti conservateur libéral. Les libéraux, d’abord respectueux des croyances, petit à petit, comme dans tout le reste de la Belgique, devinrent, surtout pendant et après la période qui suivit 1879, des anticléricaux. L’élément catholique fut éliminé du conseil communal. La “loi de malheur” fut appliquée dans toute sa rigidité et provoqua l’ouverture à Bois-de-Breux, de l’école libre des garçons.
       Entretemps, le socialisme naissant faisait des conquêtes nombreuses dans la population ouvrière, le petit artisanat et même la bourgeoisie, éblouie par le vent de démocratie qui soufflait de partout. Les socialistes, malgré le régime électoral plural qui les handicapait, firent entrer leurs élus au conseil communal, à la faveur des élections de 1895, emportant même la majorité des voix.
       Peu organisés, novices en science administrative, commettant multiples erreurs et gaspillant les deniers publics, les socialistes, en 1899, redevinrent minorité et la majorité passa aux “intérêts communaux”(alliance libérale-catholique). En 1903, ils furent même complètement éliminés du Conseil communal. Plusieurs catholiques siégèrent de 1900 à fin 1907 et exercèrent une influence sans cesse grandissante sur les décisions par leur esprit de travail et de tolérance. Aussi vit-on les cadres administratifs et l’enseignement pourvus d’agents croyants, quoique le Conseil communal comptât cependant en son sein des libéraux progressistes et même un échevin franc-maçon.
       En vue des élections de 1907, les libéraux contractèrent un “cartel” avec les socialistes. Luttant sur une liste commune, libéraux et socialistes renversèrent la majorité “intérêts communaux” et les catholiques furent complètement éliminés. Le cartel administra seul jusqu’après la guerre 1914-1918.
       Le suffrage universel pur et simple amena les trois partis au pouvoir dans la proportion de 7 socialistes, 4 catho1iques et 3 libéraux de 1920 à 1936. La diversion rexiste qui divisa les catholiques et les libéraux eut pour résultat, aux élections de 1937, de donner aux socialistes 9 sièges et aux catholiques 3. Un rexiste entrait au Conseil communal ; les libéraux étaient éliminés. Les socialistes administraient donc selon leur seul bon vouloir avec 9 voix alors qu’ils ne recueillaient aux élections que 48 % des suffrages : conséquence de l’éparpillement des votes et du système de la représentation proportionnelle.
       En 1940, après plusieurs semaines d’évacuation et d’abandon du pouvoir, le bourgmestre et un échevin reprirent leurs fonctions. Les conseillers catholiques qui avaient donné des preuves de leur civisme, exigèrent que les postes d’échevins vacants leur fussent confiés et c’est ainsi qu’en 1940 et 1941, les Allemands, ayant prohibé les réunions du Conseil communal, notre commune fut administrée et le ravitaillement organisé par deux socialistes et deux catholiques. Les écoles libres bénéficièrent des distributions de soupe, cependant le subside demandé pour le chauffage des classes fut rejeté par parité de voix.
       Les budgets et comptes de la Fabrique d’église de Bois-de-Breux sont approuvés par les catholiques, les socialistes s’abstenant. Pour l’exécution des obligations imposées par la loi envers les édifices du culte, les membres du Conseil de fabrique multiplient les interventions et finissent par obtenir satisfaction.
       Dans le domaine matériel, les administrations successives ont fait bénéficier la commune de progrès concernant l’hygiène, l’eau alimentaire, l’éclairage, les égouts.
       À la suite de l’ordonnance allemande, enjoignant aux bourgmestres et échevins de plus de 60 ans, d’avoir à quitter leurs fonctions, le bourgmestre M. Malaise démissionna de sa charge et Grivegnée fut, à partir d’octobre 1941, administrée par M. Vanhamme et les trois échevins précités.
       La majorité socialiste se maintint au pouvoir jusqu’en 1976, année choisie pour doter le pays d’une administration d’entités nouvelles (loi des fusions de communes). Bois~de-Breux qui avait déjà dû fusionner d’une façon arbitraire et irrationnelle avec Grivegnée, était forcément rattaché à Liège pour constituer avec d’autres communes le Nouveau-Liège.
       Les mandataires socialistes, plus préoccupés de combattre la loi Michel (social chrétien) et de mener des actions d’arrière-garde, entamèrent cette nouvelle ère communale dans l’improvisation et le désordre. Les relations culturelles, économiques, artistiques, historiques y trouvaient leur consécration pour les habitants de Bois-de-Breux. La route axiale Liège-Aix-la-Chapelle, feu le chemin de fer du Plateau de Herve à Liège, les transports en commun de la S.T.I.L., lignes 10 et 11 témoignent de cette relation évidente.
       Que faut-il penser de cette autorisation trop tardive de prolonger la ligne d’autobus 29 Liège, Grivegnée, Chênée, Les Bruyères le 1ermars 1978, avec arrêt au Viaduc de Bois-de-Breux, réclamée depuis des décades pour les démarches administratives et pour se rendre au travail dans les usines de la vallée ?





XXIV
L’éclairage public

       Jusque vers 1900, la grand-route n’était éclairée, et en hiver seulement, que par des lanternes à pétrole fixées à même la façade de certains immeubles, à distance d’une centaine de mètres les unes des autres. Dans les autres artères, c’était pire encore : seules les extrémités étaient marquées par un “réverbère”. Quelquefois, lorsque le chemin était particulièrement ombreux, un troisième lampion intermédiaire était jugé nécessaire.
       L’éclairage, étant mis périodiquement en adjudication et allant au souscripteur le moins exigeant, il n’était pas rare que les lampes s’éteignissent par manque d’huile après deux ou trois heures d’éclairage. De sorte qu’aux jours les plus courts, Bois-de-Breux se trouvait occulté complètement à neuf ou dix heures du soir. Les conseillers communaux de la section de Bois-de-Breux avaient beau réclamer des améliorations, les membres de la majorité du Conseil, tous habitants du fond de Grivegnée, n’en continuaient pas moins à traiter le hameau en parent pauvre.
       Cette intolérance et cette partialité se caractérisaient aussi au niveau de la voirie. Le chemin vicinal (rue J. CralIe) reliant Bois-de-Breux à Grivegnée-centre que devaient emprunter tous ceux qui travaillaient dans la vallée et ceux qui recouraient aux services administratifs, était un des moins carrossables et des moins entretenus de la commune. Pour transporter les candidats au mariage et leurs familles à l’Administration communale pour la cérémonie civile, il était fréquent que, pour éviter nids de poules et fondrières de cette voie sans revêtement, les calèches et landaus accomplissent le détour par Amercœur et la Bonne-Femme (la ségrégation n’est pas une découverte de fin du XXème siècle).
       Cependant, en 1911, alors que la section de Grivegnée jouissait, depuis 1870, de l’éclairage au gaz, le Conseil communal décida de prolonger le dit éclairage à la section de Bois-de-Breux, mais uniquement pour le service des habitations, l’éclairage public continuant à être assuré par des réverbères à pétrole, quelque peu plus nombreux toutefois.
       Très peu d’habitations furent raccordées au service, car celui-ci devait cesser son activité à l’échéance fort proche du contrat de la commune. Vint la guerre 14-18. Le pétrole manqua rapidement ; on s’éclaira à la chandelle, puis au carbure de calcium. En 1915, afin de rendre service à la population, la société des Tramways Est-Ouest établit, à titre précaire et seulement le long de la grande chaussée, une distribution de courant électrique continu de 550 volts qui nécessitait la mise en série de 5 ampoules électriques. Chacun s’empressa d’adopter le nouveau système.
       En 1919, la société d’électricité Seraing et Extension établit un réseau le long de la chaussée de l’État pour le service des habitants ; elle escomptait du reste un contrat pour l’éclairage de toute la commune. Mais celle-ci s’associa à ses voisines et avec elles fondèrent l’Association Liégeoise d’Électricité. Dès lors à dater de l’année 1922, toutes les rues furent pourvues d’un éclairage suffisant qui sera régulièrement adapté au progrès. En différents points du village, on construisit des cabines électriques et on planta des poteaux pour supporter câbles et lampadaires, l’urbanisme fut loin d’être respecté.











XXV
Distribution d’eau
       Vers1900, un embryon de distribution d’eau fut amorcé à Bois-de-Breux. Un réservoir, recueillant les eaux drainées et celles d’un grand puits fut aménagé au Plateau des Bruyères. Quelques bornes fontaines jalonnaient la grand-route. Les habitants du “Trosoris” continuaient à s’alimenter à la grande pompe sise en face du Christ ou à la fontaine du pré “Gihenne” ; tandis que ceux de Belleflamme se servaient d’un élévateur d’eau placé sur un puits.
       De nombreuses habitations étaient encore pourvues d’excellents puits d’eau potable ; malheureusement ceux-ci, les uns après les autres, voyaient leur source se tarir par infiltration dans les galeries houillères. Deux mares, l’une à Belleflamme, l’autre en bordure de la grand-route, au lieu-dit “fond du Bois-de-Breux” servaient à l’abreuvage des animaux et aux besoins des entrepreneurs en maçonnerie.
       Certaines maladies épidémiques, telles que fièvre scarlatine, gale, choléra, éclosent fréquemment en certains milieux ; il fallait songer sérieusement à doter la commune d’une distribution d’eau alimentaire.
       Les études furent longues et laborieuses ; plusieurs projets virent le jour. Enfin, en 1910, en attendant que les travaux de captation et d’amenée d’eau du Néblon fussent menés à bien, la localité fut pourvue, par les soins de la “Compagnie d’Eau des Vennes”, d’eau filtrée du sous-gravier de l’Ourthe.
       Le service se fit en deux temps : d’abord, des bornes-fontaines, placées dans les quartiers habités, que les particuliers actionnaient au moyen d’une clé spéciale, ensuite, d’un raccordement aux maisons, pour les propriétaires qui consentaient à la dépense.
   













XXVI
Les égouts
Sur avis et recommandations des services de l’hygiène et de la salubrité publique, l’Administration communale favorisa le raccordement à bon marché des habitations à la canalisation d’eau alimentaire, supprima les bornes-fontaines en les remplaçant par des “bouches pour incendie” (B. I.)·et, à partir de 1936, édifia tout ‘un réseau de canalisations d’égouts. Ainsi disparaissaient des immeubles les puits, la fosse à aisance qu’il fallait vider périodiquement et même les citernes à eau pluviale, si appréciée comme eau douce, pour la lessive, l’entretien, l’arrosage.
       Par suite de l’implantation de plusieurs centaines de logements sociaux, cité Merlot, dans les prairies de la ferme qu’habita enfant l’écrivain patoisant Marcel Rémy, les eaux de pluie ne furent plus absorbées par le sol, mais déversées à l’égout collecteur. Les entrepreneurs qui ne voyaient là aucun problème mais une solution de facilité déchantèrent lorsqu’ils constatèrent que le calibre des canalisations n’avaient pas été calculés pour ce supplément à évacuer alors qu’il aurait été si simple et si économique pour les occupants de pouvoir bénéficier d’eau gratuite obtenue au moyen d’une pompe.
       Faut-il incriminer la société de consommation ou l’imprévoyance ?
XXVII
Plaine des manœuvres
       Le “champ des Manœuvres” à l’usage de l’armée, situé à Bressoux, ayant été incorporé aux terrains servant à l’Exposition internationale de Liège en 1930, des terrains furent expropriés en notre localité, au lieu-dit “Les Sarts”, entre les rues des Bassins, Bodson et la Grand-route et convertis en plaine de manœuvres. Ils furent utilisés régulièrement par les régiments casernés à la Chartreuse ; en 44, ils servirent à l’installation d’un hôpital militaire de campagne de l’armée américaine.
       La guerre 40-45, mécanisant à outrance tous les services des armées, le charroi militaire automobile augmenta en nombre, en poids et en modèles. Les casernes, implantées dans les villes, ne répondaient plus à cette modernisation qui nécessitait garages, ateliers, voies d’accès solides et faciles. On en construisit de nouvelles en dehors des agglomérations. La Chartreuse vit son activité de plus en plus réduite et la plaine des manœuvres désertée par la troupe. Quelques clubs de football louèrent pendant quelques années une parcelle de la plaine jusqu’au jour où la S.T.I.L. y implanta un dépôt très vaste avec toute l’infrastructure nécessaire à la concentration de la plus grande partie de son matériel. L’inauguration eut lieu en avril 83.
       Un poste avancé de la caserne dès pompiers de Liège est établi aussi sur cet ancien terrain militaire ainsi qu’un centre de Tir réservé à la police.

















XXVIII
Situation sociale et industrielle
       Les conséquences financières de la guerre 14-18 ont fait disparaître la classe des petits rentiers. La proximité des casernes de la “Chartreuse et Cavalier Fonck” d’une part ; le prix des loyers en ville, d’autre part, ont amené bon nombre d’officiers, sous-officiers, employés de commerce et de banque, à élire domicile à Bois-de-Breux.
       C’est avec les détaillants, encore nombreux, malgré la concurrence de la Coopérative Ouvrière et C. A. V. (comptoir d’achat et de vente), la composition essentielle de ce que nous appellerons la petite bourgeoisie.
       Cette classe moyenne est plutôt sédentaire, ne se fait visite qu’à l’occasion d’événements heureux ou pénibles. Les fréquentations suivies, régulières, sont ignorées ; on aime son chez soi, la vie en famille. Il en résulte cependant un certain cloisonnement qui nuit aux relations des jeunes gens. On se connaît mieux qu’en ville, on se salue au passage d’un bonjour amical, mais non en membre d’une communauté sociale. Petit à petit, la population de classe moyenne adopte le mode de vie des citadins.
       La classe ouvrière est plus sociable si l’on peut ainsi qualifier cette intimité plus grande dans les relations. Cependant, là aussi, il y a tendance à réduire les fréquentations. Mais, malheureusement, souvent les foyers sont stériles, ils n’attirent guère ; c’est pourquoi aussi souvent que possible, on en sort pour aller au cinéma ou au dancing. Au cours du dernier demi XXème siècle, une heureuse évolution s’est produite au point de vue hygiène, tenue extérieure, langage (dont le patois fera les frais) ; l’intérieur des foyers, après la guerre 14-18, est plus confortable, plus coquet, luxueux parfois.
       Comme ailleurs, après la dite-guerre, les jeunes filles de la classe besogneuse se sont portées avec engouement vers des professions nouvelles : demoiselles de magasin, employées, dactylos, ouvrières de fabriques. Le désir de libération et de promotion animent les jeunes filles qui n’avaient d’autres horizons que l’assistance à la mère de famille, la couture, les ménages à domicile, les travaux de charbonnage, les bonnes œuvres. Cette indépendance épanouira par l’achat de vêtements et chaussures à la mode, de produits de beauté, de fréquentations régulières des lieux de plaisir, de rencontre plus facile.
       Il en résulte moins de réserve et plus de liberté d’allure. Rejetant toute entrave, des époux, ici comme ailleurs, décident de commun accord la stérilité de leur union, à moins qu’ils n’admettent encore l’unique héritier. La présence d’une trentaine de familles nombreuses cache un peu le spectacle effrayant de la dénatalité qui apparaît cependant réelle quand on se penche sur les statistiques. Ceux qui ont l’avenir de la population en mains ne peuvent ni l’ignorer, ni éviter de rechercher les moyens propres à provoquer un redressement indispensable.
       L’artisanat comprend quelques petits patrons : entrepreneurs maçons, menuisiers, serruriers, forgerons, plafonneurs, ébénistes, tailleurs, briquetiers, bouchers, boulangers, travaillant seuls ou accompagnés d’un, de deux, de trois ouvriers. Les salariés sont mineurs, métallurgistes, ouvriers du bâtiment. Les mineurs sont occupés dans les “burtês” de la Chartreuse et Violette, de la Sainte-Famille, des Houlleux, de la Rouge-Cense, du Trosoris, du pré Djihenne, de la Jobette.
       Les métallurgistes travaillent dans les usines de la vallée chez Orban, chez Chaudoir.
       Les loisirs, pour la jeunesse, peuvent se grouper comme suit : le football, le cinéma, le dancing, le ping-pong, le tennis, le cabaret…
       La dizaine de petites métairies du siècle dernier est en voie de disparition, elles ne sont plus rentables, c’est une source d’appoint, et non plus un moyen d’existence. L’une d’elles abrita Marcel Remy, né à Bois-de-Breux en 1865, qui fut musicologue, journaliste, écrivain, auteur de “Les Ceux de chez nous”, livre de Contes, considéré par les philologues, notamment Antoine Grégoire de l’Université de Liège qui en signe la préface, comme un petit monument littéraire et linguistique de la Wallonie car Marcel Remy utilise à bon escient l’idiome de la majorité de la population du XIXe siècle : le wallon, pour présenter en un langage savoureux et coloré des faits qu’il a vécus comme enfant.
Industrie
       Dès la fin de la guerre 14-18, quelques personnalités du monde industriel projetèrent sinon de supplanter, du moins de concurrencer l’Allemagne dans la fabrication des jouets. Ils conçurent le “Jouet liégeois”, acquirent, le long de la voie de chemin de fer, le vaste bâtiment de l’ancienne “Tuilerie de la Chartreuse” et installèrent des machines perfectionnées. Malheureusement, la clientèle plus exigeante que patriote, vite oublieuse d’un passé récent, n’eut pas la patience de laisser passer la période d’adaptation de nos ouvriers.
       Il fallait du bien fini immédiat. Ce fut la fin d’une généreuse entreprise après moins de deux ans d’efforts persévérants. Les bâtiments passèrent à la firme “Close” pour la récupération des vieux métaux puis à la firme “Javel”. Maintenant, en cette fin de siècle, seule une partie du bâtiment et la cour sont occupés par une petite entreprise.
       Un autre projet eut la chance de mieux réussir. Nous voulons ici désigner la “Téco” (abréviation de Theunissen et Compagnie), établie rue Malaise. L’industrie, toujours si prospère, a commencé dans un garage, rue Vinâve à Grivegnée et n’occupait au début que quelques personnes. Pour faire face à ses affaires grandissantes, M. Theunissen fonda la société anonyme "Téco", en 1920. Il en devint l’administrateur délégué, poste qu’il détenait encore en 1940, Au départ, la fabrication se limitait aux interrupteurs d’installations électriques, coupe-circuits et coupe-circuits blindés.
       À la suite de la conception et de la création de divers appareils nouveaux, la société prit rapidement de l’extension. Les circonstances de l’après-guerre forcèrent le conseil d’administration à monter une fabrique de porcelaine, c’est alors que la société se transporta en notre village.
       À ce moment, les ménagères auraient pu brandir l’étendard contre la pollution et les fumées épaisses de cette fabrique qui étaient menace contre la blancheur du linge tendu sur les fils à lessive des pelouses et des jardins ou posé à même le gazon, les haies vives, les groseilliers et contre l’air si salubre des hauteurs.
       Elles maugréaient et patientaient sachant aussi que la direction de Téco s’employait à découvrir le filtre à fumée adéquat par des tests régulièrement renouvelés. Et puis, on connaissait les jours et les heures fatidiques où on rechargeait les fours : on consultait l’orientation du vent. Bref, on vivait plus la tolérance que l’agressivité. Il y a beaucoup de vrai dans l’expression souvent entendue : « c’était le bon temps ! »
       Toujours à l’affût de nouveautés, les dirigeants furent amenés à augmenter sans cesse les bâtiments et les installations. On considère aujourd’hui que la société anonyme Téco fut une des usines la mieux outillée, non seulement de la Belgique, mais aussi de l’étranger. Le personnel, en 1940, se composait d’environ 250 personnes travaillant dans des locaux vastes, bien aérés et bien chauffés.
       L’usine couvrait une superficie d’un hectare et exportait ses produits non seulement en Europe, mais encore en Orient, en Amérique latine, en Afrique, aux Indes néerlandaises. Ces produits comportent tout l’appareillage électrique et la porcelaine.
       En 1920, la firme “Société anonyme G. Bailly-Mathot” de Chênée, de réputation établie pour la construction des générateurs à vapeur, décida d’établir une nouvelle division de ses usines à Bois-de-Breux, rue Malaise. Un raccordement au chemin de fer du Plateau de Herve lui fut concédé par la Société Nationale des Chemins de fer.
       La division couvre une superficie de 4000 mètres carrés et occupe quelque 150 personnes. Les ateliers Bailly-Mathot fabriquent des générateurs à vapeur, des surchauffeurs et réchauffeurs, des réservoirs à vapeur, eau, gaz et air comprimé ainsi que divers fabricants de moyenne et grosse chaudronnerie. Les matières premières proviennent d’usines du bassin industriel liégeois. Vers 1965, la firme cessa toute activité et une petite entreprise s’installa dans une partie des bâtiments.
       Proche de la gare du chemin de fer est venue s’installer, en 1923, une industrie nouvelle “Produits chimiques de Liège”, société anonyme, s’occupant de la fabrication des encres d’imprimerie et autres, des vernis, des ciments réfractaires.
       Les “Établissements horticoles Charles Sladen” ont contribué à populariser les orchidées. Alors qu’il était encore secrétaire général de la Société Anonyme Cuivre et Zinc, Charles Sladen cultivait en amateur les orchidées bien avant la guerre 40. Ayant réussi plusieurs croisements habiles, une activité nouvelle lui apparut.
       Il acquit à Bois-de-Breux, entre la rue Gaillardmont et le sentier des Trois Chemins, un important lot de terrain, y construisit maison d’habitation et serres. Les produits s’en vont régulièrement vers la ville de Liège, la Capitale et les autres villes de Belgique tandis que des plans d’orchidées sont envoyés chaque année outre-Atlantique.
       Si l’emploi, depuis la crise économique de 1975, est en régression partout, il l’est aussi à Bois-de-Breux. Les petits indépendants, les détaillants, les entrepreneurs, tous les petits pourvoyeurs de main d’œuvre subissent particulièrement ce phénomène mondial tout comme les grosses entreprises. Peu nombreux sont les habitants qui occupent encore un emploi dans la localité, même depuis l’implantation d’un supermarché, d’un dépôt d’autobus, d’une crèche, de l’agrandissement de la clinique des Bruyères, d’un poste de pompiers, la maison de repos.
       L’Union coopérative avec son cabaret, sa salle, sa boucherie-charcuterie, son magasin d’alimentation générale, point de vente d’une chaîne de grande distribution, cessa toute activité un peu avant la crise économique, après avoir connu, grâce à sa clientèle recrutée au parti ouvrier et aux conditions avantageuses réservées aux coopérateurs, des décades de prospérité.











XXIX
Notice sur l’origine des lieux-dits
et du nom de quelques rues

“Sur l’Île” 
       Endroit autrefois fort marécageux. Vers 1890, la pointe du territoire comprise entre les rues de Herve et de Gaillardmont était encore occupée par un grand étang, et en face de la rue du Viaduc, se trouvait un second fossé. C’est donc probablement à cette situation que nos ancêtres ont donné à cet endroit le nom de " l’île" parce qu’il émergeait des eaux environnantes.
“Sur les Bruyères”
       Le plateau sur lequel sont tracés actuellement les rues de Bois~de-Breux, Docteur Bordet, Sentier des Prés des Monts, Marcel Rémy, Max Buset, Cité MerIot, se dénomme encore à présent : “Les Bruyères” en souvenir de terrains incultes autrefois et couverts de Bruyères. Cependant, au siècle dernier, cette plaine surélevée était plus communément appelée “Prés des Monts” pour la différencier avec les “Prés des Dames”. Ce plateau déborde notre paroisse, il s’est fortement peuplé dans la seconde moitié du XXème siècle ce qui a nécessité l’établissement d’une nouvelle paroisse, celle des Bruyères-Jupille et la construction d’un complexe scolaire communal, l’école des Bruyères.
“Sentier des Trois Chemins”
       Aussi dénommé “Fond Anne”, appellation déformée en “Foyam”, conduisant de la rue de Herve aux trois chemins : rues de Gaillardmont, des Orchidées, de Gaillardmont (nouvelle section).“Fond Anne”, vallée où prend naissance “le Rèwe” (le ruisseau), elle doit son appellation au nom du propriétaire des terrains avoisinants. Cette vallée, à l’endroit du “Trosoris” portait le nom de “Fond Gihenne” (fond Jeanne).
“Rue de la Rousselière”
       La famille de la Rousselière fut pendant de longues années la Providence des pauvres de la paroisse. L’assiette de cette rue fut donnée à la commune par cette famille dans le but de faciliter aux habitants du hameau du “Trosoris”, la fréquentation des offices religieux. Le 1er septembre 1979, les autorités du Nouveau Liège la dénommèrent rue Trou-Souris… Grandeur et décadence ?
“Rue de la Tuilerie”
       Cette dénomination nouvelle rappelle la tuilerie qui occupa autrefois cet endroit, appelé “El Panetreye”, la tuilerie de la Chartreuse.
“Rue des Bassins”
       Pour actionner leur moulin, les religieuses de Robermont firent creuser de grands étangs à cet endroit (le dernier vestige a disparu vers 1890). Des drains, formés de deux briques “sur champ” et d’une couverture, collectaient les eaux des terrains environnants. Des travaux de voirie, exécutés rue Malaise en 1900, mirent au jour une de ces canalisations.
“Waide des Dames”
       En français “pré des Dames”, endroit du Plateau de Belleflamme, constitué de prairies, ayant appartenu aux religieuses du monastère de Robermont.
“Rue des Pépinières”
       Débaptisée, elle aussi, en rue Demoulin, appellation donnée par suite des pépinières Defourny établies dans les terrains avoisinants. Les plants de ces cultures jouissaient d’une grande renommée dans les régions fruitières du pays.

“Rue du Prince de Liège”

       Appellation très ancienne et trouvant son origine dans le fait que, jusqu’à la fin du XVIIIème siècle, le Prince-Évêque de Liège possédait à Bois-de-Breux une maison de campagne. Celle-ci était située à l’endroit où était établie la cour à marchandises du chemin de fer. L’immeuble en question a été démoli en 1924. Le sentier prenait naissance, avant l’établissement de la ligne de chemin de fer, à l’angle de la maison des princes-évêques.
“Rue Eugène Lambinon”
       Eugène Lambinon, né et baptisé à Bois-de-Breux (13.03.1848), instituteur en chef à l’école communale de 1873 à 1888, fondateur de la première bibliothèque populaire, des “conférences populaires” lesquelles avaient pour devise “instruire en amusant” et de la chorale “les échos de Bois-de-Breux” qui eut son heure de célébrité dans les concours d’art choral, fort en vogue à la fin du XIXème siècle, décédé secrétaire communal à Beyne~Heusay en 1890.
“Rue Trou-Souris”
       Exactement et correctement “Trosoris”, appellation fort ancienne, puisque nous la trouvons déjà dans l’acte d’érection de la seigneurie de Gaillardmont et dans la permission donnée par le Prince- Évêque en 1645 à A. Renart et N. Beaufort de faire une xhorre pour rendre ouvrables les houilles du Bois-de-Breux, dans la. Vallée du Rew entre Malvaux et le Foyème. Peut-on traduire trois sources, trois chemins, trou d’écoulement ?
“Au Pavillon”
       Le “Pavillon”, nom donné à l’immeuble, construit par la famille de la Rousselière pour loger le concierge de sa propriété de Fayenbois. Il s’élevait à droite de l’entrée de Fayenbois, là où est établie une station d’essence.
“Aux deux baïes”
       Traduction française de “aux deux barrières”. Elles délimitaient anciennement la magnifique avenue de charmille touffue de près de huit cents pas qui conduisait à la maison de Gaillardmont. Un petit parking, à la disposition des visiteurs de la maison de repos « les Ceux de chez Nous  », marque cet emplacement.
“Rue Malvaux”
       Déformation de l’expression wallonne “mâle voie”, mauvaise voie, ou bien mauvaise vallée par opposition à Belvaux, semble-t-il.
“Les Fossettes”
       Appellation qui pourrait provenir de l’existence ancienne, en cet endroit, de petites fosses à argile (terre glaise) et d’autres à charbon, à ciel ouvert, un peu en deçà du carrefour des rues Gaillardmont et Malvaux.
“Fond Gihenne”
       Continuation de la vallée “Fond Anne”, à l’endroit du Trosoris , près du viaduc du chemin de fer, à l’ouest de la voie ferrée. Appellation nommant, sans doute, l’ancienne propriétaire, car Djihène est la traduction wallonne de Jeanne.
“Rue Joseph Willem”
       Joseph Willem, originaire de Jupille (12. 08.1840), président pendant de longues années du “Caveau Liégeois”, société de littérature wallonne liégeoise, décédé à Chênée, le 26.07.1914, auteur de nombreuses chansons et poèmes en patois, passa toute sa jeunesse à Bois-de-Breux et fut, avec Eugène Lambinon et Auguste Desoer, un des grands animateurs de la société chorale “Les Échos de Bois-de-Breux”
“Rues Spiroux, Cralle, Malaise, Lemasuy”
       Commémoration du nom de bourgmestres de la commune de Grivegnée.
“Sentier des Prés des Monts”
       Sentier privé, autorisé aux piétons par servitude, ainsi dénommé parce que situé au sommet de la colline, alors que les Prés des Dames sont au pied, sur le Plateau.
“Croix Wathar”
       Elle fut édifiée, vers 1860, par M. Wathar, habitant à l’angle des rues Willem et Gaillardmont. Pour permettre la construction d’immeubles, elle a été déplacée et érigée à l’entrée de l’avenue de la Rousselière, un peu avant la rue Pasteur.
“Croix des deux Baies”
       Une nouvelle a été remise en place, après les travaux de voirie nécessités par la construction de la maison de repos dont l’entrée est située à la jonction des rues Gaillardmont et Orchidées.
“Croix du carrefour de Malvaux”
       Une coutume ancienne voulait que l’on plantât une croix à l’endroit où deux chemins se coupaient. L’une de ces deux croix “la rouge croix” marquant l’extrémité de la commune de Chênée a donné le nom au charbonnage qui s’y était implanté “Al rod-je-creu”. L’autre marque l’extrémité de la commune de Grivegnée.
“Chapelle du Malvaux”
       Dénomination tirée du nom de l’endroit. Cette petite chapelle, très bien entretenue, a laissé un souvenir durable aux participants des processions annuelles. La bénédiction du Saint Sacrement était donnée à cet endroit du parcours. Elle était signalée par un carillon tonitruant “tir de campes” qui obligeait les gens du voisinage à ouvrir grandes les fenêtres pour éviter les bris de vitres. Il fallait rivaliser avec celui de la rue Mutualité, en durée et en force. D’année en année, c’était l’escalade : la fête au village commençait !
“Christ du Trosoris”
       Croix plantée, en 1866, lors de l’épidémie de choléra, au carrefour des rues Orchidées, Espoir et Trosoris.
“Chapelle Saint-Léonard”
       Autrefois, chapelle jumelle de la chapelle Moureau. Les propriétaires et architecte de la maison à bâtir au coin des rues Bailly-Deflandre et de l’Espoir eurent l’idée pieuse d’encastrer, dans la façade de l’immeuble, la partie essentielle de la chapelle qu’ils devaient démolir. Les habitants du quartier, d’accord avec le clergé paroissial, dédièrent, en une manifestation solennelle avec sermon en plein air, la nouvelle chapelle à Saint-Léonard, patron des houilleurs particulièrement nombreux dans le quartier.
“Chapelle Moureau”
       Dénomination tirée du nom d’un tailleur de pierres (Hubert Moureau) qui avait son atelier et sa maison à l’angle des rues de Herve et Mutualité. Lorsqu’une maison de commerce a été construite à cet emplacement, un Christ a été encastré dans la façade. La chapelle a été démontée et rebâtie rue Malaise. On pourrait encore rappeler dans ce chapitre la croix Lamarmite et le calvaire du vieux cimetière dont le crucifix, jugé très ancien par un expert, a été confié au musée diocésain.
       Au sujet de ces croix et calvaires, on remarquera qu’elles sont plantées, le plus souvent, à la croisée de chemins, qu’elles sont à peu près toutes situées du même côté de la grand-route de Liège à Aix-la-Chapelle. Le village était autrefois entièrement établi de ce seul côté. Ce n’est qu’au début du XXème siècle que des habitations s’élevèrent sur le Plateau des Prés des Monts, sur les Pleins et sur les Sarts.
       Ce qui surprend l’étranger, en quête d’originalité, c’est la potale accrochée à un grillage en fer martelé, sous un hêtre rouge plus que centenaire, dédiée à N. D. de la Route. Elle est facilement repérable : au pied de la côte, passé le passage à niveau, à droite en montant, constamment fleurie et illuminée, signalée à la dévotion par quelques ex voto, régulièrement entretenue par une personne pieuse.
       On trouve deux statues de la Vierge de plus grande dimension : l’une près du presbytère, une promesse faite au cours de la guerre 40-45 et honorée en 54 pour l’année mariale, l’autre à l’entrée de la Clinique Notre-Dame des Bruyères.
   









XXX
Les atouts de Bois-de-Breux
       Bois-de-Breux disposait de plusieurs atouts pour le développement de l’habitat et l’augmentation de sa population, habitat et de nombreuses d’habitants qui ont presque doublé en moins d’un siècle, ma1gré le frein â la construction qu’imposera la crise économique depuis 1975. Une route nationale, à trois bandes, la traverse d’Est en Ouest, facilitant la rapidité des communications. Il est situé à 4 km du centre d’une des cinq plus importantes villes du pays.
       Des autobus modernes, confortables et fréquents le relient aux centres commerciaux, scolaires, économiques, de loisirs, de soins. Son air est considéré comme très salubre, puisque des établissements requérant cette condition primordiale s’y sont implantés, voire développés : une clinique avec maternité, une maison de repos, une crèche, autrefois des colonies de vacances. La plupart des services de première nécessité sont présents dans la localité : poste, banques, caisse d’épargne, magasins variés de grande et de petite surface, centres de sport et loisirs, écoles, groupes de jeunes, de pensionnés, division de police.
       Le cadre de verdure ne manque pas avec les magnifiques parcs de Fayenbois et des Bruyères, endroits de rêve, calmes, reposants que connaissent bien les convalescents de la Clinique pour retrouver santé physique et morale, que fréquentent des groupes de jeunes, qu’apprécient des promeneurs.
       De nouveaux quartiers se sont implantés et d’autres le seront encore, pour bénéficier de tous ces avantages, nécessitant des voies d’accès nouvelles à Fayenbois, à la cité MerIot, au Malvaux, sur les Pleins, aux Maquisards. Les rares maisons insalubres et dangereuses ont été détruites pour faire place à de nouvelles, si bien que l’habitat répond aux exigences de l’urbanisme. Il a très peu souffert de l’extraction de la houille.
       Les premiers buildings, implantés au dernier quart du XXème siècle, sont-ils les précurseurs d’une modernisation à outrance de l’habitat et par voie de conséquence d’une société de moins en moins communicative, tout comme à la ville proche où on souhaiterait ressusciter, artificiellement et sur commande, la sociabilité dans les quartiers ?
Progression de la population
   1751 : environ 300 habitants ; 1840 : environ 600 habitants ; 1866 : environ 1400 habitants ; 1916 : environ 2500 habitants ; 1936 : environ 3800 habitants ; 1950 : environ 4000 habitants.



XXXI
Curés de Bois-de-Breux depuis 1840
       1. Abbé ARTS, Corneille-Antoine, né à Ravenstein (Hollande), le 08 juillet 1808. Ne trouvant pas, ainsi que son frère Antoine, le moyen de répondre à l’appel du Christ dans leur patrie protestante, ils prirent le chemin de la Belgique et du diocèse de Liège. Ses études au Séminaire terminées, Corneille-Antoine fut nommé successivement chapelain de Robermont, vicaire de Saint-Remacle-au-Pont, curé à Bois-de- Breux par Mgr Van Bommel. Installé en janvier 1840 par, le Rd Curé-Doyen Groteclaes, il chanta sa première messe dans l’antique chapelle, le 02 février. Il a quitté la paroisse le 31 mars 1855 pour se rendre au couvent des chanoines de Sainte-Croix à Diest, est parti ensuite comme missionnaire au Canada, en est revenu le 15 avril 1861 pour prendre la charge de maître des novices à Sainte·Agathe-Cuyck (Hollande). Il est mort, professeur de théologie au collège de Sittard, le 23 mai 1876.
       2. Abbé TOMSIN, Herman, né à Lowaige-lez-Tongres, en 1817, précédemment vicaire coadjuteur à Aubin-Neufchâteau (Aubel) ; il devint curé à Bois-de-Breux le 31 mars 1855, installé le 17 juin 1855 et quitta la paroisse le 28 juin 1861 pour la cure de Villers-le-Bouillet.
       3. Abbé DARDENNE, Nicolas-Augustin, né à Malmédy, diocèse de Cologne, le 28.03.1824, vicaire à Jupille le 10.09.1849, transféré à Clermont le 24.05.1855 puis à Hannut, nommé curé à Bois-de-Breux le 21.06. 1861, parti pour Bellemaison près de Huy, le 20.10.1865, a cependant encore célébré un dernier mariage à Bois-de-Breux, le 02.11.1865.
       4. Abbé FRANCK, Gaspard-Joseph, né, à Volkerich, commune de Gemmenich, canton d’Aubel le 20.05.1827, chapelain à Noblehaye-Bolland, le 06.09.1853, vicaire Baelen sur Vesdre, le 14.07.1854, à Saint-Antoine (Liège), le 31.10.1856, curé à Bois-de-Breux du 10. 11.1865 à décembre 1870, retraité à Volkerich où il y est décédé.
       5. Abbé MORET, curé à Bois-de-Breux de décembre 1870 à février 1872.
       6. Abbé DEPONT, Lambert, né à Herve en 1833, vicaire à Saint-Remacle-au-Pont, curé à Bois-de-Breux de février 1872 à juillet 1891, y est décédé le 01.05.1892, à l’âge de 59 ans, inhumé en l’ancien cimetière paroissial.
       7. Abbé JOSSE, Joseph, précédemment vicaire à Saint-Pholien (Liège), curé à Plainevaux, curé à Bois-de-Breux le 24.08.i891, installé le 06.10 .1892, décédé à la cure le 22.09.1909, à : l’âge de 69 ans, inhumé au cimetière de Plainevaux.
       8. Abbé, FRYNS, Gérard, né à Fourons-Saint-Martin, le 24.01.1865, vicaire à Bressoux de 1893 à 1903, aumônier à l’hôpital de Bavière jusqu’au 28.11.1909, curé de Bois-da-Breux ensuite jusqu’à sa mort survenue à la cure le 05.01.1922, inhumé au cimetière de Fourons Saint-Martin.
       9. Abbé LONNOY, Léopold, né à Liège le 07.01.1878, vicaire à Vierset-Barse du 05.01.1904 au 09.11.1908, vicaire à Soumagne jusqu’au 17.08. 1916, curé à Berneau jusqu’au 09.01.1922, installé curé à Bois-de-Breux le 26.02.l922, a pris sa’ retraite le 01.12.1946 et s’est retiré à Liège, rue Jean d’Outremeuse. Il y est décédé le 31.07.1949.
       10. Abbé LOCHTEN, Henri, né à Liège, le 26.10.1910, ordonné prêtre en 1933, professeur au collège Saint-Martin à Seraing, vicaire dominical à Bois-de-Breux en 1946, curé à partir de la Noël de la même année à Bois-de-Breux, retraité à Banneux. Accueil N. D., route de la Sapinière depuis le début novembre 1975, a fêté son jubilé de 50 ans de prêtrise à Banneux, le samedi 02 juillet 1983.
       11. Abbé BRAEM, Roger, placé en maison de repos à la Providence à Beaufays
       12. Abbé MINON, Michel, né à Liège, le 23.01.41, ordonné prêtre en 1964, vicaire à Huy avant de devenir curé à Bois-de-Breux, de novembre 1975 à fin mai 1983.
       13. Abbé SCHLIM Alain, vicaire à Outremeuse avant de devenir curé effectif à Bois-de-Breux â partir de septembre 1983.
       14. Abbé HAUMONT Jehan, curé à Bois-de-Breux jusqu’au 30 juin 1996
       15. Abbé BERNARD Gilles, curé à Bois-de-Breux à partir du 1er juillet 1996.
       16. Abbé MURÉKÉZI, Oscar, pour l’unité pastorale Alliance Jupille-Grivegnée Hauteurs.














XXXII
Vicaires successifs depuis 1902

       1. Abbé DRESSE, Albert, premier vicaire de la paroisse depuis son érection, s’y est dévoué de 1902 à 1907, est parti pour devenir professeur au col1ège Saint-Quirin à Huy, a été ensuite nommé curé à Nonceveux, puis à Villers Saint-Siméon.  
       2. Abbé PHILIPPET, Joseph, vicaire de 1907 à 1911, parti pour la cure d’Ombret où il est décédé.  
       3. Abbé BARBIER, vicaire de 1911 à 1913, parti ensuite au Brésil comme missionnaire.
       4. Abbé COLLIGNON, Guillaume, vicaire de 1913 au 29 mai 1918, parti pour être aumônier au Val Notre-Dame d’Antheit et y est décédé en mars 1973.
       5. Abbé GOBLET, Arsène, de juillet 1918 au 11 novembre 1918, parti comme vicaire à Sainte-Marguerite à Liège, puis à Soumagne, ensuite curé à Oneux.
       6. Abbé DENIS, Émile, de novembre 1918 au 31 mars 1921, parti ensuite pour la cure de Souxhon, puis pour celle de Fize-Fontaine où il est décédé.
       7. Abbé DUQUENNE, Léon, de juillet 1921 à février 1934, nommé ensuite curé de la nouvelle paroisse de Saint-Jean Vianney à Chênée-Thiers, en 44, doyen à Saint-Barthélemy, Liège, puis responsable de la catéchèse aux handicapés, a célébré son jubilé de 60 ans de prêtrise en 1981 dans l’église qu’il fit construire à Chênée-Thiers.
       8. Abbé MALHERBE, Robert, né à Marchin le 23 février 1908, ordonné prêtre en 1934, vicaire à Bois-de-Breux de juillet 1934 à février 1937, parti comme vicaire à Saint-Vincent, Liège, jusqu’en 1944, nommé curé à Hannêche jusqu’en.1948, puis à Lize-Notre-Dame jusqu’en 1955, puis à Sainte-Marguerite, Liège, jusqu’en 1961, ensuite curé à Saive jusqu’en 1970, et pour finir doyen à Soumagne jusqu’en 1983. Il prend une retraite bien méritée à l’âge de 75 ans après 49 ans de ministère pastoral.
       9. Abbé SCHURMANS, Gisbert, de juillet 1937 au 06.01.1941, retourné dans le Limbourg natal comme vicaire à Hamont.
       10.Abbé PIRNAY, Jean-Louis, auxiliaire-missionnaire (S. A.M. société missionnaire fondée par l’abbé Bolland à la demande du R. P. Lebbe, missionnaire en Chine) originaire de Heusy, vicaire à Bois-de-Breux du 10. 01.1941 au 31.12.45, nommé curé à Ondenval près de Waismes. Sur dénonciation rexiste, il avait été arrêté par les Allemands le 25.06.41 pour un sermon anti-collaboration prononcé le 10 mai précédent et condamné à 2 ans d’emprisonnement en Allemagne. Gracié le 20.01.44, la santé fort ébranlée, il avait repris ses fonctions paroissiales à partir du 01 avril, secondé par M. l’abbé Jacques PIRSON. Pendant l’emprisonnement de M. l’abbé PIRNAY, le vicariat fut rempli par le R. P. GYSENBERGHS de la congrégation de Schuetz du 01.08.42 au’08.03.43. Il est retiré à Banneux, où il essaie de rendre les menus services que sa santé très éprouvée lui permet encore.
       11. Abbé PIRSON, Jacques, natif des cantons germanophones belges que les autorités militaires allemandes avaient annexés au Grand Reich en 40-45, enrôlant de force les jeunes gens pour leurs armées. Avec beaucoup d’autres patriotes, il se réfugia vers l’intérieur du pays pour continuer sa formation. Sitôt ordonné, il fut nommé second vicaire à Bois-de-Breux du début juin 44 .au ~6 juin 45, daté à laquelle il alla remplir les fonctions de vicaire à Eupen.
       12. Abbé WERNER, Robert, de 1947 à 1955, date à laquelle il fut nommé vicaire à Beyne-Heusay, de Plainevaux où il exerçait les fonctions de curé, il sollicita son envoi au Ruanda comme prêtre au service du clergé local. Rentré au pays après plus de 10 ans en Afrique, il exerce les fonctions de curé à Juslenville.
       13. Abbé LIMBREE, Jean, 1956 à février 1968, date à laquelle il fut désigné comme curé de la paroisse Sainte-Bernadette à Angleur.
       14. Abbé ROHEN, Edmond, d’Aubel où il était vicaire, il fut désigné pour Bois-de-Breux en mars 1969, il partit pour la cure de Strée pour une dizaine d’années avant d’exercer les fonctions de secrétaire à l’évêché de Liège.
       15. En 1970, la fonction de vicaire est remplie par des R. P. Rédemptoristes du couvent de Bois-de-Breux : R. P. ROUSCHO, puis en 1971, par le R. P. ADAM, Maxime.
       16. Abbé M’FUKALA, Willy, vicaire à Bois-de-Breux jusqu’en 2003.
       17. Abbé BEDIN, Jean, vicaire à Bois-de-Breux depuis 2002.











XXXIII
Les membres du Conseil de Fabrique depuis  1840

M. le baron Amédée de la ROUSSELIERE,
MI. J. L. CORBUSIER,
M. LAMBINON Jean-Henri,
M. F. GODVILLE,
M. LAMBINON Nicolas-Joseph,
M. F. GIROUARD,
M.F. CREUTZ,
M. J. VARLET,
M. LAMBERT Jean,
M. DEFFET Martin,
M. CAJOT Jean,
M. CHARLIER François,
M. LAMBINON François,
M. HODEIGE Théodore,
M. SERWIR André,
M. le baron Arthur de la ROUSSELIERE,
M.1e baron Gaston de la ROUSSELIERE,
M. BURETTE Hubert,
M. DEGUELDRE-LAMBIN0N,
M. LAURENTY,
M. CLEEN Walthère,
M.ORBAN de XIVRY Jules,
M. WOYAVE Hubert,
M. ERS Désiré,
M. PETERMANS Louis,
M. FERARD Joseph,
M. STYNEN Fé1ix,
M. GRANDJEAN Fernand,
M. MARGANNE Mathieu,
M STRAETMANS Charles,
M. DESERT Victor,
M. MATHOT Robert,
M. MARTENS Edmond,
M.BONAMEAU Léonard,
M. DUMONT Pascal,
M. ELOY Gilbert,
M.DESERT Léon,
M. CHARLIER Joseph,
M. MARGANNE Edgard,
M. BRAEM Roger.













Appendice
La personnalité de M. le baron G. de la Rousselière
       Par l’exposé, historique qui précède, le lecteur admettra que nous donnons à M. le baron Gaston, le titre de « Grand bienfaiteur de la paroisse ».
       Docteur en droit, homme de mœurs simples, ennemi de tout faste, jamais il ne tint équipage. Si, pour Mlle sa fille, une voiture s’avérait nécessaire, il faisait venir de la ville un landau de louage. Pour lui, il s’en allait à pied et plus tard en tram. Son personnel, réduit au strict minimum, resta à son service pendant toute la durée de son existence ; on ne connut point de figure nouvelle dans la domesticité.
       Pour lui, un valet de pied, le brave M. Pierre, comme on l’appelait au village, lui suffisait ; pour son épouse, aussi modeste que lui, quoique née comtesse de Robine, et plus tard pour sa fille : une gouvernante ; pour le ménage, une cuisinière assistée d’une fille de quartier et d’une fille d’office.
       Les menus de la table étaient sobres ; s’il arrivait que M. le baron ait un hôte à dîner, le vin était de marque, mais l’amphitryon, pour lui-même, ne prenait que de l’eau naturelle.
       Des œuvres de la ville de Liège, de la banlieue et d’ailleurs trouvaient porte ouverte à son hôtel du boulevard de la Sauvenière. Les écoles furent cependant de toutes celles qu’il subsidiait le plus largement, nombre d’entre elles lui doivent leur existence. Que de prêtres, d’autre part, dont il a assumé la charge des études ; que de missionnaires ont porté au-delà des mers le fruit de sa large générosité.
       Les pauvres étaient l’objet de sa sollicitude particulière ; à certains jours d’hiver, son hôtel particulier de Liège ressemblait plus à un bureau de bienfaisance qu’à une maison de maître, tant était nombreux la file des solliciteurs. À Bois-de-Breux, membre depuis sa fondation de la conférence de Saint-Vincent de Paul, il assumait fidèlement la charge de visiteur des familles. Tant qu’il vécut, ce fut lui seul qui couvrit les dépenses de cette œuvre.
       On le savait catholique et catholique fervent ; cependant, on ne le vit jamais intervenir dans les luttes politiques, ce n’était pas son domaine.
       Homme de grande droiture, jamais il n’accepta de rédiger une lettre de recommandation ni de faire démarche, tant était grande sa crainte que sa forte personnalité ne causât préjudice à un candidat plus méritant.
       Successivement, il supporta avec stoïcisme le décès de son fils bien-aimé, puis de son épouse chérie.  Avec sa tendre et douce fille Marie qui communiait intimement à toutes les charités paternelles, il se pencha encore plus que par le passé sur ses œuvres et, lorsque Dieu lui reprit ce dernier enfant, M. le baron ne pensa plus qu’à se dépouiller complètement de tout ce qui lui restait de fortune en faveur de ses œuvres.
       Lorsqu’il mourut, le 08 mars 1917, il ne lui restait de sa grande fortune qu’on évaluait à plus de 20 millions de franc-or que la place lui réservée dans le caveau familial au cimetière de Bois-de-Breux.
       Détachée de toute attache matérielle, cette créature d’élite, les mains pleines de bonnes œuvres, pouvait sans crainte se présenter devant son Créateur.
       Paroissiens de Bois-de-Breux, conservons dans nos cœurs le souvenir du saint homme tout imprégné de l’esprit évangélique.
       Bien que persuadés que sa mort fut couronnée immédiatement de la palme des élus, ne l’oublions pas dans nos prières. Là-haut, M. le baron Gaston de la Rousselière veille mieux encore qu’ici-bas sur sa chère paroisse de Bois-de-Breux et sur ses concitoyens (1)

Félix-Matthieu Marganne,
Paroissien contemporain.
   
NOTE SUR LE TEXTE :
   
       1. Triste signe des temps, la seule et unique rue de la Rousselière de la paroisse dont le baron avait, par ailleurs, cédé gratuitement le terrain, a été débaptisé par le Conseil communal du Nouveau-Liège, le 1er septembre 1979.
   
   













L’ERMITAGE DANS L’HISTOIRE

       Dans l’opuscule La Chapelle de N. D. de Lorette à Visé” présenté par un ancien curé, sous le pseudonyme Apicula (petite abeille), au chapitre VII, l’ermitage de Lorette, à Visé, les ermites sont décrits comme suit par le R. P. O. Kelly S.J. : chapeau, habits comme ceux des Franciscains, mais sans capuche et plus courts, ceinture de cuir, bas et souliers. Ils devaient porter la barbe. Les ermites étaient donc, à peu près, comme des tertiaires franciscains et obligés à suivre une règle, mais ils ne faisaient pas de vœux.
       Un jardin, attenant à l’ermitage, des aumônes recueillies spécialement aux Quatre-Temps, un petit métier et la vente d’images et de chandelles aidaient les ermites à vivre modestement. L’Occupation française, (1795-1815) qui supprima en Belgique les chapitres et les couvents, vola  les biens ecclésiastiques, persécuta le clergé et les religieux, n’épargna pas les ermites. Ceux-ci durent abandonner leur costume et leur fonction, en 1796.
       D’après Jean Danielon et Henri Marrou dans “Des origines à Saint Grégoire le Grand, le monachisme”, il semble que ce soit Saint-Antoine, mort plus que centenaire en 356 qui innova cette façon de vivre pour répondre à un appel intérieur. C’était un paysan égyptien d’origine modeste, pratiquement illettré.      Chrétien de naissance et déjà pieux, il se convertit à la vie parfaite à l’âge de 18 ou de 20 ans. Il prend au sérieux et suit à la lettre les conseils évangéliques, notamment : “Si tu veux être parfait, va, vends tout ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, viens et suis-moi”.
       Antoine s’adonne à la vie solitaire, d’abord dans le voisinage immédiat de son village natal, pour pouvoir profiter des conseils d’un vieillard plus expérimenté (cette dure école ne s’apprend pas sans maître), puis, pour près de 20 ans, dans un fortin abandonné (les Romains en avaient jalonné les pistes entre le Nil et la mer Rouge) et, pour finir, plus profondément dans le désert.
       Il mène une vie de pénitence et de perfectionnement spirituel toujours plus rigoureux. Son ardeur à se dépasser dans la privation du confort, de la nourriture ou du sommeil et dans l’accumulation des heures de récitation (il apprend par coeur des psaumes, de l’Écriture-Sainte) prolongée par la méditation, sont déconcertants.
       Il apparaît comme un fou en proie à la misanthropie, un serviteur de Dieu inutile. Que non, car il possède un rayonnement, il attire les foules (début des pèlerinages) qui viennent lui demander le secours de ses prières (à lui, le spécialiste), la guérison des maladies de l’âme et du corps (à lui, le surhomme), des conseils (à lui, le sage).
       La. vie ascétique gagna nos régions, grâce à Saint Martin qui s’établit à Liguge, près de Poitiers (France) vers 360.
Constatations qu’on ne peut passer sous silence :
       1. l’ermite fuit peut-être la société et l’église à certaines périodes, pour le relâchement de vie.
       2. du fait que son isolement, souvent jusqu’à la mort, s’il est moins connu par ses confidences, il l’est par la légende qui l’enveloppe.
       3. nul n’ignore de nos jours Charles de Foucault (1858-1916), ermite contemporain au Sahara, dont les Petites Sœurs et les Petits Frères, en 1983, vivent à contre-courant de la société matérialiste et de confort.
       4. la formule érémitique de vie religieuse était beaucoup plus répandue dans le monachisme oriental qu’occidental.
       5. à la fin du Moyen Age, dans l’agitation politique et sociale, l’érémitisme permit à des âmes d’exception de trouver le détachement absolu ; le suisse Nicolas de Flue (1487) vécut près de 20 ans, seul dans la montagne, ce qui ne l’empêcha pas de contribuer à la constitution de la Confédération helvétique ; pendant longtemps, la garde du phare de Cordouan (XVIème siècle) ; beaucoup de reclus et surtout de recluses vivaient enfermés dans une petite cellule accolée à une église, notamment Ève de Saint-Martin, Liège (1250).
       6. si l’ancien droit canonique contenait nombre de prescriptions pour les ermites (visant habituellement à les empêcher de vivre dans une complète indépendance et à leur assurer un certain encadrement), par contre le Code de 1917 (renouvelé en 1983) ne mentionne pas une seule fois les ermites, omission qui en marque pratiquement la fin au cours de l’été du Tricentenaire.
    













L’histoire de Notre-Dame de Lorette

       Loreto est une ville d’Italie de 10.000 habitants, à 27 km au sud d’Ancône, à 4 km de la côte Adriatique. Loreto que certains associent à lauretum (laurier qui pousse dans cette région), d’autres à Loreta, le nom de la propriétaire du bois voisin.
       Le fait de Lorette, d’après le dictionnaire d’Archéologie chrétienne et de Liturgie de Dom Henri Leclercq.
       À Loreto, dans la Marche d’Ancona en Italie, on vénère une Santa Casa que l’on dit être la maison habitée par la Vierge Marie, à Nazareth, et où elle fut saluée par l’ange Gabriel, lui annonçant qu’elle serait la mère du Sauveur des hommes.
       Cette maison de 10,71 m sur 5,21 aurait été miraculeusement enlevée de Nazareth et transportée dans les airs par des anges qui l’auraient déposée d’abord à Tersatz en Dalmatie (Yougoslavie) en 1291, puis transférée à Loreto, au milieu d’un chemin en 1295, où elle est devenue l’objet d’un pèlerinage célèbre.
       La croyance en l’authenticité de la Santa Casa se recommande d’une double source écrite : une relation de Pietro di Giorgio Tolomei et l’histoire de la Vierge de Loreto de Girolamo Angelita.
       Tolomei, mieux connu sous le nom de Teramano (son lieu de naissance), attaché au service du sanctuaire de Loreto, de 1430 à 1473, rédigea en 3 pages le fait de Lorette, d’après le récit recueilli de la bouche de deux vieux habitants de Recanati.
       « Un beau jour, une église sans fondations, contenant une statue de la Vierge, surgit miraculeusement auprès de Recanati, dans un bois appartenant à une noble dame nommée Loreta.
       La grande affluence de gens accourus au nouveau sanctuaire, ayant attiré des brigands dans le bois, et causé d’autres désordres, l’église que, du nom de la propriétaire, les habitants avaient appelée Notre-Dame de Lorette, fut non moins miraculeusement transportée sur une colline dite des “Deux frères”
       Mais ces deux frères s’étant disputés les profits résultant du concours des pèlerins, l’église reprit son vol et se plaça sur le grand chemin qu’elle ne quitta plus, et qui fut illustrée par de nombreux miracles.
       Cependant personne ne savait ce que c’était que cette église, ni d’où elle avait été primitivement enlevée, lorsque, en 1296, la Vierge Marie apparut en songe à un saint homme et lui révéla que l’église mystérieuse n’était autre chose que la chambre qu’elle avait elle-même habitée à Nazareth, chambre où elle était née, où elle avait été saluée par l’ange Gabriel et où elle avait élevé son divin Fils jusqu’à l’âge de douze ans.
       Plus tard, les apôtres avaient converti cette chambre en une église dédiée à la mère de Dieu, et Saint Luc avait fait de ses mains l’image de Marie que l’on y voyait encore.
       Mais, après la conquête musulmane, l’église, restée jusque-là en grande vénération parmi les chrétiens d’Orient, ne pouvait subsister au milieu de populations converties à l’islamisme. Aussi les anges l’avaient-ils transportée en Dalmatie, près de Fiume. Enfin, les chrétiens de ce pays, n’ayant pas pour la demeure sacrée le respect qu’elle méritait, les anges l’avaient reprise et déposée de l’autre côté de l’Adriatique, dans les bois de Loreta.
       Une députation de 16 notables, envoyés à Nazareth par les habitants de Recanati, à qui le saint homme avait fait part de ces révélations, put constater que les mesures de l’église de Lorette concordaient rigoureusement avec celles des fondations qui subsistaient encore au lieu d’origine. »
       Tel est le récit que Teramano dit avoir recueilli de la bouche de deux vieux habitants de Recanati qui tenaient les faits de leurs grands-pères qui les avaient reçus de leurs grands-pères.
       Angelita, secrétaire perpétuel de la commune de Recanati, se fit l’historien de la Santa Casa et présenta son ouvrage en 1431.
       “Donc, le matin du 10 mai 1291, les gens de Tersatz furent très surpris de voir, sur une colline à peu de distance de leur village, une chapelle qui ne s’y trouvait pas la veille, et qui brillait d’un éclat merveilleux. Ils accourent, entrent dans la chapelle ; ils y trouvent un autel surmonté d’un crucifix et une statue en bois de la Sainte Vierge, portant dans ses bras son divin Fils. Ce ne peut être qu’un don du ciel : déjà les malades accourent et plusieurs y sont guéris.
       Le bruit de l’événement se répand à Fiume et aux environs. Alexandre, évêque de Tersatz, depuis longtemps malade, se recommande à la sainte Vierge. Marie lui apparaît et lui fait connaître les grandeurs de sa maison, car c’est elle qui vient d’être apportée à Tersatz.
       Sache, lui dit-elle, que la chapelle, récemment apportée dans votre pays, est la maison même où j’ai été jadis engendrée et élevée. C’est là que, sur l’Annonciation de l’ange Gabriel, par l’œuvre du Saint-Esprit, j’ai conçu mon divin Fils. Là, le Verbe s’est fait chair.
       Aussi, après notre mort, les Apôtres consacrèrent cette maison illustrée par de tels mystères. Ils y célébrèrent à l’envi le saint sacrifice. L’autel apporté avec l’édifice est celui-là même que l’apôtre Pierre y a établi. L’image du Christ crucifié que l’on y voit, y a été jadis placée par les apôtres. La statue de cèdre est notre portrait de la main de l’évangéliste Luc, qui, en raison de ses rapports familiers avec nous, a rendu notre ressemblance autant qu’il était possible à un mortel.
       Cette maison chérie du ciel, qui a reçu les plus grands honneurs pendant des siècles en Galilée, maintenant que le culte y a cessé avec la foi, a émigré de la ville de Nazareth sur vos rivages. Ne doutez pas. Dieu est l’auteur du fait, lui à qui rien n’est impossible.
       Afin que vous en soyez vous-mêmes le témoin et le messager, soyez guéri. Et l’évêque, rendu à la santé, s’empresse de faire connaître à tous ceux qu’il rencontre et sa vision, et le précieux trésor dont le pays vient de s’enrichir. »
       Une tablette, suspendue à l’une des colonnes au milieu de l’église de Lorette, informe de la translation miraculeuse de l’église de la bienheureuse Vierge de Lorette : l’église de la bienheureuse Vierge de Lorette fut la chambre de la maison de la vierge Marie, Mère de Notre Seigneur Jésus-Christ, laquelle maison fut dans le pays de Judée, au pays de Galilée, appelée Nazareth, et dans cette chambre naquit la vierge Marie et là elle fut élevée, et enfin dans cette chambre elle nourrit son cher fils Jésus-Christ jusqu’à l’âge de douze ans.
       C’est un Jésuite, recteur du collège de Lorette, qui rédigea en 1594 en beau latin “L’histoire de Lorette”. Elle fut traduite en plusieurs langues et souvent réimprimée, notamment à Tournai en 1605.
       On fait état :
       1. d’une prédiction attribuée à saint Nicolas de Tolentino. Montrant la mer Adriatique, le saint se serait écrié : “Un grand trésor viendra de là !” De plus, il aurait été témoin de l’arrivée de la Santa Casa en 1294.
       2. Saint Pierre Célestin, qui fut pape quelques mois sous le nom de Célestin V, aurait, après s’être démis du souverain pontificat, visité la Santa Casa.
       3. Une instruction, remise le 09 septembre 1295, par les magistrats de Recanati, à un envoyé qu’ils accréditent auprès du pape Boniface VIII, pour lui annoncer la translation de la sainte maison du bois de Lorette à la colline des Deux-Frères, afin d’en obtenir la cession à la commune du terrain où la maison s’est fixée.
       4. Une longue lettre contenant le récit des translations, adressée le 08 juin 1297 au roi de Naples, Charles II le Boiteux.
       5. Une notice, sur l’origine du pèlerinage de Lorette, que l’évêque de Macerata, Pierre Maluzzi, qui avait alors Recanati dans son diocèse, aurait rédigée en 1330.
       6. Des relations de pèlerinages faits à Lorette par le doge de Venise, vers 1340 par sainte Brigitte de Suède, en 1342 ; par l’empereur Charles IV, en 1355 ; par le pape Urbain V, en 1367 ; par saint François de Paule, en 1430.
       C’est en 1669 que l’office “Translatio almae domus” fut inséré au bréviaire romain.
       Dans le livre “Les litanies de Lorette” de dom Boval M., édité en 1946, aux éditions Dupuis, le lecteur apprend que le pape Benoît XV, le 24 mars 1920, a constitué N. D. de Lorette, principale patronne, auprès de Dieu, de tous les aéronautes ; que 80 documents pontificaux sont en faveur de l’authenticité de Lorette et s’appuient sur l’apport des érudits, des apologistes (défenseurs), des pèlerins de Nazareth avant et après la translation (1295), des témoignages des historiens, témoignages de la Santa Casa elle-même, car :
       1. elle se trouve au milieu d’une ancienne route publique ;
       2. elle se soutient sans fondations ;
       3. ses dimensions témoignent que sa place primitive était à Nazareth ;
       4. son armoire est creusée dans le mur comme à Nazareth à cette époque ;
       5. son bois vient des montagnes du Liban ;
       6. son mortier et ses pierres sont comme à Nazareth.
       Dans le livre  « Lorette, art et histoire » de Floriano      Grimaldi, on relève que la construction de la basilique qui renferme la Santa Casa a commencé en 1468 ; de nombreux artistes en architecture et en décoration ont contribué à en faire un des plus beaux monuments de l’Italie ; parmi les chefs d’œuvre exposés figure une série de tapisseries tissées à Bruxelles entre 1620 et 1624 par Henri Mattens, d’après les esquisses de Raphaël.  
       Dans la Revue hebdomadaire “Esprit et vie” du 07.05.81, (cédée par les R.R. P.P. Rédemptoristes) sous le titre “Notre-Dame de Lorette”, le lecteur y apprend notamment que les pèlerins se forment en file pour pénétrer dans la Santa Casa et récitent parfois les litanies de la Sainte Vierge qui, justement, ont été inaugurées à Loreto en 1483. Beaucoup tirent leur mouchoir de leur poche ou de leur sacoche pour frotter les murs afin de faire de ce linge une relique.
       Ils baisent aussi les murs, une dévotion des humbles par des gestes naïfs.
       La Santa Casa est la patronne de tous ceux qui empruntent la voie des airs. Lindbergh en fut un pour sa traversée de l’Atlantique en solitaire. Des miracles de l’âme et du corps s’opèrent à Loreto. Une bonne cinquantaine de papes ont visité Loreto ou ont favorisé de dons, le sanctuaire, et d’indulgences, les pèlerins.
       Des saints nombreux et des personnages célèbres ont accompli le pèlerinage à N.D. de Lorette.
       Jean-Paul II, pape-pèlerin de Marie, s’y est rendu le 08 septembre 1979.
       Les arguments des détracteurs de Loreto. (D’après le       dictionnaire d’Archéologie chrétienne et de Liturgie de Dom Henri Leclercq) :
       1. La maison de Nazareth. La chambre de la Sainte Vierge où se passa le mystère de l’Annonciation était une grotte ; elle n’était qu’une partie de l’habitation.
       2. Le sanctuaire de Lorette. Dès avant 1294 existait à Lorette une église ou une chapelle dédiée à la Vierge qui attirait une foule considérable de pèlerins le jour de la Nativité. La statue vénérée était la Vierge portant l’Enfant-Jésus.
       3. L’absence de témoignages. Au début du XXème siècle, de nombreux historiens, formés à la critique rigoureuse, déclarent la translation de la Santa Casa de Nazareth manifestement fausse et mensongère, parce que ne reposant sur aucun témoignage écrit et d’époque.
       4. Conclusion. La légende a pu trouver son origine dans la traduction maladroite de “domus sanctae Mariae” (maison de sainte Marie), désignant les établissements de Lorette : les hôtels, auberges, magasins…etc.
La vie religieuse à Loreto.
       Les pèlerinages principaux ont lieu aux fêtes de la Vierge Marie : Annonciation, le 25 mars ; Assomption, le 15 août ; Nativité, le 08 septembre ; Translation de la Santa Casa, le 10 décembre.
Notre-Dame de Lorette dans le diocèse de Liège.
       Dans le “Vieux Liège et ses monuments religieux”, parmi la centaine d’églises, de chapelles répertoriées, on ne trouve aucune dédiée à Notre-Dame de Lorette. Le Bottin téléphonique n°6, à la rubrique paroisses catholiques, n’en renseigne aucune. Dans les “confrairies et sodalites (associations) de dévotion” disparues dans la tourmente révolutionnaire de 1796, on relève la “confrairie de Nostre-Damme-De-Lorette” en l’église des PP. Dominicains.

La chapelle de Notre-Dame de Lorette à Visé.
       Sous le pseudonyme Apicula (petite abeille), un ancien curé de Visé nous informe dans un opuscule d’une cinquantaine de pages dont on promet une réédition pour célébrer le tricentenaire de la chapelle. Elle a été édifiée en 1684, sur une colline qui domine Visé.
       On y accède par une route étroite et escarpée, direction Barchon et Micheroux au carrefour de la basilique Saint-Hadelin. Elle précède le cimetière au fond d’une place verdoyante, ombragée de plusieurs arbres. Son ermitage lui fait vis-à-vis. Ce petit sanctuaire, construit sur le modèle de la Santa Casa, est très fréquenté, non seulement par les Visétois, mais aussi par la population des villages wallons et flamands de la région.
       Monsieur le Doyen actuel signale que, chaque année au 15 août, de 600 à 1000 pèlerins se réunissent à Lorette. La similitude entre la Vierge de Lorette en Italie, celle de Visé et celle de Bois-de-Breux est réelle. Trois autres concordances entre les chapelles de Visé et Bois~de-Breux peuvent être relevées : date de construction 1684 et 1683, dimensions de la Santa Casa, un ermitage annexé.
L’église de l’Immaculée Conception
de Bois-de Breux.
       Le 21 juillet 1845, Mathieu Groteclaes, doyen de Saint-Nicolas, Liège, a béni et a placé la première pierre de l’église de Bois-de-Breux à élever à Dieu en l’honneur de la bienheureuse Vierge Marie, sous le titre de l’Immaculée Conception.
       Le culte envers Marie, sous le vocable Notre-Dame de Lorette, s’étiole vraisemblablement car on ne trouve plus trace ni de grotte, ni de pèlerinage, ni d’ermitage. Il était plus logique d’accorder la priorité à un dogme de foi pour la dédicace de l’église paroissiale.
   
   


Liste des ouvrages consultés

*Notes historiques recueillies par Jean Lejeune de Jupille.
*Les Délices du Pays de Liège par Saumery.
*Histoire du diocèse et de là Principauté de Liège : Daris.
*La Frontière linguistique : Kurth.
*Chambre des Comptes : liasse de Beaufays.
*Supplément de la revue du Touring-Club de Belgique, septembre 1934.
*Archives provinciales et communales.
*La paroisse de Saint-Remacle-au-Pont : Georges Delarge.
*Dictionnaire historique et géographique des communes belges : E. de Seyn.
*Archives des Tramways Est-Ouest de Liège.
*Archives du Cercle Saint-Joseph de Bois-de-Breux.
*Histoire des rues de Liège : Théodore Gobert.
*Les communes de la province de Liège, Liège 1892, A. de Ryckel.
*Fabrication de la porcelaine Téco : Léo Bonameau.
*Publications du Cercle historique de Fléron.
*Le Château des Bruyères de V. Ambroisse.
*900 ans de vie autour de Saint-Remacle-au-Pont.
*Le Pays de Herve en train, tram et trolleybus du G. T. F.
*Le Val de l’Amblève de Marcellin La Garde.
*Les Ceux de chez Nous de Marcel Remy.
*La Gazette de Liège.
*La vie liégeoise de l’Échevinat du Tourisme de Liège.
*Le Bottin paroissial de l’E D A P.
   



   




Table des matières

1- Le territoire au cours des 12 premiers siècles
2- Étymologie du nom Bois-de-Breux
3-La Seigneurie de Fayenbois et son château
4-La Seigneurie de Gaillardmont et son château
5-Le château des Bruyères
6-L’abbaye de la Chartreuse et la forteresse de même nom.
7-La chapelle et ses desservants. L’ermitage et ses cénobites.
8-Événements de 1790
9-Érection de Bois-de-Breux en cure indépendante.
10-L’église
11-L’épidémie.de choléra en 1866
12-Les cimetières
13-Pollution à Bois-de-Breux.
14-Le complexe paroissial.
15-L’enseignement.
16-Les œuvres paroissiales.
17-La vie des habitants au XIXème siècle.
18-Le chemin de fer.
19-Tramway, trolleybus, autobus.
20-La guerre 1914-1918.
21-La guerre 1940~1945.
22-Nouvelles paroisses.
23-Administration communale.
24-L’éclairage public.
25-Distribution d’eau.
26-Les égouts.
27-Plaine des manœuvres.
28-Situation sociale et industrielle.
29-Notice sur l’origine des lieux-dits et du nom de quelques rues.
30-Les atouts de Bois-de-Breux.
31-Curés de Bois-de-Breux depuis 1840.
32-Vicaires successifs depuis 1902.
33-Les membres du Conseil de fabrique depuis 1840.

Appendice :
*La personnalité de M. le baron Gaston de la Rousselière.
*Notice sur les ermites et sur N.D. de Lorette.
Sources : Liste des ouvrages consultés.
   
  


   


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

La petite rivière

DE LA CROYANCE À LOURDES